L’essor et les nouveaux horizons du e-crm "grande conso"

15 ans après leur lancement, les programmes CRM dématérialisés, proposés par les marques de grande consommation sont arrivés à maturité et font face à de nouveaux enjeux, mais aussi à de nouvelles opportunités.

A l’automne 2000, Danone lançait, sur son site, des coupons à imprimer sur ses marques phares. Le groupe agro-alimentaire devenait alors le premier annonceur français à digitaliser massivement son CRM en proposant aux internautes, à la fois son contenu rédactionnel et ses coupons dématérialisés.

15 ans plus tard, jour pour jour, plus de 90 programmes CRM de grande consommation lui ont emboîté le pas pour proposer des promotions digitales - qu’il s’agisse de programmes multicatégoriels (Mavieencouleurs porté par Unilever et Mondelez, EnviedePlus déployé par P&G, Croquonslavie proposé par Nestlé, Labelleadresse édité par Henkel…) mais aussi des dizaines de sites monomarques qui y ont trouvé une équation, relationnelle et économique, pertinente.

En 2015, ces programmes, arrivés à maturité sont confrontés à de nouveaux enjeux (ROI, contribution…) mais également à des opportunités sans précédent (personnalisation, puissance, data…).

Petite histoire du e-coupon…

A la fin des années 90, quelques sociétés pionnières proposent en France d’imprimer des coupons au sein de portails multimarques. La cinématique proposée au consommateur est rarement fluide : impression en couleur recto/verso, codes à présenter en caisse pour l’impression d’un coupon valable sur la visite suivante, offres valables dans une ou deux enseignes seulement…

PixiBox, la technologie leader, impose à l’époque de coller sur chaque coupon imprimé un autocollant, contremarque nominative, reçue gratuitement par courrier après l’impression du premier coupon. Le e-coupon perd le bénéfice de son immédiateté, mais peut ainsi s’insérer dans l’écosystème du coupon traditionnel.

Il faut dire que le coupon, derrière la trivialité des quelques centimes affichés, est un outil de monétique particulièrement massif. Chaque année, on émet en France, sur les seules marques de grande consommation, environ 5 milliards d’euros sous forme de bons de réduction. Le montant de cet « argent imprimé par les marques » dépasse celui de l’ensemble des billets et des pièces en circulation en France. Cela impose donc d’inventer des écosystèmes suffisamment sécurisés afin que les bons, une fois arrivés en caisse, aient pour le point de vente, la même valeur perçue qu’une pièce de monnaie. Et que chacun des acteurs soit assuré contre les refus en caisse, les fraudes consommateurs, les contrefaçons…

Dans la foulée de Danone, de nombreux acteurs comme Unilever, P&G, Bongrain, mais aussi Carrefour ou Leclerc, choisissent le même partenaire pour éditer de manière dynamique sur leur site des coupons nominatifs, utilisant ce qui est l’un des premiers services en marque blanche de l’histoire du web français.

En 2009, alors que le volume de coupons émis stagne depuis 5 ans, du fait de la cinématique consommateur qui en limite l’usage, les centres de gestion, les enseignes et les marques proposent un cahier des charges, permettant, par l’engagement de ces trois catégories d’acteur, de créer un nouveau format de coupon noir et blanc, directement imprimable par le consommateur, utilisable immédiatement dans plus de 40 000 points de vente et parfaitement inséré dans le circuit traditionnel du coupon papier. Ainsi nait le Webcoupon®, porté par HighCo, dont le cahier des charges a été repris ou copié dans 6 pays européens par les instances de fabricants et d’enseignes.

Le lancement de ce nouveau format fera exploser le nombre de coupons digitaux émis, celui-ci passant de moins de 5 millions en 2010 à plus de 80 millions en 2015.

Où en est-on en 2015 ?

Avec près de 20 millions de produits achetés en France avec un coupon digital, la France est le premier pays européen en la matière : l’hexagone représente à lui seul la moitié du marché Européen.

L’expertise acquise par les marques, les distributeurs, les agences ou les centres de gestion, permet à la France d’exporter son savoir-faire en matière d’e-CRM pour la grande consommation. Plusieurs programmes transactionnels sont ainsi pilotés mondialement sur la partie technique ou marketing par des agences basées à Paris (c’est le cas pour Danone ou P&G, par exemple). Le leader français du couponing digital exporte sa technologie dans une dizaine de pays (France, Belgique, Espagne, UK mais aussi Hongrie, Emirats Arabes Unis ou Canada) et est devenu le N°1 européen et le N°3 mondial en termes d’émissions digitalisées.

