Laurent Cheyssial (CTO Free Pro) "Notre qualification SecNumCloud devrait intervenir début 2025"

Le CTO de la branche entreprise de l'opérateur télécoms revient sur sa stratégie en matière de cloud privé et d'edge computing.

JDN. Comment se présente votre offre de cloud privé ?

Laurent Cheyssial est CTO de Free Pro. © Free Pro

Laurent Cheyssial. Notre stratégie est de proposer à nos clients des environnements sous contrôle qui leur permettent de se concentrer sur leur cœur de métier. Sous contrôle signifie d'abord sur une infrastructure sécurisée d'un point de vue physique. Pour ce faire, nous nous adossons à nos data centers qui sont localisés en France et exploités par nos équipes sous notre responsabilité directe. Ensuite, en fonction du souhait du client, nous pouvons monter dans les couches. Nous sommes ainsi amenés à couvrir la virtualisation et le stockage, et éventuellement les machines virtuelles et les containers, jusqu'aux middlewares type base de données. On place le curseur au bon niveau en fonction de ce que le client final souhaite nous déléguer.

Nous sommes ainsi à même de prendre en charge des systèmes critiques, tels qu'un ERP ou un système de gestion des stocks. Nous traitons cette criticité à plusieurs niveaux. D'abord en sécurisant les données. Ensuite en proposant un taux de disponibilité adapté. Ce qui passe par la redondance des architectures.

Vous êtes amenés à prendre en charge cette prestation à 100%...

Nous pouvons effectivement prendre entièrement en charge la prestation. L'idée est de déployer et opérer les solutions sur nos propres infrastructures au sein de nos propres data centers. Des centres de données dans lesquels nous sommes certains de bénéficier du niveau de certification suffisant.

Quelles technologies de cloud utilisez-vous ?

Traditionnellement, nous tournons majoritairement sur VMware. Pour le futur, nous pourrions évoluer vers une autre offre en parallèle, par exemple OpenShift. Cette réflexion fait suite au changement de stratégie intervenu chez VMware suite à son rachat par Broadcom (ce changement concerne notamment le virage vers une politique de licence plus onéreuse, ndlr). Free Pro est intégré à la catégorie Pinnacle des partenaires de VMware. C'est une catégorie très sélective qui concerne deux à trois acteurs par pays.

Mais c'est presque une question secondaire. Globalement, nous analysons ce qui est déployé en interne chez nos clients et nous cherchons à savoir comment nous pouvons négocier la transition vers un cloud privé que nous hébergeons.

Avez-vous engagé un processus de qualification SecNumCloud ?

Le process a été lancé. Nous sommes actuellement en cours de qualification sur notre offre de cloud privé. Elle devrait aboutir début 2025. Les systèmes certifiés cibleront les clients étatiques et les opérateurs d'importance vitale, notamment.

Que proposez-vous en matière d'edge computing ?

Nous disposons d'une offre dans ce domaine. Elle a d'ailleurs été retenue dans le cadre de France 2030 par la BPI pour un appel à manifestation d'intérêt. Nous l'avons baptisée UCPE pour Universal Customer Premise Equipment. Il s'agit d'une solution cloud d'orchestration de fonctions IT installée chez nos clients. Elle se présente sous la forme d'un serveur X86 sur lequel il est possible de déployer à la volée des services virtualisés : un routeur, un pare feu, un serveur de fichiers, un IPBX, une application métier... Le client pilote directement cet environnement. Il peut lancer et gérer les applications de son choix à partir d'un catalogue d'applicatifs. Ce qui lui évite à la fois d'avoir à intervenir physiquement sur site et de mettre en œuvre des systèmes de supervision verticaux.

Quels profils de client ciblez-vous ?

Nous sommes focalisés prioritairement sur les entreprises de taille intermédiaire et les grands comptes. Sachant que nous avons une part importante de notre chiffre d'affaires qui provient également du secteur public. Nous hébergeons par exemple des services de la Gendarmerie nationale. Côté sociétés privées, nous comptons des entreprises de prévoyance parmi nos clients, ce qui s'explique par notre label HDS (pour hébergeur de données de santé, ndlr). Nous avons également des clients dans le tourisme, la confection, le retail, l'industrie, le digital, la grande distribution, l'associatif...

Quid des télécoms ?

Notre chiffre d'affaires se répartit à parts égales entre le cloud et les télécoms. Les télécoms, via la 4G, la 5G, les lignes fixes et nos backbones, nous permettent de collecter et de transporter la donnée, et le cloud de la traiter. Ce qui nous permet de gérer l'information de bout en bout. Si elle doit être traitée sur site, nous proposons notre offre d'edge computing. Si elle doit être traitée de manière centralisée, nous mettons en avant notre environnement de cloud privé.

Sur le front du cloud public, vous collaborez aussi avec une autre entité d'Iliad qui n'est autre que Scaleway...

Effectivement. Scaleway permet à nos clients qui le souhaitent de bénéficier d'un environnement hybride. Ils peuvent  placer leurs applications critiques sur notre cloud privé tout en faisant appel à Scaleway pour leur besoin de développement et d'agilité sur certaines briques logicielles. Dans le même temps, Free Pro met en œuvre des liens et une hybridation avec Amazon Web Services, Microsoft Azure, Google Cloud et Oracle Cloud. Nous sommes ainsi connectés à tous ces hyperscalers.

Laurent Cheyssial est CTO de Free Pro (ex-Jaguar Network), la branche d'Iliad ciblant les entreprises. Précédemment, il a travaillé chez Neuf Cegetel avant la fusion du groupe avec SFR. Il y a occupé les postes de directeur d'unité métier et de deputy general manager.