De la loi consommation à l’intelligence artificielle, il n’y a qu’un pas

Dans la distribution, les dirigeants d’entreprises sont soumis au même dilemme à chaque innovation : oser ou procrastiner. Un choix qui s’est répété avec une fréquence inédite durant la dernière décennie.

Entre les applications mobiles, l’internet des objets, le smart data ou l’impression 3D, les occasions de se positionner n’ont pas manqué ces dernières années. Et lorsque les entreprises ne parviennent pas à se déterminer, il arrive que la législation accélère leur prise de décision.C’est vraisemblablement ce qui est sur le point de se produire dans le secteur de la grande distribution avec l’intelligence artificielle.

La loi consommation, « alliée objective » de l’intelligence artificielle dans la distribution

Mercredi 31 janvier, Stéphane Travert, ministre de l’Agriculture présentait en conseil des ministres un projet de loi d’encadrement des promotions proposées par les distributeurs. Le but ? Protéger les producteurs locaux de la pression des distributeurs grâce à une meilleure répartition de la valeur entre les différentes parties. En effet, les supermarchés seront désormais obligés de revendre au minimum un produit alimentaire au prix d’achat majoré de 10%.  

Au-delà de la création d’un nouveau cadre relationnel entre acteurs de la distribution, cette loi va modifier en profondeur l’activité des distributeurs. Les prix des produits – majoritairement alimentaires - vont subir un renchérissement dont les ventes ne sortiront pas indemnes. Sans doute pour éviter toutes levées de bouclier, peu de distributeurs se sont publiquement émus de cet impact défavorable sur les ventes. Pourtant il est inéluctable. A compter de la mi-2018, moment d’application de la loi, le secteur va évoluer dans un environnement proche de ce que le génie militaire qualifie de Vica. C’est-à-dire volatile, incertain, complexe et ambigu. Indubitablement les ventes vont osciller, du fait de ruptures de stocks et de surstocks créés par le changement de comportement des ventes. A telle enseigne que la gestion des stocks risque de vite devenir un cauchemar pour les équipes Supply Chain. D’autant plus que la prise en compte de la modification du cycle de vente est principalement opérée de façon manuelle par chaque responsable approvisionnement. Un mode opératoire dont les inconvénients sont la lenteur et les problèmes d’alignement.

L’intelligence artificielle dans la distribution, une évidence

Avec l’IA ces difficultés s’aplanissent. Et pour cause ! L’intelligence artificielle intègre les soubresauts du cycle de vente en quelques jours à peine et sur une grande échelle, grâce à des analyses en continu quels que soient les volumes ou les produits concernés.

De façon générale, l’IA libère le travail et dessine de nouvelles opportunités pour l’Homme dans ses missions. Dans nos secteurs, l’intelligence artificielle permet de profiler les besoins de chaque magasin en termes de références ou de palettes sur la base de données aussi objectives qu’éparses : l’historique des ventes, la saisonnalité, les commandes clients, la météo, les campagnes promotionnelles ou les commentaires sur les réseaux sociaux. Quant à ses conclusions, elles sont toujours soumises à la validation d’un opérateur humain. Car l’IA n’a pas vocation à se substituer à l’Homme. Elle l’assiste, l’accompagne voire le guide tout en restant sous sa supervision.

Si ce recours à l’intelligence artificielle reste timide chez nous, le numéro 1 mondial de la distribution en a fait sa priorité. Pas pour sacrifier à une mode. Mais au nom du principe de réalité. Lors de la dernière édition de la NRF, Laurent Deségur, figure de proue de Walmart Labs, le département R&D du groupe, expliquait que l’IA « permettait à Walmart d’analyser toutes les données collectées via les différents services et de tenir sa promesse de prix bas ». Ajoutant même qu’il s’agissait d’« un choix critique pour rattraper la supply chain d’un de [nos] concurrents ». Amazon pour ne pas le nommer.

Au XIXème siècle, le philosophe allemand Friedrich Hegel, a popularisé le concept de « sens de l’histoire ». S’il existait un sens de l’histoire dans la distribution, celui-ci indiquerait certainement la direction de l’intelligence artificielle. C’est manifestement ce que pense les leaders mondiaux de la distribution physique et du commerce en ligne. Gageons que l’ensemble des acteurs du secteur leur emboîtent le pas.