Marc Schillaci (Oxatis) "Les petits sites vont continuer à tirer la croissance de l'e-commerce"

6500 marchands utilisent la solution SaaS d'Oxatis pour vendre en ligne. Son PDG observe une véritable appropriation de ce canal par les PME, qui disposent de plus en plus d'outils pour s'y exprimer pleinement.

JDN. Comment anticipez-vous les mois à venir pour les petits sites marchands ?

Marc Schillaci. Le volume de ventes traité par nos clients augmente très fortement. C'est d'ailleurs logique : d'après la Fevad, les grands sites enregistrent une croissance avoisinant les 10 % et l'e-commerce en général plus de 20 %. Ce sont donc les petits et moyens sites marchands qui tirent la croissance du secteur. Plutôt qu'une reprise ou une recrise, on assiste chez les commerçants à une prise de confiance. Ils sont en train de s'approprier ce nouveau canal.

En France 3,5 % du commerce de détail se fait sur Internet, sur 70 000 sites marchands actifs. Au Royaume-Uni, 8 % des ventes de détail se font en ligne et les sites marchands sont trois fois plus nombreux que chez nous. Ce retard, nous sommes en train de le rattraper. D'autant que l'essor de la vente en ligne est un phénomène de fond, inéluctable. En début d'année, eBay a prédit qu'en 2020, la moitié du commerce de détail se ferait sur Internet. Même avec une erreur de 10 ans, c'est un chiffre incroyable.

Ceux qui pourraient avoir plus de difficultés sont les sites de taille moyenne. Par exemple, Le Lutin Rouge ou l'Avenue des Jeux vont souffrir davantage de l'arrivée de Toys 'R Us sur le Web marchand qu'un petit site de jouets en bois. On situe parfois ce ventre mou de l'e-commerce entre 5 et 50 millions d'euros de chiffre d'affaires. J'observe d'ailleurs aussi chez les petits sites une barrière autour de 100 000 euros de ventes par mois. Elle peut-être d'ordre logistique si le marchand n'a pas anticipé sa croissance, un e-marchand qui commence à devenir visible risque aussi de donner des idées à d'autres...

Quelles tendances observez-vous en cette rentrée, chez les petits e-commerçants ?

La grande tendance que nous constatons est la convergence entre le physique et le virtuel. Par exemple, les pure players font une première incursion dans le monde physique en organisant une manifestation et, dans un deuxième temps, ouvrent un point de vente. Une étude que nous avons menée en janvier montre que 20 % des pure players utilisant notre solution désirent ouvrir un point de vente physique ! Quant à ceux qui ont un magasin, ils voient de plus en plus le Web comme une opportunité.

Cette prise de conscience est nouvelle. Pendant des années, le bruit ambiant prétendait que l'e-commerce détruisait le petit commerce. Or depuis un ou deux ans, on s'aperçoit que ce n'est pas vrai. Au contraire du monde physique, les premiers commerçants sur Internet ont été gros - Amazon, Fnac...-, puis moyens, puis petits. Cette impression venait sans doute de là. Aujourd'hui, la géolocalisation par exemple permet aux petits sites d'être bien référencés, car Google sait localiser les IP. Cela ne fera que progresser avec la géolocalisation sur mobile. Dorénavant, les petits commerçants se disent que cela peut valoir la peine de vendre en ligne : un bon référencement n'est pas forcément onéreux et globalement, les outils à leur disposition sont moins chers et plus faciles à utiliser qu'auparavant.

C'est aussi parce que les petits e-commerçants utilisent désormais les mêmes techniques que les grands que l'on voit l'export lentement décoller. En Europe principalement, mais aussi dans les pays francophones comme l'Afrique du Nord et le Canada, voire beaucoup plus loin lorsque les produits commercialisés sont typiquement français.

Quels sont les projets d'Oxatis, vos chantiers en cours ?

L'actualité, c'est d'abord notre levée de fonds de 4 millions d'euros réalisée en juin (lire l'interview de Marc Schillaci : "Oxatis va encore gagner en modularité", du 22/06/2010). Nous sommes aussi en train de structurer l'équipe, avec l'arrivée dans dix jours de Philippe Leroy, qui quitte EBP pour prendre la direction générale d'Oxatis. Il va se passer avec la vente en ligne ce qui s'est produit avec la comptabilité : il s'est peu à peu créé tout un écosystème qui a mis la comptabilité à la portée du chef d'entreprise grâce aux ERP. C'est aussi pour cette raison que Philippe Leroy nous rejoint. D'après une étude Gartner, 10 % seulement des sites marchands sont actuellement construits en mode SaaS, mais ils seront 40 % dans 2 ans.

Par ailleurs, nous publions une mise à jour majeure de notre solution le 14 septembre. Aujourd'hui, l'architecture des solutions d'e-commerce n'est pas structurée pour gérer facilement la recherche de produits par taille et couleur, ou encore les ventes privées. Si on veut que le consommateur puisse demander "montrez-moi vos chaussures rouges", c'est encore plus compliqué. Nous avons donc beaucoup travaillé sur le modèle de données, ce qui a eu des répercussions aussi bien sur le système de gestion que sur l'interface avec le marchand. Cette mise à jour permettra également d'interfacer la gestion de son site avec des ERP beaucoup plus lourds qu'avant, comme SAP. Cela peut sembler obscur ou très technique, mais c'est très important. L'intégration avec les ERP constitue l'évolution la plus importante des solutions e-commerce.

Enfin, dans les semaines à venir, Oxatis prendra une initiative sur le mobile. Tous nos e-commerçants ont des besoins nomades forts. Nous allons leur dédier une application iPhone qui les aidera dans leur gestion multicanale.

Marc Schillaci est étudiant à Paris en 1981 lorsqu'il développe et vend le premier logiciel de planification pour PC : Plan IT. A partir de 1984, il dirige sa société de services, DFL. En 1997, il part en Californie fonder Ebz.com, plateforme de vente en ligne destinée aux PME qui compte environ 15 000 clients. En 2001, il cède sa société et rentre à Marseille créer Oxatis.