4.
Conclusion provisoire
Le débat est loin d'être clos, car nombreux ont été les
organismes publics ou privés à s'exprimer sur le sujet.
Ainsi dans son avis n°02-1090
du 2 décembre 2002, l'Autorité de régulation des télécommunications
a fait savoir quels étaient ses points d'accord et de
désaccord sur le texte proposé. On retiendra des points
de désaccords celui relatif à la définition de la "communication
publique en ligne" et donc du périmètre de la loi. L'ART
s'est également exprimée sur les risques liés au manque
de précision des dispositions relatives à la responsabilité
des prestataires d'hébergement et a fait connaître ses
doutes sur la nécessité de distinguer l'accusé de réception
de la commande comme une étape autonome de l'acte d'achat
en ligne.
De
son coté, le Conseil supérieur de l'audiovisuel a émis
un avis en date du 17 décembre 2002 exprimant en premier
lieu ses doutes quant au projet lui-même qui d'après
le Conseil "se limite à des aménagements partiels et
qui laisse en l'état d'importantes disparités de régimes
juridiques entre des services de même nature" et auquel
il aurait préféré un "aménagement plus radical de la
législation" afin de limiter les effets pervers de la
réglementation qui actuellement est éclatée par supports.
A
l'inverse de l'ART, le CSA pour sa part, juge la définition
de la "communication publique en ligne" comme "satisfaisante"
dans son principe, dans la mesure où elle ne remet pas
en cause le rattachement au droit de la communication
audiovisuelle de services tels que les sites Web. Le
CSA regrette cependant que la définition ne permette
pas de traiter le problème de la diffusion sur Internet
de programmes audiovisuels et radiophoniques créant
une distorsion entre les différents acteurs selon le
support utilisé.
Le
CSA, dans son avis, critique ouvertement le manque de
régulation de l'Internet, notamment pour certains éléments
qu'elle considère comme relevant de sa seule prérogative
(protection des mineurs
) et propose, à coté de la co-régulation
telle que prévue dans la directive du 8 juin 2000 de
se voir confier une mission pouvant aller de "l'encadrement
de l'autorégulation à la régulation directe, notamment
sous la forme de recommandations". On retiendra cependant
qu'alors même que le CSA prétendrait au titre de régulateur
de l'Internet, il ne s'exprime finalement que sur l'article
10 de la loi !
Les
organismes professionnels à l'instar de l'ACSEL semblent
plus critiques à l'attention du projet en considérant
tout d'abord que la définition de "communication audiovisuelle"
utilisée dans la LEN est "tout à fait inappropriée",
ce terme étant marqué radio et télévision ; critique
quant au rôle d'appréciation conféré aux intermédiaires
techniques en lieu et place du juge ; critique encore
quant à la transposition de la directive du 8 juin 2000
sur la partie relative à la "publicité".
Enfin,
le gouvernement lui-même a indiqué qu'il n'était pas
dans son intention de régler avec la LEN l'ensemble
des problématiques liées à l'Internet et que ce projet
ne serait qu'une étape dans le processus d'adaptation
des règles de droit aux impératifs du numérique.
Il
y a donc fort à parier que d'autres textes suivront.
L'un d'eux est déjà identifié autour de la "république
numérique" qui permettrait un développement la e-administration.
Les autres seront sans doute fonction des impératifs
identifiés par le gouvernement mais l'on peut cependant
penser à une modification du code de la propriété intellectuelle
(qui s'impose quoi qu'il en soit du fait de l'adoption
de la directive droits d'auteurs et droits voisins dans
la société de l'information) ; de la loi informatique
et libertés (modification déjà prévue mais qui risque
d'être à nouveau impactée par l'adoption de la directive
données personnelles et communication électronique),
adaptation de la loi Evin, de la loi Sapin, de la loi
Toubon ou encore du Code pénal notamment pour les contenus
à destination des mineurs... vous l'aurez constaté la
liste serait trop longue à dresser
N'oublions
pas non plus la révolution récente du cadre européen
des télécommunications par l'adoption du "paquet télécom",
ensemble de directives relatives à ce que l'on désigne
maintenant comme la "communication électronique", mariage
des télécoms et de l'Internet et qui aura, à n'en pas
douter, lors de sa transposition en droit interne prévue
pour l'année 2003, un impact important sur le "droit
de l'Internet" aujourd'hui en mouvement.
[eric-barbry@alain-bensoussan.com]
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