Alain Lévy (Weborama) "Nous voulons racheter l'activité d'ad-serving de Sizmek pour proposer une alternative indépendante au marché"

Le président de Weborama explique pourquoi il a décidé de surenchérir sur l'offre d'Amazon sur l'activité d'ad-serving et de DCO de Sizmek, numéro 2 mondial du secteur.

JDN. Vous annoncez surenchérir sur l'offre de 30 millions de dollars formulée par Amazon pour racheter l'activité d'ad-serving et de DCO de Sizmek. Pourquoi une telle décision ?

Alain Levy est le président de Weborama. © Weborama

Alain Lévy. Avant de se positionner officiellement, Weborama et sa maison-mère Ycor ont consacré ces deux derniers mois à l'étude de ce projet d'acquisition. Nous voulons construire l'alternative indépendante dont le secteur publicitaire a plus que jamais besoin. L'ad-server, même si c'est une technologie qui n'est plus toute jeune, reste encore la colonne vertébrale du marché de la publicité digitale, parce qu'il permet aux annonceurs et aux agences de gérer l'allocation de leurs budgets médias mais aussi d'en mesurer la performance. Il est donc important que ces derniers puissent choisir une alternative indépendante. Ce que le rachat de Sizmek par Amazon ne permettrait plus.

Ce serait tout de même très inquiétant que Sizmek, qui était avec Google le seul acteur global du marché de l'ad-serving [l'activité de Sizmek sur ce marché pesait près de 80 millions de dollars en 2018 selon Business Insider, ndlr], rejoigne les rangs d'un walled garden. L'opération assoirait un peu plus la domination de ces plateformes qui captent déjà l'essentiel des investissements pubs.

Amazon a pourtant officialisé le deal le 31 mai. Rien n'est encore fait ?

L'acquisition d'actifs en provenance d'une société qui, comme Sizmek l'a fait, s'est placée sous la protection du chapitre 11, est une opération aussi complexe que réglementée. La première étape, dite "filing", voit une société être désignée par les créanciers comme étant celle avec laquelle il faut traiter. C'est ce qui s'est passé avec Amazon. Mais le deal n'est pas finalisé tant que le juge en charge du dossier ne l'a pas validé. Chose qui n'a pas été faite en ce qui concerne le rachat des technologies d'adserving et de DCO de Sizmek. Amazon utilise d'ailleurs la formule suivante, "une fois que le deal sera finalisé", dans le billet qui annonce l'opération. C'est bien la preuve que rien n'est encore fait. Nous devrions être fixés dans les jours, voire les semaines qui viennent.

L'acquisition serait réalisée par Ycor, maison-mère de Weborama, et pas par ce dernier. Pourquoi ?

C'est d'abord une question de surface financière. Ycor a la trésorerie pour réaliser cette opération. Mais c'est aussi une question d'exécution. Nous rachèterions des actifs, non pas une entreprise. C'est donc une opération très complexe, qui nécessite beaucoup de travail pour réaliser au mieux l'intégration… avant d'imaginer les synergies possibles avec l'activité de Weborama.

Weborama dispose déjà de son propre ad-server. Une fusion, pour réunir le meilleur des deux technologies, peut-elle être envisagée ? Ou préféreriez-vous garder les deux ad-servers séparés ?

C'est une vraie question mais elle est prématurée. Il est évident qu'il y a des complémentarités fortes en matière d'adserving, DCO et DMP entre Weborama et Sizmek et qu'un rapprochement générerait des économies. Mais on ne veut pas mettre la charrue avant les bœufs. Et puis avant de réfléchir à une éventuelle intégration technologique, je pense qu'il sera plus simple de mettre en place des partenariats commerciaux entre les deux entités.

Diplômé du MIT, Alain Lévy fonde en 1999 l'incubateur Startup Avenue. Cet incubateur prend notamment une participation dans le site Weborama en 2000. Pendant deux années, de 2001 à 2003, il est consultant pour de grands groupes tels que Lagardère, Orange, Publicis ou TF1. En 2005, il devient actionnaire majoritaire de Weborama et modifie en profondeur le business model de ce spécialiste de l'analyse sur le Net. Un an plus tard, Weborama s'introduit en bourse