Julien Rosanvallon (Médiamétrie//Netratings) "La mesure hybride permettra une vision complète de l'audience d'un site"

Pour améliorer la mesure d'Internet, les acteurs du marché doivent s'accorder sur les critères de fréquentation et de panel. Médiamétrie souhaite montrer la voie.

JDN. Vous venez de publier un livre blanc à propos de la mesure hybride sur Internet. En quoi consiste ce concept ?

Julien Rosanvallon. La mesure hybride assimile deux sources d'informations complémentaires : le panel qui mesure l'audience ou le nombre de visiteurs uniques et fait référence pour le médiaplanning, et la mesure site-centric qui analyse de manière très précise la fréquentation d'un site internet. Médiamétrie travaille depuis longtemps sur la mesure hybride. En 2007, Mediametrie//NetRatings intégrait déjà à son médiaplanning des données site-centric telles que les pages vues. Nous avançons dans ce domaine en associant étroitement les acteurs du marché. Notre livre blanc a pour but de susciter la réflexion sur le sujet, et d'aider les acteurs du marché dans leurs choix d'outils de mesure.

Quelle est la valeur ajoutée de la mesure hybride par rapport aux mesures classiques ?

La mise en commun de la mesure site-centric et de la mesure user-centric donne une vision complète et exhaustive de l'audience d'un site. Elle permet notamment de mieux mesurer la consommation de contenus vidéo. Les vidéos vues en catch-up TV par exemple sont souvent cryptées. Elles ne peuvent donc pas être détectées par une mesure panel. Mais la mesure site-centric permet, grâce aux tags, de remonter les statistiques relatives à ces vidéos. Nous sommes ainsi arrivés à une mesure très fine de la vidéo en ligne qui prend notamment en compte le temps passé.

Qu'attendent les annonceurs d'une mesure hybride?

Ils veulent une plus grande lisibilité qui découlera de la réconciliation de ces deux mesures, mais aussi une plus grande richesse et finesse d'analyse. Par essence cette approche se doit d'être globale et de prendre en compte tous les acteurs du marché.

Dans la mesure site-centric, l'effacement des cookies amène à compter plusieurs visiteurs quand il n'y en a qu'un. Médiamétrie peut-il contourner cette difficulté ?

En effet 30 % des internautes effacent leurs cookies, ce qui induit par ailleurs que la moitié des cookies sont effacés au cours d'un mois en intégrant la fréquence des visites. C'est pourquoi les outils site-centric ne parlent jamais de visiteurs uniques mais de visiteurs cookies ou navigateurs. Par ailleurs la mesure site-centric n'identifie pas s'il y a une ou plusieurs personnes derrière une adresse IP. Le panel intervient donc pour affiner les données site-centric en fournissant des informations sur le profil des internautes. De même, les robots des moteurs de recherche peuvent gonfler artificiellement les statistiques de fréquentation de certains sites si ces flux ne sont pas correctement filtrés. La mesure d'audience Internet par panel ne prend pas en compte ces résultats. C'est bien la complémentarité entre les mesures user-centric et site-centric qui permet d'enrichir les résultats d'audience. D'où l'intérêt d'une mesure hybride.

Votre panel ne dispose pas des mêmes conventions de mesure que les outils site centric...

Notre but est de faire converger les conventions entre les différents types d'acteurs de la mesure d'audience ou de fréquentation Internet afin d'avoir une vision d'ensemble du marché. C'est la condition sine qua non d'une mesure hybride totale. Les panels d'audience Internet en France ne prennent pas en compte l'auto-refresh (rafraîchissement d'une page poussé par le site lui-même, ndlr.), contrairement aux solutions site-centric. Autre différence : pour calculer le temps passé sur un site, le site-centric se base sur l'écart qui sépare deux appels de pages, tandis que le panel Médiamétrie//NetRatings compte le temps passé à partir du moment où le site visité est au premier plan sur l'écran. Notre livre blanc a pour objectif d'être une base pour harmoniser ces règles.

Les conventions ont-elles été unifiées dans d'autres pays ?

Depuis plus de deux ans, Médiamétrie produit une mesure d'audience hybride globale pour le compte de Nielsen et Audiweb en Italie. Le projet s'est appuyé sur le fait que Nielsen mesure une grande partie des sites Internet en Italie avec son outil site-centric. Il n'y a pas de telle unité de marché en France, donc l'évolution prend plus de temps.  

L'Association pour le contrôle de la diffusion des médias (OJD) certifie les données fournies par des mesureurs tels que Médiamétrie, Comscore, mais aussi Weborama, ou Xiti. Pourquoi choisirait-t-elle de s'aligner sur de nouvelles conventions ?

Comme nous, l'OJD pense que la mesure hybride s'inscrit dans le sens de l'histoire. Nous sommes en discussion avancée avec l'OJD pour travailler sur ce projet ensemble. A nouveau, Médiamétrie fait figure de référence en France. Par ailleurs nous disposons d'une base extrêmement riche et d'une expertise forte dans le domaine des médias.  

Comscore a sorti un livre blanc sur le sujet quelque mois avant vous. Votre concurrent a-t-il une longueur d'avance sur ce sujet ?

Ils travaillent comme nous sur le sujet mais ce n'est pas à moi de juger cela. De ce que j'ai retenu de leur livre blanc, ils sont davantage portés sur une approche construite à partir de la mesure site-centric, ce qui signifie que c'est une autre famille de mesure hybride. Médiamétrie est clairement une référence en matière de mesure hybride. Les premiers tests datent de 2004 avec le rapprochement des statistiques de Mediametrie//Netratings et de Médiamétrie-eStat ou encore la première mesure d'effacement de cookies. Aujourd'hui nous produisons depuis plus de deux ans pour l'Italie une mesure totalement hybride, ce qui fait de nous une entreprise à la pointe de ce sujet.

Julien Rosanvallon est directeur de la filiale Médiamétrie//Netratings. Auparavant, il était responsable des Etudes au sein de Wanadoo Régie (Orange). Il est également membre de l'Interactive Advertising Bureau (IAB), du Groupement des Editeurs de Services en Ligne (Geste), et de l'Association pour le Commerce et les Services en Ligne (Acsel).