Benjamin Grumbach et Franck Farrugia (OMG France) "Les investissements publicitaires sur l'ensemble du marché seront en baisse en 2025 en France"
Franck Farrugia et Benjamin Grumbach, co-CEO d'Omnicom Media Group France, expliquent comment les stratégies des campagnes évoluent en ces temps incertains et commentent les potentiels escomptés de la fusion avec IPG.
JDN. Quel est votre avis sur le spleen un peu généralisé dans votre secteur en ce début 2025 en France ?

Benjamin Grumbach. Cet état d'esprit est cohérent avec l'ambiance politique, sociale et économique du pays, de l'Europe et du monde. Les entreprises que nous accompagnons évoluent dans ces contextes complexes. Les annonceurs sont par conséquent plus précautionneux que les années précédentes, et ils ont raison je pense. Cela ne génère pas nécessairement des coupes significatives de budgets en cette reprise mais une plus forte incertitude sur la manière dont ces enveloppes seront dépensées dans les mois à venir. Sur l'année au global, pour l'ensemble du marché, nous pensons que les investissements publicitaires seront en baisse, si le contexte reste ce qu'il est. Ceci étant, notre secteur a déjà vécu différentes situations de crise économique. Nous savons comment accompagner les annonceurs à traverser ce type de période tout en préparant l'avenir. Ce sont des moments intenses de quête d'excellence très intéressants à vivre en interne.
Franck Farrugia. L'incertitude devient la seule certitude et exacerbe le besoin de réactivité, de souplesse et d'adaptabilité des agences. Elle accentue le niveau d'attente et d'exigence des annonceurs à l'égard de leurs agences et de la productivité de leurs campagnes. Ces derniers ont besoin de plus de robustesse face aux aléas, c'est-à-dire d'une plus grande capacité à résister, voire à bénéficier d'opportunités, grâce au marketing et à la publicité. C'est ce que nous devons être capables de leur offrir. La manière de construire les stratégies de campagne évolue avec notamment la conception de davantage de versions alternatives sur l'année et des réorientations à déployer en fonction des performances.
Qu'est-ce qui va marquer le marché de la communication en 2025 d'un point de vue technologique ?
F.F. 2025 sera l'année où le marché deviendra beaucoup plus exigeant à l'égard de l'application concrète des promesses des solutions technologiques. Le retour sur investissement devra être rapide et palpable pour convaincre les annonceurs d'investir en innovation, c'est une certitude. L'exigence à l'égard des retours exprimés par les différentes plateformes médias sera elle aussi exacerbée. Nous tablons par exemple sur l'accélération de l'utilisation de l'IA dans la production de contenus et notamment des déclinaisons spécifiques à des audiences précises sur tous les formats et canaux pur l'obtention de meilleurs résultats.
B.G. Les annonces qu'Omnicom Media Group a faites durant le CES début janvier illustrent cette tendance d'exigence accrue sur les résultats. Je pense notamment au partenariat avec Google sur le Share of Voice planning, pour nourrir l'IA des requêtes qui vont chez les concurrents de nos annonceurs afin de piloter en conséquence nos créas et stratégies de bidding sur le search. Mais également à l'accord exclusif d'Omnicom et Flywheel avec Amazon pour élargir à cinq ans la visibilité sur les données d'achat de nos clients sur Amazon.
F.F. Enfin, on connaîtra également l'accélération du travail en langage naturel. Ce dernier deviendra omniprésent dans nos outils, notamment dans notre suite Omni (plateforme propriétaire d'insights, données d'activation et de mesure des performances des campagnes du groupe, ndlr.) Cela aura pour effet de démocratiser de manière colossale l'utilisation de la technologie et d'accélérer son déploiement. Nos équipes pourront par exemple demander simplement d'intégrer dans le plan média ce qu'il faut pour toucher les consommateurs que nous n'avons pas réussi à toucher jusque-là. C'est en cela que l'IA générative représente une vraie rupture.
Pouvez-vous nous dire un petit mot sur l'année 2024 pour OMG France et surtout vos objectifs pour 2025 ?
B.G. En 2024, nous avons géré un peu plus d'un milliard d'euros d'investissements publicitaires pour nos clients, pour un chiffre d'affaires de près de 95 millions d'euros, en hausse de 9,4%. En 2025, nous poursuivrons notre objectif d'intégrer le top 3 des groupes agences médias en France. Avec un peu plus de 500 collaborateurs, nous accompagnons 170 clients actifs. Nous devrions dépasser les 100 millions d'euros de chiffre d'affaires cette année.
L'annonce du projet d'acquisition d'IPG par le groupe Omnicom va-t-elle vous aider à atteindre cet objectif ?
B.G. Avec cette opération, nous pourrons prétendre à la première place aux Etats-Unis. En France nous sommes pour l'instant quatrièmes et espérons que cela puisse nous aider à atteindre notre objectif du top 3. C'est en tout cas une nouvelle très excitante pour nous. Franck et moi, nous avons déjà vécu l'expérience de fusionner des entités lorsque nous avons vendu Re-Mind à Omnicom en 2015 et que nous avons réussi la réunion de Re-Mind et PHD. Nous sommes donc ravis de cette perspective de travailler à nouveau dans un cadre de fusion et d'acquisition. Ceci étant, les autorités doivent encore valider cette intention d'acquisition aux Etats-Unis et en Europe. Si tout était validé, l'opération devrait être finalisée en bourse au début du second semestre.
F.F. La convergence de deux entreprises est toujours un exercice passionnant. Lorsque cette convergence est réussie, comme cela a été le cas pour Re-Mind PHD, la valeur à la fin est supérieure à la somme des deux. Re-Mind PHD a réussi à plus que doubler de taille en seulement cinq ans. Nous sommes donc impatients de recommencer !