Jean Coumaros (Bleu) "Bleu a déployé 10 000 serveurs pour accueillir les services Azure et Microsoft 365"
L'entreprise a été lancée en début d'année. Son objectif ? Lancer son cloud de confiance d'ici la fin de l'année avec en ligne de mire l'ambition de décrocher le label SecnumCloud d'ici 2026.
JDN. Quel bilan dressez-vous du premier semestre d'existence de Bleu ?
Jean Coumaros. La société Bleu est en effet opérationnelle depuis le début de l'année. En revanche, notre plateforme cloud ne sera lancée, elle, que fin 2024. Depuis janvier dernier, nous avons recruté et formé 60 salariés. Nous anticipons de passer la barre des 100 collaborateurs en fin d'année. En parallèle, nous avons déjà engagé des démarches auprès de clients potentiels à la fois dans le secteur public et privé. En l'espace de 6 mois, nous avons rencontré 160 prospects. Au sein de cette population, une bonne cinquantaine a exprimé son intérêt, et une petite dizaine se prépare à une future migration sur notre plateforme.
En termes de technologie, nous sommes déjà allés au bout de l'installation d'une première infrastructure sur deux data centers, l'un en région parisienne, l'autre dans le sud du pays. Ces deux régions seront respectivement pilotées par deux centres opérationnels, le premier est basé en Ile-de-France et le second à Rennes. Bleu a déjà déployé 10 000 serveurs pour accueillir les services Azure et Microsoft 365 qui seront mis en œuvre dans la foulée.
Allez-vous proposer toute la gamme des services Azure et Microsoft 365 ?
Nous avons pour objectif à termes de commercialiser l'ensemble de ces offres. Mais leur déploiement va se faire par étape. Fin 2024, nous commencerons par commercialiser la gamme IaaS d'Azure. A l'issue du premier semestre 2025, nous lancerons sa gamme PaaS, mais aussi la suite Microsoft 365. Dans le même temps, nous ouvrirons notre propre marketplace avec des applications utiles à nos futurs clients. Ces solutions pourront provenir de la place de marché Microsoft Azure ou être issues de partenaires tiers. Il pourra s'agir notamment d'acteurs éditant des solutions très prisées par les collectivités territoriales. Ces applications pourront être soit proposées sur notre marketplace soit installées sur notre plateformes sous la forme d'applications SaaS.
"La certification SecnumCloud ne pourra intervenir qu'au moment où Bleu sera entièrement étanche vis-à-vis de Microsoft"
Ensuite, il y aura forcément un décalage entre la disponibilité des nouveaux services Azure qui continuent d'être lancés par Microsoft au fil de l'eau et leur disponibilité dans notre environnement. Et ce pour deux raisons. D'abord parce qu'il y a un travail de refactoring à effectuer de la part de Microsoft pour que ces services soient disponibles sur Bleu. Ensuite, parce que nous devrons nous assurer de leur compatibilité avec la qualification SecnumCloud que nous visons dans le cadre de notre démarche de cloud de confiance. Les critères de ce label exigent, je le rappelle, que les données manipulées soient localisées, gérées et administrées uniquement en Europe (et par un acteur local, ndlr).
Pourquoi les services Microsoft doivent-il être refactorisés ?
Ce refactoring permettra de mettre à disposition les services Azure et Microsoft 365 sur un stack qui n'est pas celui de Microsoft. De plus, la gestion de ces services devra être en partie automatisée pour faciliter la prise en main de leur management par nos propres équipes.
A quelle échéance pensez-vous mettre à disposition Azure OpenAI et Microsoft Copilot ?
Notre objectif est de les lancer dans les 18 à 24 mois qui suivront la mise à disposition des premiers services Azure (soit d'ici la fin du premier semestre 2026, ndlr]. Nous serons à même de donner un calendrier plus précis en septembre.
Quand comptez-vous décrocher la certification SecnumCloud ?
On vise le deuxième semestre 2025. Pourquoi ? Parce que l'Anssi ne peut décerner ce label tant qu'elle n'a pas vu notre plateforme tournée en production. Il faudra également attendre que le IaaS et le PaaS Azure tout comme la suite Microsoft 365 soient entrés déployés sur notre environnement. L'ensemble des équipes de Microsoft qui nous accompagnent devront en effet avoir quitté nos sites pour que la certification soit décernée. En résumé, cette certification ne peut intervenir qu'au moment où Bleu sera entièrement étanche vis-à-vis de Microsoft. C'est un point central conditionnant son attribution.
Vous avez évoqué deux data centers. Ce qui signifie deux régions cloud...
De ce point de vue le déploiement va être effectué en deux temps. D'abord, nous mettrons en place deux zones de disponibilité : l'une basée en région parisienne et baptisée France Centre, l'autre dans le sud de la France et baptisée France Sud. Elles seront installées dans les deux data centers déjà évoqués. D'ici la fin du second semestre 2026, France Centre sera étendue à trois zones de disponibilité hébergées dans des centres de données chacun distant de 50 km. Quant à France Sud, elle sera alors positionnée comme un site de reprise après sinistre.
Quels sont vos objectifs financiers ?
Globalement, nos tarifs en catalogue seront de 10% à 15% plus élevés que les prix affichés par Microsoft. Dans le détail, nous avons un accord signé avec Microsoft sur une période de 10 ans. Partant de là, nous avons un business plan précis qui coure jusqu'en 2035. Ce que je peux dire c'est que l'investissement réalisé au départ est très conséquent. Il sera rentabilisé sur plusieurs années. C'est un aspect que Microsoft tout comme les deux actionnaires de Bleu que sont Capgemini et Orange ont bien en tête.
Jean Coumaros est le CEO de Bleu depuis le lancement de la société en janvier 2024. Diplômé de l'ESCP, il débute sa carrière chez BNP Paribas comme analyste de crédit en 1993. En 1995, il est nommé consultant en services financiers au sein de Gemini Consulting. Il rejoint le cabinet de conseil Oliver Wyman en 2005. En 2008, il est promu partner - head of retail & business banking pour la région EMEA. Avant de rejoindre Bleu, il passe chez Capgemini en 2011 d'abord comme patron du conseil en services financiers, puis comme chief transformation officer du groupe.