530 millions d'euros d'amende : TikTok rattrapé par la régulation européenne des données

530 millions d'euros d'amende : TikTok rattrapé par la régulation européenne des données Le traitement réservé aux données des utilisateurs européens par la maison mère ByteDance soulève des inquiétudes croissantes à Bruxelles comme à Washington.

TikTok a été condamné le 2 mai 2025 à une amende de 530 millions d'euros par le régulateur irlandais, pour non-respect du règlement européen sur la protection des données. La plateforme chinoise dispose de six mois pour se mettre en conformité.

Une infraction au RGPD liée à l'accès aux données depuis la Chine

L'amende a été infligée par la Commission irlandaise de protection des données (Data Protection Commission), autorité compétente dans le cadre du guichet unique européen, en raison du siège européen de TikTok situé en Irlande. Selon Graham Doyle, commissaire adjoint de la DPC, l'entreprise n'a pas su garantir que les données personnelles des utilisateurs européens, accessibles depuis la Chine par des salariés de sa maison mère ByteDance, bénéficiaient d'un niveau de protection équivalent à celui de l'Union européenne.

TikTok a reconnu, au cours de l'enquête, que certaines données européennes avaient été stockées temporairement en Chine en février 2025, évoquant un "problème technique" depuis résolu, selon BFM TV. L'entreprise avait déjà confirmé en 2022 que ses équipes basées en Chine pouvaient consulter certaines données personnelles à distance, notamment pour des opérations de maintenance et d'analyse algorithmique.

Le réseau social affirme cependant n'avoir jamais reçu ni transmis de données d'utilisateurs européens aux autorités chinoises. Il met en avant son programme Clover, lancé en 2023, qui prévoit un investissement de 12 milliards d'euros sur dix ans pour stocker les données localement en Irlande et en Norvège.

Un manque de transparence sur les transferts de données

La DPC reproche également à TikTok de ne pas avoir informé clairement ses utilisateurs, entre 2020 et 2022, des destinations de transfert de leurs données, ni du fait qu'elles pouvaient être consultées depuis la Chine. Cette infraction spécifique est à l'origine de 45 millions d'euros sur le montant total de l'amende.

La décision irlandaise s'inscrit dans un contexte où les craintes concernant l'accès potentiel des autorités chinoises aux données numériques sont régulièrement soulevées. Comme le rappelle Le Monde, la DPC considère que TikTok n'a pas été en mesure de fournir des garanties contre une consultation des données par les autorités chinoises, permise par les lois nationales chinoises sur l'antiterrorisme et le contre-espionnage. La plateforme a reconnu elle-même que ces lois s'écartaient sensiblement des standards européens.

TikTok a confirmé que ses équipes techniques en Chine avaient, dans certains cas, accès aux données européennes afin d'assurer le bon fonctionnement des systèmes. L'entreprise maintient que ces pratiques ne constituent pas une violation du RGPD, et a annoncé son intention de faire appel de la sanction.

Un cas emblématique dans la régulation numérique européenne

D'après Les Échos, cette amende porte à 875 millions d'euros le total des sanctions prononcées à l'encontre de TikTok pour non-conformité au RGPD, après une précédente amende de 345 millions d'euros en 2023 liée à la gestion des données des mineurs. La décision de la DPC représente la troisième sanction la plus élevée jamais infligée par une autorité européenne de protection des données, après celles prononcées contre Meta.

Au-delà du volet juridique, cette affaire alimente les tensions entre Bruxelles et Pékin. Politico voit dans cette décision un tournant dans les relations entre l'Union européenne et la Chine, sur fond de surveillance accrue des technologies venues d'Asie. L'UE a par ailleurs engagé d'autres procédures à l'encontre de TikTok, notamment autour de la protection des mineurs et de la transparence des algorithmes.

Aux États-Unis, une loi votée en 2024 impose à ByteDance de céder TikTok à un opérateur américain, sous peine d'interdiction. La Maison Blanche a fixé la date butoir au 19 juin 2025.