Laurent Puype (CBL Consulting) "Les DRH ne sont pas toutes prêtes à passer au décisionnel"

Très répandus dans le pilotage financier, les indicateurs décisionnels dédiés aux ressources humaines sont loin d'être généralisés. Tout du moins dans une forme autre que le tableur.

En quoi le décisionnel RH est-il devenu une priorité stratégique pour les DSI ?  

Depuis plusieurs années, on constate un éclatement des fonctions de management qui a favorisé la multiplication d'outils centralisés de gestion RH. Notamment par le biais d'une extraction des fichiers opérationnels RH vers des tableurs Excel pour réaliser des tableaux croisés dynamiques de gestion RH.  

Encore très répandue faute de moyens suffisants, cette méthode de traitement artisanale montre cependant aujourd'hui ses limites face à la vision 360 degrés que peuvent être en mesure de proposer les solutions décisionnelles RH.

Car s'il est possible de générer quelques indicateurs de gestion RH sous Excel comme ceux relatifs aux bilans sociaux individualisés ou aux suivis des augmentations, certains deviennent beaucoup trop complexes à gérer, liés à la gestion et au suivi des compétences ou au recrutement. Alors qu'elles étaient réservées au management et top management jusqu'à il y a encore 4 ou 5 ans, les solutions décisionnelles RH commencent à franchir le seuil des directions des ressources humaines qui doivent cependant faire face à un changement culturel profond.

Pourquoi certaines DRH se montrent encore réticentes ?

"En commençant par des indicateurs simples les DRH pourront ensuite glisser vers de l'analyse décisionnelle"

Nous constatons que si les DRH dans leur grande majorité se montrent intéressées par les indicateurs décisionnels RH, toutes ne sont pas pour autant prêtes à franchir le pas d'une mise en œuvre concrète. Cela s'explique par les lacunes dont elles peuvent faire preuve en termes de maturité et du manque d'accaparement des utilisateurs.

Pour surmonter ces difficultés, il est surtout nécessaire de ne pas complexifier son projet décisionnel. Comme dans tout projet décisionnel, un projet décisionnel RH doit être compris des utilisateurs. Il faut donc veiller à la simplicité de son projet et de ses objectifs initiaux pour éviter tout risque de rejet. 

En commençant par des indicateurs simples de type bilans individuels, on pourra ensuite glisser, par le biais d'itérations successives, vers l'analyse décisionnelle et des indicateurs plus complexes. Enfin, il ne faut pas perdre de vue que les projets décisionnels RH ne sont pas stratégiques aux yeux de tous les acteurs de l'entreprise. Dans certains cas, leur mise en œuvre pourra même prendre une tournure politique.

Comment s'insèrent les indicateurs décisionnels RH dans la stratégie de l'entreprise ?

Les entreprises sont nombreuses à comprendre l'intérêt de leur mise en œuvre. D'ailleurs, les grandes entreprises ont souvent déjà opté pour des outils plus ou moins élaborés de suivi d'indicateurs et de tableaux de bord décisionnel RH, même si ceux liés à leurs besoins décisionnels en matière de pilotage financier et comptable resteront prioritaires.

Mais le véritable levier de croissance de ce marché apparaît davantage au niveau des PME, dont les DRH sont confrontées à un manque de temps pour automatiser le traitement de leurs données RH. Ce qui est dommage au regard des bénéfices tangibles que pourraient être à même d'apporter les indicateurs décisionnels en termes de simulation et de suivi des bilans RH consolidés.

Laurent Puype est directeur du pôle décisionnel chez CBL Consulting.