Olivier Gouteix (Capgemini) : "L'iPhone 3G fera gagner à Apple des parts sur le marché des entreprises"

Stratégie de distribution, amélioration du terminal, effet sur les ventes, évolution du modèle économique : Olivier Gouteix, consultant chez Capgemini, analyse le lancement du nouvel iPhone 3G par Apple.

 

L'annonce du lancement de l'iPhone 3G en juillet prochain sera l'occasion pour Apple de revoir sa stratégie de distribution. Qu'est-ce qui a poussé le groupe de Steve Job à revoir son modèle ?

Le modèle initial de partenariat avec les opérateurs, qui ne subventionnaient pas le terminal mais reversaient une forte commission sur les forfaits, est en effet en voie d'abandon, pour revenir au modèle habituel. En dépit de la forte attractivité du produit, son prix était trop en décalage, trop haut de gamme, par rapport aux terminaux similaires du marché. Ce pari de l'attractivité du produit fait par Apple n'a pas fonctionné, les ventes n'ont pas atteint les résultats escomptés. Apple fait donc marche arrière et autorise désormais les opérateurs à subventionner l'iPhone. En conséquence, le prix de vente du terminal va baisser fortement. L'iPhone 3G 8Go sera ainsi lancé par AT&T à 199 dollars aux Etats-Unis, contre 399 dollars pour la version actuelle sans subvention Pour la France, où l'iPhone 3G sera lancé le 17 juillet, on peut s'attendre à un prix de vente de l'ordre de 150 à 200 euros. En revanche, on peut s'attendre à une hausse significative des forfaits mensuels associés à l'iPhone. Ainsi, AT&T a d'ores et déjà annoncé une hausse de 10 dollars de son forfait mensuel iPhone.

Le principe d'exclusivité avec les opérateurs est par ailleurs aussi en voie d'abandon. Par exemple en Italie et au Royaume-Uni, deux opérateurs le distribueront. Pour la France, rien ne change puisque l'exclusivité d'Orange sera maintenue.

A quel succès s'attendre pour ce nouvel iPhone ? Va-t-il dynamiser les ventes d'Apple ?

Oui, c'est certain. Le nouvel iPhone 3G s'inscrit en forte continuité avec la version initiale qui a créé une petite révolution dans l'industrie du mobile et qui a fait son succès. Pour autant, ce nouveau modèle comprend des évolutions attendues par le marché, qui corrigent les principales limites constatées sur l'ancienne version, notamment la connectivité 3G+ (HSDPA) qui devrait permettre de tirer pleinement parti des très bonnes capacités de navigation Web. En outre, l'ajustement du niveau de prix du terminal iPhone le ramène à un niveau très compétitif par rapport aux autres terminaux haut de gamme et smartphones du marché, ce qui élargit la cible vers le bas. Enfin, l'amélioration du produit avec la 3G+, le GPS et la messagerie d'entreprises, le positionne beaucoup plus clairement sur les besoins professionnels : on peut s'attendre à un gain de part de marché sur les smartphones BlackBerry de RIM et Windows Mobile.

Ce nouvel iPhone va-t-il contribuer fortement aux revenus d'Apple ?

A court terme, l'iPhone continuera à s'adresser à une cible limitée, loin d'une diffusion de masse. Par exemple, en France, le segment des terminaux vendus plus de 150 euros ne représente que de l'ordre de 5 % des volumes. Cependant, cette version n'étant qu'une première étape dans l'évolution de l'iPhone, on peut anticiper qu'à l'horizon de un ou deux ans, Apple lancera des produits adressant des cibles de plus en plus grand public, moins sophistiqués et avec une palette de niveau de prix plus basse, à l'instar des versions "nano" et "shuffle" de l'iPod.

A moyen terme, la vraie nouveauté réside en fait dans l'ouverture aux développements d'applications, avec le lancement prochain d'un "App Store" qui proposera le téléchargement (gratuit ou payant) d'applications de toutes sortes. Comme ses concurrents Windows Mobile, Symbian et bientôt Google Android, Apple estime que le succès sur ce segment des smartphones dépendra beaucoup de la capacité à attirer les meilleures applications.

Enfin, à plus long terme, Apple pourrait bien bénéficier d'un effet "halo" sur les ventes de ses autres lignes de produits, les ordinateurs Mac notamment, en particulier sur le marché des entreprises sur lequel Apple est aujourd'hui globalement peu présent et pour lequel l'iPhone apparaît comme un vecteur de pénétration.