La Poste réclame un financement de l'État pour ses missions de service public
En assumant des services de proximité en milieu rural et des missions sociales variées, La Poste cumule des coûts que l'État peine à compenser. Un déficit budgétaire qui s'aggrave année après année.
Depuis plusieurs décennies, La Poste, autrefois dédiée à la distribution du courrier, s'est progressivement transformée en un acteur de services publics diversifiés. Outre le courrier et la banque, elle s'occupe désormais d'activités aussi variées que l'aménagement du territoire et l'aide à la personne. Or, cette mutation vers un modèle multiservices a un coût. Philippe Wahl, PDG de La Poste, a récemment exprimé ses préoccupations quant au manque de financement public pour compenser ces missions, générant un déficit accumulé qui pourrait mettre en danger la continuité de ces services.
Un manque à gagner de quatre milliards d'euros
Depuis six ans, La Poste constate un écart croissant entre les missions imposées par l'État et le financement alloué. Lors d'une audition devant la commission des affaires économiques du Sénat, Philippe Wahl a précisé que cet écart financier s'élève aujourd'hui à quatre milliards d'euros, soit un manque d'environ un milliard d'euros par an.
"L'État aurait dû nous verser 4 milliards. Il ne les a pas versés", a-t-il affirmé devant la commission, selon un article publié par Sud Ouest. Ce manque de compensation est confirmé par l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep), dont les calculs montrent que le coût annuel des missions de service public confiées à La Poste atteint 2,2 milliards d'euros, alors que l'État n'apporte qu'un peu plus d'un milliard.
Philippe Wahl a également souligné que ces sous-compensations successives rendent la situation financière de La Poste particulièrement critique : "La sous-compensation de nos missions de service public prend une acuité considérable parce que la somme des sous-compensations, les missions de service public que l'État a laissé à nos charges depuis six ans, c'est 4 milliards d'euros", a-t-il déploré lors de son intervention au Sénat.
Des engagements fluctuants de la part de l'État
Fin septembre, le contrat de présence postale territoriale, qui finance le maintien des 17 000 antennes de La Poste sur tout le territoire, a également fait l'objet d'une annonce alarmante. Selon Philippe Wahl, le budget alloué à ce contrat devait être amputé de 50 millions d'euros en 2024, une mesure qui aurait des répercussions importantes sur les services publics en zone rurale. Cependant, face aux réactions des élus locaux et à la mobilisation de l'Association des maires ruraux de France, l'État a finalement décidé de revenir sur cette coupe budgétaire.
Malgré cette décision de dernière minute, le PDG de La Poste est resté prudent sur les futures contributions de l'État. Philippe Wahl a précisé, cité par Boursorama, que même avec le maintien de ces 50 millions d'euros, "ce n'est qu'une compensation à 50% d'une mission qui coûte bien 100% à La Poste", indiquant que le financement actuel ne couvre que partiellement les coûts réels.
Vers une redéfinition des missions de service public de La Poste
Cette question de sous-compensation soulève un enjeu plus large sur le rôle de La Poste dans les années à venir. Dans le cadre de son contrat d'entreprise pour la période 2023-2027, l'entreprise et l'État entament une réflexion sur la redéfinition des missions de service public confiées à La Poste.
Face aux évolutions sociétales et aux changements dans les usages des citoyens, l'équilibre entre les missions confiées et les compensations pourrait faire l'objet de nouvelles discussions pour garantir une viabilité financière durable.