Le rôle de l’externalisation dans le nouvel ordre économique mondial

Dans un contexte de crise, le directeur informatique se retrouve dans une position délicate : il n’est guère facile de maintenir les résultats, voire de les améliorer, avec moins de ressources humaines et financières.

Dans un contexte de crise ou de ralentissement économique, le conseil d’administration des grandes entreprises est soumis à une pression croissante pour réduire les coûts, rationaliser les opérations et préserver les intérêts des actionnaires. En conséquence, le directeur informatique et le directeur financier se retrouvent dans une position délicate : il n’est guère facile de maintenir les résultats, voire de les améliorer, avec moins de ressources humaines et financières. Et comme les dirigeants étudient toutes les possibilités pour réduire les dépenses, les projets informatiques sont examinés à la loupe et les sous-traitants doivent plus que jamais prouver leur valeur.

L'évolution de la mise en œuvre des projets informatiques
La mise en œuvre des projets informatique a considérablement évolué au cours des quinze dernières années. À ses débuts, l'externalisation des services informatiques n'intéressait les entreprises que dans le but de réduire ses coûts. Avec la mondialisation, les sous-traitants ont commencé à tirer parti d'une main-d'œuvre moins coûteuse pour générer des économies. À court terme, ces relations ont été fructueuses, mais tous ceux qui étaient impliqués dans un projet d'externalisation à cette époque admettent que des limites ont rapidement émergées. En effet, même si ces contrats d'externalisation monolithiques ont généré des économies sur la durée, ils ont été défaillants en termes de souplesse, de productivité et de réactivité, et se sont donc avérés incapables de gérer les transformations nécessaires.

Ce premier modèle a évolué, car il n'était pas adapté aux projets complexes de transformation, qui exigeaient de meilleures compétences et une coordination plus étroite entre le client et le fournisseur. Au lieu de délocaliser tout le travail, on a mis en place des bureaux régionaux avec une présence sur site pour améliorer le contact et l'expertise au niveau local, afin de pouvoir gérer tout type de projets. Progressivement, l'impact de ce modèle combiné sur site - offshore est devenu un autre moteur majeur des décisions d'externalisation. Cependant, avec l'évolution récente du contexte économique, le contrôle des dépenses est revenu au centre des préoccupations des entreprises. C'est pourquoi, le secteur de l'externalisation doit de nouveau s'adapter.
 
De nouvelles attitudes
Quelles sont les conséquences pour le responsable de l'informatique et ses partenaires d'externalisation ? Le moins que l'on puisse dire, c'est que les opinions divergent. Selon une étude conduite par Equaterra, la crise économique n'a pas réduit la demande des entreprises pour des services externalisés[1]. Par contre, la société de conseil TPI, spécialisée dans le suivi des gros contrats d'externalisation financière, déclare avoir constaté un recul du nombre et de la taille des contrats depuis 2007[2].

Pour notre part, nous avons constaté que les entreprises tendent à ralentir la prise de décision lorsque la pression sur les coûts passe au premier plan. Elles réévaluent leurs besoins et préfèrent concentrer leurs investissements sur des projets qui génèrent une économie immédiate, plutôt que sur ceux qui privilégient des avantages transformationnels à long terme. Le scénario idéal est bien évidemment de réaliser des projets d'informatique combinant ces deux types d'avantages.
Ce qui est certain, c'est que les entreprises veulent aujourd'hui avoir un contrôle bien plus étroit sur les projets informatiques dans lesquels elles s'engagent.
 
Retour au point de départ
Face aux difficultés actuelles, certaines entreprises concluront que le meilleur scénario est encore de gérer en interne leurs projets informatiques, afin de les contrôler au mieux. Mais est-ce la bonne approche ? Il est clair que certains CIO seront plus en confiance si toute leur informatique revient sous leur toit, mais la crise est là pour leur rappeler que s'ils ont été initialement séduits par l'externalisation, c'était bien pour réduire les coûts.

