Symphony Creative Studio de TikTok : prometteur mais pas à la hauteur
TikTok a ouvert mi-novembre l'accès à son studio de création de publicités vidéo d'IA générative : Symphony Creative Studio. L'outil apporte la promesse d'une mini-révolution productive puisqu'il est censé permettre à tous, même ceux qui disposent de peu d'assets visuels, de renouveler de manière industrielle leurs créations. Un atout de taille pour la pub sociale dont une des sources de performance est la fraicheur et la variété des créas. Le tout renforcé par une production automatisée s'inspirant des contenus qui marchent le mieux sur la plateforme.
En pratique cependant, Symphony Creative Studio n'est pas encore tout à fait au point. Nous l'avons testé avec l'aide de l'agence sociale Neads, labellisée creative partner de TikTok. Comme nombre de ses confrères et concurrents, Neads se sert de la plateforme Symphony Creative Studio au moins depuis l'été et a pu déjà faire sa petite courbe d'expérience.
Symphony Creative Studio offre trois fonctionnalités principales, dont au moins deux sont en or pour les annonceurs qui ne disposent pas de moyens pour investir en assets ou qui veulent juste produire davantage et vite : elle crée des spots à partir de quasiment rien, elle les adapte à tous les idiomes et, cerise sur le gâteau, elle génère des avatars pour animer des contenus, à l'instar des influenceurs.
Prenons d'abord la fonctionnalité de création ou d'adaptation de spots : si vous ne disposez pas de vidéo, la plateforme vous permet de lui communiquer une adresse url ou de télécharger des images pour que l'IA de Symphony propose des vidéos. Nous l'avons testé : deux fois sur trois, l'outil n'a pas marché. Nous l'avons d'abord testé pour une crème à base de lait de chèvre d'un des clients de Neads du secteur de la cosmétique : une fois avec une url, une autre fois avec des images. A chaque fois des messages d'erreur s'affichaient : l'outil n'acceptait ni l'url ni les images. Impossible de savoir pourquoi.
Ensuite, quand il a fonctionné, dans le cadre d'un test pour un fabricant de matelas, le résultat s'est avéré largement insuffisant. En effet, après avoir mouliné, l'outil a généré trois propositions de spots, dont deux avec la même recette : un avatar présentant le produit sur lequel portait la page web source avec en arrière-plan une image du produit. Chacun des trois premiers jets proposés devait être retravaillé. Non seulement le texte comportait quelques imprécisions grossières de langue française alors que le site source était en français, mais en plus la qualité du doublage était très inégale d'une proposition à une autre : qualitative sur l'une, insuffisante sur l'autre. Pendant le test, dès que nous avons essayé de changer d'url ou de texte, la console s'est remise en langue anglaise par défaut, nous obligeant à lui rappeler que nous travaillions en français, ce qui n'est pas idéal pour une expérience utilisateur sans couture.
"Nous préférons utiliser HeyGen qui est cinq fois plus rapide et donne des résultats plus qualitatifs"
Passons à la deuxième fonctionnalité phare : l'adaptation automatique à différents idiomes. La suite permet en effet de changer l'idiome d'un spot, à la fois l'audio, le doublage de la personne qui parle et les sous-titres. C'est bluffant à première vue. Mais ce n'est pas encore tout à fait abouti : "Cela fait plusieurs mois que nous testons cette fonctionnalité mais nous préférons utiliser HeyGen qui est cinq fois plus rapide et donne des résultats plus qualitatifs", explique Nathan Elmaleh, CEO de Neads. Pour transformer en italien une vidéo de 30 secondes en français pendant notre test, TikTok Symphony a annoncé avoir besoin de 53 minutes.
Enfin, il ne faut pas se leurrer, les avatars proposés par Symphony Creative Studio restent des avatars : se rendre compte que le personnage n'est pas humain est un jeu d'enfants. Nous avons choisi une femme française. Point positif : au bout de quelques secondes la vidéo était générée. Sa voix était assez qualitative, certes, mais les mouvements de sa bouche et de son visage, encore très artificiels. De plus, face au grand nombre d'avatars proposé, et ce en plusieurs langues et accents avec des voix par défaut, l'utilisateur doit être attentif à bien choisir ses préférences, l'ergonomie de l'outil n'étant pas très intuitive. "Le test n'est pas concluant. En plus de cette gestuelle robotique, la qualité des sous-titres laisse à désirer : l'utilisateur n'a pas la main sur la coupe des mots et la taille de la police", commente Many Tavakoli, head of performance chez Neads.
Autant de détails qui, en publicité, ne pardonnent pas. "Ces tests ne sont certes pas tout à fait concluants. Mais il ne faut pas oublier que TikTok travaille en itération et que la plateforme améliore continuellement ses produits. Symphony Creative Studio ouvre grand le champ des possibles pour la création de contenus publicitaires sur TikTok et nous savons que nous pouvons faire confiance à TikTok pour le faire évoluer vite. Je suis convaincu que l'IA est là pour durer", conclut Nathan Elmaleh.