La France ayant réussi, avant les autres, à rendre transactionnels ses programmes d’e-CRM a construit des sites et des bases multi-catégorielles, sans équivalent en Europe parmi les annonceurs de grande consommation. Les 5 premiers programmes CRM représentent à eux seuls la moitié des Webcoupons® imprimés en France.

De leur côté, les sites de distributeurs ne distribuent que 15% des e-coupons du marché mais développent significativement leur volume d’une année sur l’autre. Les rubriques spécialisées chez des éditeurs tiers (portails spécialisés ou rubriques dédiées sur des sites « media ») ne pèsent que 10% et sont en déclin, même si de nouvelles initiatives en matière de ciblage permettent à certains éditeurs de tirer leur épingle du jeu.

Quels enjeux pour 2016 ?

Le Webcoupon® à imprimer représente encore les deux tiers des coupons digitaux émis en France. Mais l’émergence de nouvelles technologies (coupons à valoir sur le drive, Load2Card® à charger immédiatement sur la carte de fidélité de l’enseigne, e-ODR, offres mobiles) permettent d’inventer d’autres parcours clients, en e-commerce ou en Trade Marketing à destination des réseaux physiques.

Le changement de nature du trafic des sites Web (moins de flux vers la home page, plus d’accès via Google et Facebook….) impose à tous les acteurs de repenser leur stratégie de contenu en général et donc celle de leur contenu transactionnel en particulier.

L’ensemble des directions digitales et CRM se posent donc les mêmes questions à l’heure des budgets :

  • Comment optimiser, mesurer et garantir le ROI d’un programme CRM transactionnel ? Quels sont les Best Practice du marché ?
  • Quels outils et quels enjeux sur la génération de Data pour les marques de grande consommation ?
  • Comment utiliser les « digital assets » des marques pour réinventer le trade marketing et développer les ventes en e-commerce ou en magasin traditionnel ?
  • Mobile, géolocalisation, programmatique, ciblage sémantique… Quelles sont les prochaines révolutions auxquelles se préparer ?
  • ...

Les outils liés à la DATA (retargeting, personnalisation, ciblage via DMP propriétaire…) permettent d’affiner les stratégies et de combattre les écueils constatés dans la plupart des programmes arrivés à maturité :

  • Rétrécissement de la base d’actifs : alors que les bases de membres continuent leur croissance, le taux d’actifs baisse d’année en année ;
  • Taux d’attrition massif : le churn moyen d’un programme CRM « grande conso » atteint 60% et impose à maintenir les investissements d’acquisition ;
  • Cross-selling limité : sur les programmes multicatégoriels, le nombre de marques consommées en essai ne se développe pas de manière naturelle au fil des ans ;
  • Tâtonnements sur les leviers trade marketing : ces actifs digitaux ne permettent pas encore de négocier des opérations commerciales spécifiques avec des partenaires distributeurs ;
  • Difficulté de mesurer le ROI : le retour sur investissements reste difficile à mesurer tant sur la part transactionnelle qu’au global…

Toutefois, certains programmes commencent à atteindre et à mesurer des niveaux de puissance et de contribution, permettant de concurrencer en interne des activations promotionnelles offline traditionnelles. L’investissement croissant de ces acteurs sur leur programme ne trompe pas. Et la taille n’y est pour rien. Aux côtés de gros programmes multicatégoriels, certains portés par une marque seulement, semblent avoir trouvé leur martingale.

L’année 2016 verra ainsi l’écart de performance se creuser entre les programmes les plus affûtés ayant intégré ces dimensions, et ceux continuant de travailler leur programme en se calant sur des principes de marketing direct, datant du début des années 2000 (campagnes d’acquisition de profil jugées sur le nombre d’optin embasés, puis vagues d’animation des membres en base, exclusivement sur site ou par email). Et il est à parier que la part de l’investissement digital croitra encore chez les acteurs qui investissent déjà plus de 15% de leur budget marketing sur ces canaux, tandis qu’on assistera en parallèle, et pour la première fois, à la fermeture de plusieurs dizaines des programmes n’ayant pas su s’adapter aux règles économiques imposées par le canal digital.

Les mois à venir verront donc l’avènement d’une nouvelle ère pour le e-crm digital, avec le lancement de collaborations inédites entre les marques et les distributeurs, à la fois sur le e-commerce et sur les formats traditionnels. Et sur un partage de la Data client jusqu’ici inédit, validant la stratégie des groupes qui se constituent depuis une décennie un actif digital composé de leurs contenus, de leur audience et de leurs données.