Mykhaïlo Fedorov (Ministre de la transformation digitale ukrainien) "Nous avons fait tomber plus de 80 systèmes russes"
Lors du Paris Cyber Summit, en duplex depuis Kiev, le ministre de la Transformation digitale ukrainien Mykhaïlo Fedorov a tenu une conférence de presse. Le JDN retranscrit une partie des échanges.
JDN. Comment avez-vous organisé votre cybersécurité ?
Mykhaïlo Fedorov. En matière de cybersécurité, nous avons créé des infrastructures pour nous défendre mais également pour avancer et nous donner les moyens d'aider la population ukrainienne à s'organiser. Nous lançons, par exemple, chaque semaine, un nouveau service pour nos citoyens. Pour ça, nous nous sommes appuyés sur DIA, qui veut dire "Action" en ukrainien, une application qui existait déjà et recense actuellement 17,5 millions de citoyens.
Avez-vous quelques exemples à nous donner ?
Oui, avec DIA, les personnes en zone de combat ou éloignées de leur ville d'habitation peuvent accéder en quelques clics à des services dédiés à la situation de guerre comme déclarer les dommages causés à leur logement et effectuer une demande de dédommagement. Ce sont des procédures rapides et simples car les utilisateurs sont géolocalisés. Le système intègre également la réception de paiements électroniques ou encore la possibilité de faire des signalements en tous genres. Nous avons également mis à disposition un chatbot qui, encore une fois grâce à la géolocalisation, informe en temps réel les citoyens des mouvements connus des troupes Russes.
Malgré l'absence de grandes offensives cyber, vous parlez de 1ère cyberguerre mondiale, pourquoi ?
Il est encore difficile de communiquer précisément sur tout cela. Pour l'heure, s'il n'y a pas eu de victoires significatives côté russe, il y a eu un grand nombre d'offensives vis-à-vis de nos infrastructures critiques, de nos médias et de notre système bancaire. Côté ukrainien, nous avons fait tomber plus de 80 systèmes russes, comme RuTube, le Youtube Russe, le site du FSB. Mais, pour des raisons stratégiques évidentes, nous ne pourrons communiquer sur nos différents succès qu'après la victoire.
Comment avez-vous coordonné vos cyberattaques, notamment vis-à-vis de l'IT Army constituée essentiellement de bénévoles ?
Nos cibles sont recensées et publiées sur des canaux Telegram pour permettre aux bénévoles de savoir où mener des cyberattaques. Cela permet, notamment, d'éviter les dommages collatéraux. Parmi les choses notables, il y a eu l'attaque contre les systèmes russes de taxation visant à désorganiser la vente d'alcool. Notre objectif était d'installer un climat de sobriété pour aider la population russe à faire face à la propagande. Enfin, l'importance des nouvelles technologies dans nos sociétés m'amène également à utiliser l'expression de cyberguerre. Le fait que les entreprises du numérique du monde entier quittent petit à petit le sol russe est très fort et aura un impact certain. L'avenir appartient clairement aux technologies et les bloquer ramène les Russes 30 ans en arrière. En tout cas, ce qui est sûr, c'est que leur puissance numérique a clairement été surévaluée.