Les limites du no code... et les solutions pour y faire face

Les limites du no code... et les solutions pour y faire face Scalabilité, personnalisation, dépendance aux plateformes... Les applications de développement sans code multiplient les points faibles. Des solutions émergent néanmoins pour y faire face.

Depuis une petite dizaine d'années, les solutions de développement sans code ont fleuri sur le marché. Collaboratif, automatisation, développement applicatif, développement web... Elles se déploient désormais dans de multiples domaines. Leur promesse ? Mettre la création d'interfaces et de logiques applicatives entre les mains des collaborateurs sans bagage technique en programmation. Historiquement, ces solutions n'en affichent pas moins des points faibles dont certains se sont estompés au fil des années.

Une scalabilité limitée

Les outils de développement no code sont réputés non-scalables c'est-à-dire difficilement à même d'encaisser de larges volumes de trafic. "Depuis 2023-2024, les acteurs du marché proposent de plus en plus d'abonnements ciblant les projets importants initiés au sein d'entreprises de taille moyenne, voire grande", explique Louis Adam, fondateur de l'agence Hyperstack. Frédéric Mosland, fondateur de l'agence Numit, renchérit : "Chez nous, nous avons par exemple créé un outil de gestion pour une école. Basé sur la technologie Bubble, il peut supporter jusqu'à 500 utilisateurs sans problème. Il permet aux professeurs d'organiser leurs formations, de saisir les relevés de note. Quant aux élèves, ils peuvent y consultés leur planning, leurs résultats." Frédéric Mosland ajoute que "la plateforme de mise en relation de freelance Comet est restée des années sous Bubble avant de basculer sur une solution à base de code."

Force est de constater qu'on atteint assez vite un plafond de verre. "Ces produits étant le plus souvent tarifés sous forme de licences à l'utilisateur, ils restent peu adaptés à des déploiements à très grande échelle sur des niveaux grand public", constate Louis Adam.

Ces derniers mois, on commence à voir apparaître des solutions no code qui ne sont plus tarifées à l'utilisateur. Le prix pourra par exemple dépendre de la RAM ou du volume de données à l'instar de Bubble. A la différence des produits traditionnels, elles pourront être hébergées en interne ou sur un cloud public. "Dans cette catégorie, on retrouve également Xano (qui s'adosse à la base de données PostgreSQL, ndlr), WeWeb ou n8n", pointe Louis Adam. Cette catégorie d'outils regroupe le meilleur des deux mondes : elle répond aux standards de l'industrie (scalabilité quasi-illimité, coûts mieux maitrisés...) tout en permettant le développement sans code.

Une personnalisation faible

Par nature, les outils de développement no code se révèlent peu adaptés en termes de personnalisation. "Nombre de solutions comme Airtable, Glide ou Softr atteindront là encore un plafond de verre", regrette Louis Adam. "On trouve néanmoins des applications comme WeWeb qui introduisent des blocs de code ad hoc permettant d'adapter le produit fini en termes de look and feel." C'est également le cas de Bubble qui permet de programmer des plugins écrits en Javascript pour parfaire une application en fonction de besoins spécifiques. La plateforme propose par ailleurs une bibliothèque de centaines d'extensions préconfigurées.

Autre possibilité : faire appel à une API en vue de déporter un traitement complexe sur une application tierce. Revers de la médaille, ces solutions low code, plus flexibles, se révèlent de facto plus chères en termes de mise à œuvre.

Une dépendance aux plateformes

Il s'agit là de la principale contrainte du no code. Une fois le projet lancé, il sera par définition difficile de se détacher d'un environnement captif en termes de données. Cette contrainte se décline selon plusieurs axes. D'abord, les entreprises utilisatrices sont dépendantes de la politique tarifaire de l'éditeur. "Nous conseillons d'ajouter dès le départ une fourchette de budget supplémentaire pour éviter toute mauvaise surprise. Mais aussi de définir un cahier des charges précis visant à anticiper l'évolution en termes de nombre d'utilisateurs et de fonctionnalités qui peuvent vite faire monter la note", reconnaît Louis Adam.

Autre contrainte corolaire, et pas des moindres : dans le cas d'une offre no code en mode SaaS, le fournisseur sera de facto propriétaire de l'ensemble du code généré. "C'est évidemment le cas de Bubble qui n'est déployable en local que dans sa version la plus haut de gamme à tarifs négociés. Mais cet acteur qui a été créé en 2012 a prouvé sa capacité de persistance dans son édition cloud. La dépendance est donc bien présente, mais elle n'en reste pas moins maîtrisée", estime Frédéric Mosland. Face à ce modèle propriétaire, des applications d'automatisation comme n8n proposent un modèle fair source.

Une gestion des données non-conforme

La plupart étant américaines, les solutions de développement no code hébergent en général les données de leurs utilisateurs aux Etats-Unis. "En passant par des abonnement Business, on pourra souvent bénéficier d'une localisation des informations en Europe", précise Louis Adam. Cette option laisse néanmoins la porte ouverte au Cloud Act américain selon lequel toute entreprise américaine doit donner accès aux données qu'elles hébergent, quelle que soit leur localisation, sur simple injonction de justice.

Des applicatifs comme WeWeb ou n8n, déployables en local dans leur version d'entrée de gamme, permettront de passer outre les problématiques liées à la gestion des données et d'être pleinement en phase avec le RGPD. Principal avantage associé, elles seront aussi moins chères. En mode SaaS, une solution comme n8n sera également moins onéreuse qu'un Make. "Le prix de Make est calculé en fonction de chaque opération réalisée alors que n8n est tarifé en fonction du scénario. Ce qui, au final, permet de diviser les coûts par 10", détaille Louis Adam.

Un manque de méthodologie

Autre frein à l'émergence du no code en entreprise, cette approche impliquera de mettre en place une méthodologie. Ce que les personnes non-techniques à qui le no code est en principe destiné n'ont pas l'habitude d'appliquer. "Sans méthodologie, on risque d'aboutir à des erreurs dans le développement, dans la mise en production ou dans les mises à jour", insiste Louis Adam. "Comme un projet de développement classique, nous recommandons de mettre en place une analyse des besoins, un cahier des charges…"

L'enjeu ? Combiner le meilleur des deux mondes. D'un côté, l'entreprise utilisatrice bénéficiera des avantages du no code, et notamment de sa capacité de déploiement et d'itération rapides. De l'autre, elle tirera parti des points forts du développement traditionnel. C'est-à-dire sa capacité à structurer le projet, en réalisant notamment un diagramme de base de données, des maquettes...