Mais le coût n'est que l'un des facteurs de l'équation : le partage des risques représente un autre avantage majeur. Dans le contexte actuel, les fournisseurs informatiques ont plus que jamais intérêt à tenir leurs engagements. Ils sont conscients que les projets doivent générer rapidement des économies et une efficacité tangibles, à défaut de voir leurs partenariats remis en cause. Et en période difficile, il peut être utile d'avoir une base rationalisée de fournisseurs où une seule et même entreprise est responsable de la mise en œuvre de l'ensemble des projets, selon les termes définis par un accord de niveau de service (SLA). Ceci simplifie grandement les relations et le temps passé à les gérer, libérant des ressources internes pour d'autres priorités.

Ces derniers mois, nous avons vu à quelle vitesse les conditions du marché peuvent changer et comment cette évolution peut se répercuter sur les besoins en informatique. L'atout majeur de l'externalisation, c'est qu'elle apporte la souplesse voulue pour moduler l'ampleur des projets en fonction de la demande, ce qu'il est difficile de faire pour une équipe interne. Les partenaires informatiques sont également là pour apporter leurs conseils, leur vision et leurs connaissances spécialisées (souvent obtenues en fournissant des solutions à des sociétés dans des situations comparables). Et contrairement aux premiers contrats d'externalisation où l'on se contentait de « repasser le travail » au sous-traitant, les entreprises devraient maintenant chercher à collaborer avec lui pour utiliser ses connaissances et tout son potentiel afin de planifier au mieux leur stratégie informatique. Les meilleurs fournisseurs de services associeront cette réflexion stratégique avec la réduction des coûts, en délocalisant les processus pour générer des économies immédiates, et en les transformant progressivement pour améliorer les performances.

Les partenaires d'externalisation proposent de plus en plus de services de BPO à haute valeur ajoutée. Généralement, ces tâches sont spécifiques à un domaine et exigent un personnel hautement qualifié, aguerri et professionnel. Le nombre élevé de diplômés compétents dans des pays comme l'Inde ou la Chine a rendu ces tâches possibles, et la différence de rémunération avec le personnel interne maintient l'avantage de coût. Cependant, l'intérêt réel de faire appel à ce pool mondial de compétences est d'ouvrir de nouvelles possibilités de résultats. Prenons le cas d'une compagnie d'assurance qui étudie les déclarations de sinistres à la recherche de fraudes. Avec un personnel interne, la compagnie négligerait d'examiner les dossiers dont le coût de l'enquête serait supérieur au montant de la fraude éventuelle. En utilisant une main-d'oeuvre à l'étranger, le seuil diminue, ce qui permet d'étudier davantage de dossiers.

Aujourd'hui, l'évaluation du retour sur investissements reste le facteur le plus important d'un projet informatique. Les fournisseurs de services doivent donc collaborer avec leurs clients pour établir des objectifs et en définir le calendrier. Désormais, convenir du SLA lors de la négociation d'un contrat est la règle. Un cahier des charges détaillé intégrant les économies à réaliser, la productivité ou le rendement et précisant l'approche planifiée de la transformation des processus est mis en place. Les entreprises qui s'inquiètent des risques potentiels peuvent cependant demander aux fournisseurs une tarification à la transaction. Au lieu de s'engager à travailler sur un projet pendant une période donné, ce modèle fixe un prix pour un certain résultat, mettant le fournisseur dans l'obligation de réaliser la tâche impartie dans les délais.
 
La plupart des pays connaissent depuis presque vingt ans la plus forte baisse de confiance des consommateurs et des entreprises. Les perspectives sont donc incertaines. Dans ce contexte, tous les investissements sont examinés à la loupe et les projets informatiques doivent être capables de démontrer leur valeur à long terme tout en apportant un avantage à court terme. Il est donc naturel que les projets d'externalisation soient étudiés de très près. Les meilleurs fournisseurs de services se seront déjà adaptés à ce nouvel ordre mondial, en associant réduction des coûts et transformations nécessaires pour améliorer les performances des entreprises clientes.

[1] Equaterra, 'Outsourcing Service Provider Performance and Satisfaction Study 2008-09', février 2009

[2] TPI, janvier 2009