Kathrin Parmentier (Zalando.fr) "Zalando a engrangé au moins 120 millions d'euros en France en 2011"

Mode, beauté, maison... L'e-marchand allemand réalise la moitié de son chiffre d'affaires hors du segment des chaussures. Sa directrice France détaille sa stratégie.

JDN. Que pèse aujourd'hui Zalando, en France et dans le monde ?

Kathrin Parmentier. Zalando est présent sur 10 marchés : l'Allemagne, l'Autriche, la Suisse, les Pays-Bas, la France, l'Italie, le Royaume-Uni, la Suède, la Belgique depuis trois semaines et l'Espagne depuis une semaine. Notre chiffre d'affaires monde s'est élevé à 160 millions d'euros en 2010 et à 200 millions d'euros au premier semestre 2011. Nous ne clôturerons qu'en juillet prochain l'exercice 2011.

En France, où notre audience se situe autour de 9 millions de visiteurs uniques mensuels [Médiamétrie donne 3,4 millions de visiteurs uniques à Zalando au mois d'avril 2012, NDLR], nous avions prévu de réaliser 120 millions d'euros de ventes en 2011. A priori nous les avons dépassés. En septembre dernier, nous avions atteint un rythme de 12 millions d'euros de chiffre d'affaires mensuel.

Quels sont les grands chantiers de Zalando actuellement ?

Au niveau international, nous nous apprêtons à ouvrir la Pologne dans quelques semaines et la Turquie au mois de juillet. En Allemagne, nous testons une marketplace, qui en réalité tient davantage du programme de partenariat que de la place de marché. Pour l'instant, nous fonctionnons de cette manière avec une demi-douzaine de marques de sport, qui vendent donc sur Zalando.de mais conservent leur stock et se chargent de l'expédition. En France, nous poursuivons nos efforts de communication, notamment au travers de notre magazine trimestriel, que nous insérons dans les commandes en tant qu'outil de fidélisation et dont le troisième numéro paraîtra bientôt.

Enfin, nous continuons à étendre notre offre. Après la chaussure, nous avions successivement lancé l'habillement, la beauté et le sport. Cette année nous avons lancé la maison. Et bien sûr nous approfondissons les catégories existantes. Ainsi, nous comptons actuellement 1300 marques de mode et en référencerons 1500 en septembre, dont de nouveaux grands noms comme Ralph Lauren. Parmi nos marques, environ 200 sont françaises, mais nous les commercialisons aussi en dehors de France. Centraliser notre logistique en Allemagne plutôt que de diviser notre stock par pays nous permet de proposer une offre plus large partout. Nous venons d'ailleurs d'investir 100 millions d'euros dans un troisième entrepôt, à Erfurt, qui sera mis en service en août.

Quelle part représente la chaussure dans vos ventes ?

Elle ne compte plus que pour 50% de notre chiffre d'affaires, au niveau mondial comme en France. La ventilation de nos ventes par catégorie de produits est d'ailleurs très semblable dans l'Hexagone et globalement. La seule véritable spécificité française réside dans les accessoires. Cette catégorie croît particulièrement vite ici, encore bien plus que dans les autres pays.

A quelles particularités du marché français Zalando a-t-il dû s'adapter ?

La principale différence entre la France et l'Allemagne se situe au niveau des modes de paiement. Les consommateurs français préfèrent nettement régler leurs achats en ligne par carte bancaire, quand les Allemands opteront majoritairement pour la facturation. De plus, la possibilité de payer par chèque est encore très appréciée des Français. Autre différence importante entre les deux marchés, le taux de retour, bien sûr, qui est très inférieur ici. Le reste est assez minime. Par exemple, les Allemands naviguent plutôt par couleur et par taille et les Français par prix et par marque. Mais cela ne nécessite que de petits ajustements.

Zalando a lancé sa propre collection pour la saison actuelle. Voulez-vous marcher sur les traces du britannique Asos, qui réalise plus de la moitié de son chiffre d'affaires avec ses marques propres ?

En tant que distributeur, nous détenons une tour d'observation idéale pour sentir les tendances de la mode. Nous avons donc décidé de mettre à profit cet avantage. Nous ne dévoilons pas nos objectifs de ventes, pour l'instant nous cherchons avant tout à gagner en légitimité en matière de mode.

Nous avons débuté petit pour la saison printemps-été actuelle, mais nous allons doubler le nombre de nos références propres pour la saison prochaine et en produire 400. Nous avons des collections de chaussures, de textile homme et femme, de sport, d'articles pour enfants. Nous couvrons donc toutes les catégories présentes sur Zalando en dehors de la beauté et nous réfléchissons à la maison. Cette offre en propre marche très bien dans tous les pays.

Comment les marques prennent-elles le fait que vous les concurrenciez ?

Bien ! Elles ne nous considèrent d'ailleurs pas comme des concurrents. Nous ne les copions pas et, d'autre part, cet ajout au catalogue du site contribue à accroître son audience, ce qui leur bénéficie aussi.

Combien êtes-vous, chez Zalando ? Quels liens conservez-vous avec Rocket Internet ?

Nous sommes plus de 1000 personnes, sans compter la logistique, et notre siège est à Berlin. Nous avons un bureau d'une trentaine d'acheteurs à Paris. Quant à Rocket Internet, l'incubateur des frères Samwer nous a beaucoup aidés au démarrage, en 2008, mais nos opérations sont aujourd'hui complètement indépendantes de leur structure. Rocket est simplement l'un de nos actionnaires.


Kathrin Parmentier, 30 ans, est diplômée de l'IEP de Strasbourg, de l'Institut Technologique de Mexico et d'un MBA de l'Essec. Elle débute sa carrière en 2007 en tant que consultante chez McKinsey. En 2010 elle rejoint Zalando en tant que directrice des achats pour la France. En 2011 elle en reprend le marketing et en avril 2012 elle est nommée country manager France.