Et si le système d’information était géré comme une énergie ?

Pour maîtriser leurs coûts informatiques, les DSI peuvent s’appuyer sur un modèle de gestion de leurs actifs inspiré de ceux des gestionnaires d’énergie.

A l'instar des gestionnaires d'énergie, les DSI ont dû faire face au cour des dernières années à une double évolution de leur activité : orientation vers le service d'une part et "financiarisation" d'autre part. L'organisation des DSI a donc évolué (centre de services, centres de compétence...) tandis que de nouvelles compétences ont été acquises, notamment en contrôle de gestion. Toutefois, les modèles de gestion sur lesquels les DSI se sont appuyés (modèle financier de type "compte de résultat", modèle basé sur les activités de type ABC) ne permettent pas de synthétiser les engagements, ni de mettre en évidence les leviers d'équilibre entre "production" et "demande client", et encore moins de faire ressortir des opportunités d'arbitrage.
 
L'expérience des DSI en termes de modèles de gestion
Nombre de DSI s'appuient sur un modèle de gestion qui distingue OPEX et CAPEX. Un tel modèle est nécessaire pour assurer une consolidation par la Direction Financière des informations provenant de la DSI avec celles provenant d'autres entités. Cependant, il réduit les activités d'une DSI à des activités de construction (CAPEX / "BUILD") et d'exploitation (OPEX / "RUN"). La granularité des informations manipulées ne permet pas en général de détecter les arbitrages possibles.
Un certain nombre d'autres DSI ont mis en œuvre un modèle de gestion basé sur les activités (modèle ABC). En théorie, ce modèle permet de différencier des postes de coûts par activité et de les benchmarker tant en interne qu'en externe. A l'usage, il se révèle complexe à maintenir et à faire évoluer.
 
Du système énergétique au système d'information
Il serait intéressant de changer d'approche et de modèle en s'inspirant des pratiques des gestionnaires d'énergie. Ces derniers différencient dans leur gestion les opérations qui relèvent du "ruban" de celles qui relèvent de la "dentelle". Cette distinction leur est utile à deux titres :
- pour la recherche d'équilibre des actifs à court terme : les opérations relevant de la dentelle sont des opérations d'achat d'énergie nécessaire pour l'équilibre physique du système. Il s'agit d'une énergie plus chère que l'énergie relevant du ruban. Il convient donc d'en maîtriser l'importance, afin de ne pas compromettre l'équilibre économique du système énergétique dans son ensemble,
- pour la gestion des actifs à moyen terme : les opérations relevant du ruban sont des opérations d'achat d'énergie nécessaire pour satisfaire les engagements d'un énergéticien. Il convient donc de les planifier et de les gérer dans la durée afin de s'assurer de la viabilité économique du système.
 
Appliquée au budget d'une DSI, cette analogie conduit à bâtir un modèle de gestion qui distingue les postes de coûts nécessaires pour satisfaire les engagements récurrents et prédictibles (le '"ruban") comme les frais de personnel et de structures, les télécommunications, la maintenance..., des postes de coûts liés à des activités et actifs nécessaires pour s'adapter aux aléas ou fournir des réponses à des demandes non récurrentes (la "dentelle") comme les projets applicatifs ou d'infrastructure, les achats de logiciels ou encore la maintenance évolutive, etc.
 
Ce modèle permet de représenter le budget d'une DSI comme un portefeuille d'actifs pour lesquels il est possible d'identifier des facteurs de risque (déséquilibre entre récurrent/ non récurrent, corrélations entre investissement/ poids du récurrents ...) et des éléments d'alerte (manque de synchronisation entre trajectoire financière des applicatifs et des infrastructures, faible maîtrise du décommissionnement des applicatifs et des infrastructures...).

Vers un nouveau dialogue DSI/ Direction métier
La mise en place d'un tel modèle apporte également des bénéfices :
- en termes de lisibilité : la communication porte sur un nombre limité d'agrégats (à titre d'exemples : projet, maintenance, licence, postes de travail, infrastructures mutualisées, main d'œuvre interne DSI)
- en termes de qualité du dialogue budgétaire entre la DSI et les directions métier : en basant le dialogue budgétaire sur un nombre volontairement limité d'agrégats, les métiers sont responsabilisés sur leur usage de ces agrégats par rapport à la consommation qu'ils en font. La DSI peut alors animer un dialogue budgétaire basé sur des arbitrages réguliers entre ou au sein des agrégats SI retenus.

Plus globalement, ce modèle peut également servir de cadre pour la mise en oeuvre d'actions d'optimisation, car moins un actif SI présente un caractère récurrent, plus il peut être contraint (gain).