Satya Nadella a réussi là où Steve Ballmer et Bill Gates ont échoué

Satya Nadella a réussi là où Steve Ballmer et Bill Gates ont échoué La gestion novatrice du PDG de Microsoft donne un nouveau souffle au groupe. Voilà deux ans presque jour pour jour qu'il a pris les rênes de la société. L'occasion de faire un bilan.

Jeudi 4 février, Satya Nadella, a fêté son deuxième anniversaire en tant que PDG de Microsoft. Ces deux années ont été riches en évènements. Microsoft a développé son activité de cloud computing, a sorti Windows 10 qui a été largement mieux apprécié que les Windows précédents, et a lancé des applications pour iPhone et Android. De manière générale, l'entreprise a fait en sorte d'être davantage appréciée.

Satya Nadella a été nommé Chief Operating Officer (CEO) de Microsoft en février 2014. © JDN

Mais la véritable victoire de Satya Nadella – le changement radical - a eu lieu au cœur même de la société. Sous la direction de Nadella, Microsoft est en train de prendre une seule et même direction pour la première fois depuis longtemps. "Il y a une chose que seul un PDG peut faire : c'est donner le ton et toucher l'ensemble des équipes", a affirmé Satya Nadella dans une interview donnée en fin d'année dernière.

Un seul Microsoft

L'ancien Microsoft était assez impitoyable. Sous la direction de Steve Ballmer, les différentes divisions de l'entreprise se livraient une guerre sans merci pour attirer l'attention, et gagner en influence, même si des produits tels que Windows 8 ont rapidement terni le blason de l'entreprise.

Des projets produit très prometteurs aux allures futuristes ont avorté simplement parce qu'ils ne contribuaient pas au développement de Windows, considéré comme le cœur de l'entreprise, alors même que de dangereux concurrents, comme Apple et Google, étaient raillés et ignorés jusqu'à ce qu'il soit trop tard.

Au final, des guerres internes ont éclaté et des groupes différents ont commencé à agir indépendamment les uns des autres. La console Xbox est un exemple qui illustre bien la situation de l'époque. Au départ, ce projet avait pour but d'améliorer Windows et d'en créer une version de salon, mais cette activité est vite devenue un maillon indépendant que Wall Street n'arrivait pas à comprendre.

Steve Ballmer avait identifié le problème

Cela a eu une incidence sur la façon dont l'entreprise était perçue. Les clients et développeurs de Microsoft ont fini par considérer la société comme axée sur des tactiques de vente féroces et non sur l'innovation. John Shewcuk, Technical Fellow chez Microsoft et chef de l'équipe developer-experience depuis 2013, a confié à Business Insider qu'à son arrivée "c'était un désastre".

Steve Ballmer avait identifié le problème. En juillet 2013, il avait annoncé une restructuration de très grande ampleur baptisée "One Microsoft" dans l'espoir de mobiliser tous les employés afin de redresser l'entreprise. Mais ces mesures trop tardives n'ont pas suffi. Sous la pression du conseil d'administration, Ballmer a annoncé sa démission à peine trois mois plus tard.

Enlever les œillères

C'est là que le génie de Satya Nadella entre en scène – ce qui se reflète d'ailleurs dans les conversations avec les dirigeants de l'entreprise. Sous la direction de Nadella, l'objectif de Microsoft est dès lors d'aider les clients à "accomplir davantage", si on en croit le discours de l'entreprise. En d'autres termes, Satya Nadella s'est appliqué à s'assurer que Microsoft conçoive des outils que les consommateurs aiment utiliser, et peu importe sur quel support.

Satya Nadella a ouvert l'offre Microsoft sur l'écosystème open source.  © Microsoft

D'après Brad Anderson, corporate vice-président de l'entreprise, Satya Nadella aime à dire que "le chiffre d'affaires est un indicateur tardif tandis que l'usage est un indicateur avancé". Les cadres et développeurs du groupe adorent cet état d'esprit. Sans avoir plus à vouer un culte à Windows, ils peuvent désormais réaliser des choses qui n'auraient jamais été envisageables auparavant.

