Didier Ardouin (Crédit Mutuel Arkéa) "Nous lancerons des pop-up stores et des boutiques Max en 2018"

Le Crédit Mutuel Arkéa lance sur iOS et Android un assistant personnel créé par une start-up interne. Le directeur général de cette dernière, Didier Ardouin, dresse sa feuille de route.

JDN. L'application mobile Max que vous lancez ce 5 septembre n'est pas réservée aux client de Crédit Mutuel Arkéa. Que propose-t-elle ?

Didier Ardouin, directeur général de Max. © Simon Cohen

Didier Ardouin. De l'agrégation, mais pas seulement de l'agrégation de comptes. Nous voulons agréger un maximum de données du client. L'idée est de rassembler au sein de Max tout ce dont le client a besoin au quotidien. Les utilisateurs retrouveront dans cet espace toutes leurs factures, d'EDF à Orange en passant par la Fnac et Amazon. Cette matière est en lien avec notre deuxième fonctionnalité : la préconisation. Grâce à toutes ces données, Max pourra donner des conseils à valeur ajoutée à l'utilisateur. L'idée n'est pas de faire des préconisations tous les jours. Nous tenons avant tout à donner des conseils pertinents. Nous ne préconiserons pas forcément les produits Arkéa sauf s'ils sont les meilleurs sur le marché et qu'ils sont adaptés au client. Enfin, nous mettons en place un service de conciergerie disponible par chat. Nous avons choisi de collaborer avec un groupe mondial de renom dont nous ne communiquons pas l'identité. Plus d'une centaine de concierges dans le monde travailleront pour nous 7/7j et 24/24h. C'est un service que nous payons pour le client. Nous ne percevons aucune commission sur les services délivrés.

Lors de l'annonce de la création de Max en mai dernier vous aviez mentionné un compte de paiement. Ce n'est plus d'actualité ?

Nous attendons l'agrément de l'ACPR (l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, ndlr) pour être établissement de paiement. Sans cela, certains produits ne peuvent pas être lancés, comme le compte de paiement. Avant la fin de l'année, nous serons en mesure de proposer ce compte. Nous proposerons également une "carte agrégatrice". Dans l'application, les utilisateurs pourront enregistrer toutes leurs cartes bancaires (Société générale, BNP Paribas…) et utiliser uniquement la carte Max. Il suffit de choisir la carte avec laquelle vous souhaitez payer dans l'application. Nous ne prenons aucune commission sur les retraits et les paiements, qu'ils soient effectués en Europe ou à l'international. Les seuls frais qui pourraient survenir sont les frais d'incident, de rejet et d'utilisation abusive.

Quel est donc votre modèle économique ?

Je le compare à la médecine chinoise. Nous sommes rémunérés uniquement si le client se porte bien. C'est-à-dire s'il a reçu de bons conseils et qu'il a acheté et consommé des produits dont il est satisfait. C'est une sorte de prime à l'excellence. Nous nous engageons également à ne pas vendre les données de nos clients. Finalement, les seuls revenus que nous percevrons sont les commissions des fournisseurs des produits et services que nous allons préconiser à bon escient au client.

Qui sont ces fournisseurs ?

"Les seuls revenus que nous percevrons sont les commissions sur les produits et services que nous allons préconiser "

Il y a deux niveaux de fournisseurs. Tout d'abord, ceux qui ne sont pas directement liés au client, c'est-à-dire ceux qui enrichissent l'offre. Par exemple, il y a Fluo, une start-up dont Crédit Mutuel Arkéa est actionnaire (elle optimise les couvertures d'assurance, ndlr). Elle ne proposera pas directement l'assurance mais le produit d'un assureur. Ensuite, il y a une multitude de fournisseurs issus de la banque et l'assurance mais aussi d'autre secteurs. Par exemple, une marque de déménageur nous a proposé de mettre à disposition de nos clients ses meilleures grilles de tarifs.

Dans le cas de produits bancaires, Max pourra donc préconiser l'offre d'une banque concurrente. N'est-ce pas se tirer une balle dans le pied ?

Quand j'ai présenté ce projet au conseil d'administration du groupe qui est composé quasi exclusivement des représentants des fédérations de Crédit Mutuel, ce n'était pas simple. Finalement, ils ont accepté. C'est toute la beauté du groupe Arkéa qui a une stratégie tournée vers l'extérieur. Nous partons du principe que si on ne fait pas ce genre de solution, des concurrents le feront à notre place. En plus, proposer des produits concurrents nous pousse nous-même à concevoir des produits encore meilleurs. C'est une saine émulation.

Vous allez donc signer des partenariats avec d'autres banques françaises…

Aujourd'hui, le modèle est encore nouveau. Quand une filiale du groupe Crédit Mutuel Arkéa va voir le Crédit Agricole en lui disant qu'elle va proposer ses produits, au premier abord, il se demande où est le loup ! Mais les banques sont très intéressées par notre initiative. Aujourd'hui, nous sommes en discussion avec plusieurs établissements bancaires français.

Allez-vous comme le Crédit Mutuel utiliser des chatbots ?

"Nous ouvrirons un plateau de chat à Bordeaux d'ici la fin de l'année"

Il n'y a  pas de chatbot chez nous. Nous en mettrons peut-être en place pour répondre à certaines demandes. Aujourd'hui, derrière chaque demande, il y a de l'humain. Des conseillers formés répondent aux questions relatives au crédit, à l'épargne... Nous sommes en train de déployer des plateaux de chat. Nous en avons un à Rennes, un autre ouvrira à Bordeaux d'ici la fin de l'année et un troisième dans l'Est de la France début 2018. Nous les ferons grossir de manière harmonieuse. Il y a aura toujours le même effectif sur chaque plateau, et cet effectif sera proportionnel au nombre de clients. Si demain il en faut 5 000 pour répondre aux plusieurs centaines de milliers de clients, alors on en aura 5 000.

Pourquoi privilégier l'humain au digital ?

C'est la volonté du directeur général du groupe, Ronan Le Moal. D'ailleurs, nous allons compléter tout ce dispositif avec des pop-up stores dès 2018. Nos trois directeurs de région auront en charge d'animer ces pop-up stores avec les équipes de chat. La même année, nous ouvrirons sans doute des boutiques fixes dans des grandes villes. Il n'est pas exclu qu'on en retrouve assez vite à Paris et Lyon. Ces boutiques ne seront pas des agences de 300 m² mais des points de contact. Je ne peux pas encore donner trop de détails. Cependant, je peux déjà vous dire que les clients pourront rencontrer des conseillers Max. Par exemple, si un chatteur suggère un produit d'assurance-vie, il est possible que le chat ne suffise pas à lui faire prendre une décision.

Comment être sûr que les chatteurs Max donnent le bon conseil sachant qu'ils font partie du groupe Crédit Mutuel Arkéa ?

C'est le client qui sera le juge de paix. Nous n'aurons pas l'occasion de faire deux fois bonne impression. Aujourd'hui, le client est averti. S'il y a tromperie, cela ne durera pas longtemps. En plus, nous n'avons pas encore eu le temps de passer des accords avec tous les fournisseurs, ce qui veut dire que demain on va proposer l'assurance-vie ou le crédit habitat d'un établissement avec qui on n'a pas encore passé de convention. Cela ne nous empêchera de le mettre en relation avec nos utilisateurs. C'est de de cette façon qu'on lui montrera qu'on est capable de lui apporter des clients.