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10/11/2001

Cyrano joue de malchance dans un contexte difficile

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La nouvelle tombait mercredi en provenance de l'AFP : l'éditeur français Cyrano, spécialisé dans les tests de performance applicative avec pour principaux concurrents Mercury, BMC et Rational, avait annoncé la veille "qu'il était contraint de se mettre en liquidation" selon la dépêche. Lundi 15 octobre, le tribunal de commerce de Paris statuera sur le sort de l'entreprise et de ses salariés. En France, la totalité de l'effectif doit être licencié. Mais des incertitudes subsistent encore quant au devenir des deux filiales britannique et américaine, ainsi qu'à propos de la part de 11 % que Cyrano détient dans le capital de l'éditeur américain d'outils de sécurité Vigilante.

"Cette liquidation intervient pour trois raisons", déclare Robert Hermans, son président-directeur général encore en fonctions jusqu'à lundi prochain. "La première est que nous n'avons pas pu céder nos actifs non stratégiques, en particulier notre participation dans Vigilante ainsi que notre activité WinCap pour rembourser nos dettes suite à notre plan social. La deuxième est que nous attendions des commandes de la part d'entreprises et l'annonce de notre cessation de paiement a rendu celles-ci frileuses. La troisième, enfin, est due aux attentats du 11 septembre qui ont décalé les commandes attendues auprès de notre filiale américaine. Nous avions tablé sur 450 000 dollars de chiffre d'affaires pour le mois dernier, qui n'ont pas été réalisés."

La descente aux enfers de l'éditeur Cyrano

Lors de son introduction sur le Nouveau Marché de la bourse de Paris en 1998, Cyrano était un éditeur tout à fait viable financièrement. Deux ans auparavant, le nom de la société avait été déterminé lors de la fusion entre l'anglais Performance Software positionné sur les tests au niveau de systèmes anciens, et le français IMM fondé en 1989, dont l'expertise portait sur les outils d'analyse de bases de données. Suite à l'obtention de fonds en bourse, l'éditeur s'engage dans l'acquisition de plusieurs sociétés technologiques, et attrappe peut-être plus tardivement que d'autres le métro des technologies web. Qu'à cela ne tienne, en 2000 le cap est passé, et l'offre s'étend des tests de performance d'architectures anciennes à l'audit de sécurité des sites web, en passant par la mesure de la performance des architectures Internet hors production.

Au cours de cette année 2000, alors que 9 salariés sur 10 disposent de stocks-options, la situation se complique. La perte de 12 millions de dollars sur l'exercice précédent n'a pas empêché l'éditeur de lancer sa spin-off PS@.Com en avril 2000, consacrée aux tests de vulnérabilité à distance. Devenue Networks Vigilance (article) en novembre 2000, la société ne sera pas longtemps filiale de Cyrano qui enregistre sur son exercice 2000-2001 une perte nette de plus de 8 millions d'euros pour un chiffre d'affaires de 6 millions d'euros. En avril 2001, l'entité est revendue à l'Américain Vigilante dans lequel Cyrano prend une participation de 11 %. Participation dont l'éditeur cherche à se débarrasser dès le mois suivant. En effet, sanctionné en mai par les marchés boursiers, il demande sa cessation de paiement et licencie 25 personnes sur un effectif total de 115 selon l'AFP.

La suite, ce sont les récents événements que connaît Cyrano, qui n'a peut-être plus que quelques jours d'existence devant lui. "Depuis quelques mois, les sociétés de capital-risque n'investissent plus et rendent même parfois leur argent", déplore Robert Hermans.

Des technologies pérennes, qui cherchent preneur
Contrairement au prestataire de mesure de la performance web Qualiope placé en redressement judiciaire cet été, la crise du monde des télécommunications et réseaux n'a pas grand chose à voir avec les déboires de Cyrano. Parmi ses 1 500 clients, l'éditeur compte huit des dix premières banques américaines, trois importants opérateurs et 15 agences gouvernementales. En septembre 2000, aussi, l'éditeur a pris le virage de l'Open Source. En moins de six mois, son outil de tests de charge d'architectures ebusiness OpenSTA (article) sous licence GnuGPL suscite environ 3 000 téléchargements. Et la société s'appuie fortement sur son réseau de 30 partenaires pour minimiser sa composante services qui représentait auparavant plus de 50 % de son chiffres d'affaires.

"Ces 15 derniers jours, nous avons signé une quinzaine d'alliances", affirme Robert Hermans. "Ces SSII vont nous reverser entre 10 et 15 % des sommes versées sur les contrats liés à nos technologies. Nous travaillons actuellement sur OpenSTA, mais tout s'arrêtera lundi si le liquidateur en décide ainsi." Dans cinq jours donc, le tribunal statuera sur le sort de Cyrano S.A. qui est propriétaire des technologies. La licence GnuGPL ne permet en effet pas la reprise des développements dans un contexte commercial. Quant au support, ce sera aux SSII de l'assurer. "Sans soutien, la technologie va mourir de facto", souligne Cyrano. "Nous avons sorti 17 versions du produit que 3 500 entreprises utilisent régulièrement." Les filiales américaine et britannique ne pourront non plus se porter acquéreur, car elles dépendent aussi d'une décision ultérieure du liquidateur.

Et pourtant, s'il meurt, "Cyrano meurt avec un passif faible", conclut le p-dg. "Nous avons 1 million d'euros de passif vis-à-vis de nos fournisseurs classiques, et 2 millions d'euros concernant
le passif super-privilégié, c'est à dire envers le fonds de garantie des salaires" suite au plan social. 3 millions d'euros, ce n'est pas si énorme pour certains éditeurs de logiciels. Des repreneurs potentiels se seraient fait connaître pour certaines partie de l'activité. D'autres sont également invités à intervenir lors de la séance de lundi prochain, afin de mettre la main sur des technologies, un porte-feuille de clients et un vivier de savoir-faire. Mais aussi, et surtout, de régler du moins en partie une situation cauchemardesque pour Cyrano, ses salariés et ses dirigeants.


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