"Un muscle que nous développons chez Microsoft détermine le cœur et l'essence des produits, et évolue en fonction d'eux", nous a confié Javier Soltero, vice-président d'Outlook, qui a rejoint Microsoft lorsque celui-ci a racheté sa start-up Acompli.

Un bon exemple de ces évolutions : Azure, la plateforme de cloud computing de Microsoft supporte désormais Linux, le système d'exploitation libre dont les développeurs raffolent. Ballmer, lui, avait qualifié en son temps Linux de "cancer" et de "communisme".

"Le nouveau Microsoft va chercher les consommateurs où il y en a. Nous n'avons plus les mains liées par des règles arbitraires", déclarait Mark Russinovich, directeur technique de Microsoft Azure, dans un entretien à Business Insider en 2015.

Et c'est également le cas pour Microsoft Office. Sous la direction de Satya Nadella, Office est passé d'un ensemble d'outils d'édition de documents à une grande variété de produits et services que les consommateurs apprécient d'utiliser, qu'il s'agisse de l'accès à Outlook directement sur iPhone ou encore de GigJam, une application funky et futuriste de collaboration.

"Vous achetez  du Microsoft pour votre entreprise, vous voulez donc être en accord avec les produits que nous sortons" nous expliquait Julie Larson-Green, directrice de la division applications de Microsoft, en 2015.

Le futur de Windows

Pour la suite, Windows 10 va prochainement accélérer son activité de façon radicale.

Une grande partie de la stratégie de Microsoft repose sur la notion de plateforme applicative universelle

Une grande partie de la stratégie de Microsoft repose sur ce qu'on appelle la Windows Universal App platform, grâce à laquelle les développeurs peuvent développer une application une fois, et la mettre à disposition sur le Windows Store, avec la possibilité de la faire fonctionner ensuite sur tous les appareils Windows 10 – des PC aux tablettes.

Mais la Windows Universal App platform fournit aussi à Microsoft, en interne, une plateforme de travail unique, faisant en sorte que tous les employés avancent dans la même direction.

Voici un parfait exemple de sa mise en application : en novembre 2015, la console de jeux vidéo Xbox One a fait l'objet d'une mise à jour la dotant du cœur de Windows 10. Jusqu'ici, le noyau de Windows 10 n'a pas d'utilité particulière sur la console. Cependant, cela va changer. Dans un futur proche en effet, Xbox One va bénéficier d'une version du Windows Store axée sur les jeux vidéo. "Tout finira par être unifié", nous a annoncé Peter Orullian, chef de produit du groupe Xbox. "C'est un axe important de la démarche."

De même, HoloLens, les lunettes holographiques de Microsoft, utiliseront également une version de Windows 10. Microsoft a d'ailleurs, aussi, créé une version très allégée de Windows 10 pour les fabricants d'objets connectés.

Tant que Microsoft continuera de développer des applications pour iPhone et Android, les différentes équipes internes ne seront pas en concurrence – car il ne pourra plus y avoir de compétition.

Le chemin reste tout de même semé d'embuches. En effet, le marché des PC diminue, et Microsoft ne parvient pas endiguer l'impact de cette baisse sur la vente de licences Windows. Et la croissance d'Office 365 est si rapide qu'elle cannibalise les ventes de pack Microsoft Office – ce qui veut dire, aussi, que des sources importantes de chiffre d'affaires potentiel encore non-exploitées existent pour Microsoft.

Dans une interview accordée l'année dernière, Satya Nadella a indiqué qu'il n'y avait qu'un seul véritable challenge : "faire en sorte qu'une entreprise toute entière soit convaincue par ses indicateurs clés de succès".

 

Article de Matt Weinberger. Traduction de Soraya Bouznada, JDN

Voir l'article original : How Microsoft CEO Satya Nadella did what Steve Ballmer and Bill Gates couldn't