L’employabilité, nouvelle arme anti-chômage
L’employabilité des salariés permet aux entreprises de rester compétitives mais également aux salariés de conserver une mobilité professionnelle suffisante pour ne pas « tomber » au chômage.
L’une
des responsabilités des entreprises réside dans leur capacité à créer
des emplois. La France connaît malheureusement un taux de chômage qui se situe à un niveau beaucoup trop important. Or, à l’inverse de l’idée trop
répandue selon laquelle contre le chômage tout aurait été tenté, nous
avançons à l’occasion de cette campagne présidentielle l’idée de
replacer au cœur de nos réflexions et de nos actions
le concept souvent cité mais souvent mal compris de l’employabilité.
Ce
mot est défini ainsi dans le Petit Robert : « capacité individuelle à
acquérir et à maintenir les compétences nécessaires pour trouver ou
conserver un emploi ». L’employabilité des salariés
permet ainsi aux entreprises de rester compétitives mais également aux
salariés de conserver une mobilité professionnelle suffisante pour ne
pas « tomber » au chômage.
Développer
l’employabilité des salariés génère une diminution des dépenses
d’assurance chômage si l’on considère que plus les salariés sont
employables,
moins ils risquent d’être au chômage. Et partant, on doit même pouvoir
anticiper une amélioration des comptes sociaux (et de l’Unedic en
particulier). A terme, une baisse des cotisations chômage pourrait être
envisagée si le taux de chômage était durablement
bas. Ainsi, cela participerait au renforcement de la compétitivité des
entreprises. C’est un tel processus vertueux que nous proposons de
mettre en place.
Pour
développer l’employabilité des salariés il est nécessaire de multiplier
les formations qualifiantes. Et de ne pas se contenter de formations
d’adaptation aux postes de travail. Le système de formation nécessite
donc une approche profondément repensée. Notre système et notre offre de
formation se sont constitués à partir d’un concept des années 1970 :
l’obligation imposée aux entreprises de payer
une taxe qui peut, soit être versée à un organisme collecteur, soit
être utilisée directement en formation conduite par l’entreprise
elle-même.
Les années passant, notre système s’est hyperbureaucratisé :
déclarations fiscales multiples, critères incertains
d’éligibilité des actions de formations, freins – pour ne pas dire
opposition – à l’utilisation des technologies numériques. Le Medef
préconise de supprimer l’obligation fiscale faite aux entreprises de
consacrer 0,9 %[1]
de leur masse salariale à la formation professionnelle. En supprimant
cette contrainte fiscale, les entreprises appréhenderaient la formation
pour ce qu’elle est vraiment : un investissement immatériel plutôt
qu’une charge avec déductibilité immédiate. Nous
demandons pour cet investissement immatériel une durée d’amortissement
sur trois années.
Bien
sûr, le plan de formation restera obligatoire mais son exécution se
déroulera dans le cadre de cet investissement immatériel amortissable.
De surcroît, le Medef suggère de regrouper dans un dispositif unique le
DIF et le CIF sous le nom d’« Accès individuel à l’acquisition de
compétences (AIAC) ». L’employeur disposerait d’un « droit de tirage »
sur l’AIAC pour réaliser des formations de développement
des compétences (différentes des formations d’adaptation, d'évolution
ou de maintien dans l’emploi qui constituent actuellement l’essentiel
des formations effectuées dans le cadre du plan) et des formations
pendant les périodes de chômage partiel.
De son côté,
le salarié aurait également un « droit de tirage » : en période
d’activité professionnelle ou de recherche d’emploi pour effectuer des
formations d’acquisition de compétences répondant à des besoins
identifiés des entreprises destinées à maintenir ou améliorer
son employabilité.
Une
fois libérées des contraintes administratives liées à l’obligation
fiscale, les entreprises pourront se concentrer sur la finalité de la
formation
professionnelle : l’amélioration de l’employabilité des salariés. Dès
lors, plutôt que de raisonner en termes d’heures ou de dépenses de
formation, on pourra sérieusement aborder la question de sa qualité, de
son efficacité et de son impact.
Le
système de formation doit également permettre de réintégrer le plus
rapidement possible les demandeurs d’emploi. C’est un enjeu majeur pour
accélérer
leur retour à l’emploi. Certains ont besoin d’un accompagnement lourd
et éventuellement de formations longues. Les formations de groupe
financées par Pôle emploi, l’État et les Conseils régionaux,
correspondant à la commande publique et dispensées par des
opérateurs publics et privés sont les mieux adaptées pour répondre à
cette problématique.
D’autres ont simplement besoin d’une formation
courte et individualisée permettant un retour rapide à un emploi :
l’AIAC pourrait alors être mobilisé pour faciliter le
développement de l’employabilité de ces demandeurs d’emploi et ainsi
favoriser leur retour à l’emploi grâce à l’articulation entre les
actuels dispositifs de POE (Préparation opérationnelle à l’emploi) et de
formation dans le cadre du contrat de sécurisation
professionnelle.
Poursuivant
la logique du lien entre l’accroissement de l’employabilité des
salariés et la baisse du chômage, nous proposons de moduler les taux
de cotisations d’assurance chômage des entreprises en fonction de
l’importance de leurs investissements immatériel dans l’employabilité de
leurs salariés. Pour ce faire, plusieurs critères pourraient servir à
les évaluer : durée des formations qualifiantes,
nombre de salariés couverts, respect de l’égalité hommes-femmes dans
l’accès à la formation, actions mises en œuvre pour insérer les salariés
en difficultés.
Toutefois,
nous considérons que ce dispositif ne doit s’appliquer qu’aux
entreprises qui dépassent le seuil de 250 salariés. Les plus petites
entreprises
se verraient appliquer un taux de cotisation minimal. En outre, parce
qu’elles forment en permanence leurs collaborateurs sans que cela entre
dans le cadre du plan de formation, nous demandons que soit reconnue et
valorisée pour les TPE et les PME la formation
informelle. Elle peut revêtir des aspects très variés : le temps et les
moyens consacrés à intégrer et à accompagner un nouveau salarié, à
transmettre le savoir et le savoir-faire, à tutorer un jeune, à
accompagner une mobilité interne, etc. Le temps et les
coûts directs ainsi mobilisés par l’entreprise devraient pouvoir être
valorisés dans l’effort global de formation des TPE et des PME.
Ce
dispositif aurait en outre pour vertu d’éviter une mutualisation
complète du risque entre les entreprises vertueuses et les autres.
Nous
pensons qu’une réforme de la formation professionnelle mettant en cœur
le développement de l’employabilité des salariés sera extrêmement
bénéfique
pour la compétitivité des entreprises françaises et pour lutter contre
le chômage.
C’est un grand projet que nous défendrons pendant les cinq
années qui viennent.