Décarbonation automobile : Paris défend ses constructeurs face aux sanctions européennes sur le CO2
Sous l'impulsion du ministre de l'Économie, Antoine Armand, la France appelle l'Union européenne à reporter les amendes prévues en 2025 pour les constructeurs automobiles qui n'atteignent pas les objectifs de réduction des émissions de CO2. Ce report, selon le gouvernement, permettrait de ne pas compromettre les investissements dans la transition écologique. Paris tente de rallier d'autres États membres pour appuyer cette requête.
La position française contre les sanctions immédiates
Le règlement européen CAFE (Corporate Average Fuel Economy) impose aux constructeurs une baisse progressive des émissions de CO2, avec un nouveau palier de réduction prévu pour 2025. Ce seuil de -15% par rapport à 2020 met la pression sur les constructeurs, qui s'exposent à des amendes considérables en cas de non-respect.
Antoine Armand estime que ces sanctions risquent de pénaliser l'investissement dans les véhicules électriques, tout en renforçant la concurrence asiatique. "Si nous devons infliger des amendes gigantesques aux constructeurs parce qu'ils ne sont pas allés assez vite, la première conséquence sera d'affaiblir l'investissement et surtout de renforcer nos concurrents asiatiques", a-t-il déclaré cité dans France Info.
En partenariat avec Marc Ferracci, ministre de l'Industrie, Antoine Armand a souligné la nécessité d'une flexibilité dans l'application des sanctions pour les entreprises déjà engagées dans la transition électrique. Ce premier, en déplacement en Allemagne, a tenté de rallier le soutien de ses homologues européens en expliquant que le maintien des sanctions pourrait avoir un impact économique et social majeur sur l'industrie automobile européenne.
Une coalition pour soutenir la demande française
Pour renforcer sa position, la France envisage de former une coalition d'États membres en faveur d'un report des sanctions. Antoine Armand a fait part de cette intention lors des réunions de l'Eurogroupe et d'Ecofin à Bruxelles, en espérant rallier des pays comme l'Allemagne, où les constructeurs sont également sous pression, ainsi que des États d'Europe de l'Est moins avancés dans la transition électrique.
Le ministère de la Transition écologique suggère que les pénalités pourraient être repoussées ou étalées dans le temps. Les Echos rapporte que les discussions restent ouvertes avec la Commission, qui pourrait envisager une décision "ciblée" pour alléger temporairement les sanctions, sans remettre en cause les objectifs de décarbonation.
Les risques financiers et industriels des amendes
Les amendes prévues pour 2025 pourraient atteindre entre 5 et 16 milliards d'euros, selon différentes projections. Le calcul repose sur une pénalité de 95 euros par gramme de CO2 excédentaire, multiplié par le nombre de véhicules vendus, et représente un risque financier majeur pour les constructeurs.
Pour Renault, ces sanctions pourraient se chiffrer en centaines de millions d'euros, freinant leurs investissements dans la transition électrique. "Politiquement, on ne peut pas assumer que Renault soit plombé par des amendes, ou doive acheter des quotas de CO2 à des concurrents chinois", précise un membre de l'exécutif.
Les constructeurs estiment que l'objectif de 2025 exige de vendre "une voiture électrique pour quatre voitures thermiques", une contrainte qu'ils jugent difficile à atteindre dans un marché où les ventes de véhicules électriques n'ont pas encore atteint les niveaux espérés.
Bien que la France maintienne son soutien à l'échéance de 2035 pour la fin des ventes de véhicules thermiques, elle souhaite adapter le rythme des sanctions pour éviter une chute de compétitivité.