Numericable condamné à une amende de 150 000 euros pour tromperie et vente forcée

Après plus d'un an de procédure entre le câblo-opérateur et ses clients déçus, le jugement symbolise pour Numericable "une page qui se tourne". Mais d'autres plaintes se profilent à l'horizon du FAI.

Le tribunal correctionnel de Meaux (Seine-et-Marne) a condamné Numericable (ex Noos-Numericable), lundi 15 septembre, à 150 000 euros d'amende pour publicité mensongère, tromperie, vente forcée et diverses entorses aux règles de la vente à domicile et à distance. Deux de ses ex-dirigeants écopent également d'amendes : 25 000 euros pour Philippe Besnier, président de 2006 à mi-2008, condamné pour tromperie, vente forcée et diverses entorses aux règles de la vente à domicile et à distance, et 5 000 euros pour Jack Mikaloff, directeur général délégué de Noos-UPC France en 2005, condamné pour fausse publicité.

L'affaire a démarré il y plus d'un an et demi, quand l'association "Les déçus du câble", regroupant à l'époque quelque 400 clients mécontents de Noos-Numericable, a déposé le 2 février 2007 une plainte contre le câblo-opérateur à la gendarmerie de Vitré (en Ille-et-Vilaine, ville où est née l'association) pour "publicité mensongère, abus de bien sociaux et tromperie". En parallèle, l'association "Les déçus du câble" a déposé plus de 200 plaintes auprès du parquet de Paris et engagé une procédure auprès de la Direction départementale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF).

Le procureur réclamait une amende de 180.000 euros

La plainte a été jugée recevable par le parquet de Paris qui l'a alors placé sous la compétence juridictionnelle du parquet de Meaux. En parallèle, la DGCCRF a décidé, suite au grand nombre de plaintes reçues, de placer Noos-Numericable sous surveillance, de février à juillet 2007. Dans le cadre de l'enquête conduite en 2007 par le parquet de Meaux, plus de soixante victimes ont été identifiées, et une quarantaine se sont constituées parties civiles, réclamant des dommages et intérêts.

Le 26 mai dernier, lors de la plaidoirie devant le tribunal correctionnel de Meaux, la substitut du procureur Emmanuelle Wachenheim avait requis 180.000 euros contre le Numericable en évoquant le "parcours du combattant" de ses clients, laissés parfois "des mois sans service" et confrontés à des "factures plus élevées qu'attendu". Elle avait relevé aussi des "pratiques commerciales honteuses", rapporte une dépêche de l'AFP.

Après quatre mois de délibérations, les magistrats de Meaux ont donc condamné Numericable à 150 000 euros d'amende, pour vente forcée, publicité pouvant induire en erreur sur "le prix des prestations téléphoniques, le prix et la composition de la TV numérique et la portée des engagements" proposés entre 2005 et 2007, selon l'AFP qui s'est procuré le jugement, ainsi que pour absence de contrat et de formulaires de rétractation lors des démarchages, défaut d'information sur le prix, et confirmation tardive de contrat en vente à distance.

Seuls 18 plaignants sur la soixantaine constituée en partie civile vont être dédommagés

Sur la soixantaine de plaignants constitués en partie civile, seuls 18 vont recevoir des dédommagements, de 50 à 1 000 euros pour les particuliers, pour un montant moyen de 500 euros par plaignant, a détaillé au "Journal du Net" Numericable. Un syndicat de copropriétaires du Val-de-Marne, également constitué en partie civile, recevra pour sa part 5 000 euros de dédommagements, l'association de consommateurs CNL (Confédération nationale du logement) 25 000 euros.

L'association "Les déçus du câble", ne remplissant pas les critères pour se constituer partie civile, a été déboutée de sa plainte et donc ne recevra pas de dédommagements. "Le but pour nous n'était pas l'argent mais de faire condamner pénalement Numericable. Nous sommes donc très satisfaits du jugement", explique Marcel Lacour, président de l'association "Les déçus du câble" qui rappelle que le jugement du tribunal correctionnel de Meaux est l'aboutissement d'une démarche engagé par son association il y a près de deux ans.

"Les déçus du câble" n'entendent d'ailleurs pas s'arrêter là. "Le combat doit continuer, il existe encore aujourd'hui de nombreuses irrégularités dans la démarche commerciale de Numericable", indique Marcel Lacour. L'association va déposer prochainement une nouvelle plainte au parquet concernant Instrum Justicia, la société de recouvrement du câblo-opérateur qui, selon le président des "Déçus du câble", harcèle les abonnés sur leurs téléphones portables à des heures indues.

De son côté, Numericable, qui tente de faire peau neuve depuis l'été 2007 avec une nouvelle direction et plus récemment à cette rentrée 2008 avec son nouveau PDG, Pierre danon (lire l'article Numericable s'affirme comme le premier FAI fibre optique en France du 12/09/2008), estime qu'avec cette décision, "la page de cette période se tourne". "Numericable est bien décidé à mettre la relation client au cœur de sa stratégie. Les problèmes commerciaux en cause dans cette affaire dataient d'il y a deux ans. Cette décision relève donc de faits passés et de défauts d'organisation aujourd'hui surmontés", explique le câblo-opérateur dans un communiqué daté du 15 septembre. Ce qui n'empêche pas Numericable " d'assumer l'héritage de Noos " et de présenter à nouveau "ses excuses aux clients qui ont eu à subir des désagréments au moment de la fusion".

Contacté par le JDN, Numericable déclare ne pas avoir pris de décision à ce jour concernant la possibilité de faire appel de la décision de justice du tribunal correctionnel de Meaux.