La livraison, un enjeu primordial de l'e-commerce en plein bouleversement

La livraison, un enjeu primordial de l'e-commerce en plein bouleversement Boîtes à lettres connectées, coffres de voiture transformés en consignes, flottes de livreurs BtoC ou CtoC... De nombreuses innovations ont commencé à remodeler le "dernier kilomètre".

L'e-commerce s'est construit sur une guerre des prix, puis s'est ajoutée une guerre des services, les sites marchands cherchant à se différencier par leur relation client. L'un de ces services est aujourd'hui plus primordial que jamais : la livraison. "Un inconvénient majeur des commandes en ligne réside est que le consommateur n'entre pas immédiatement en possession de ses achats, analyse Marc Lolivier, délégué général de la Fevad. L'e-commerce essaie donc de gommer ce handicap par le biais de livraisons express ou intelligentes, qui s'adaptent à ses contraintes et disponibilités. Un travail complexe et coûteux.

Résoudre la difficile équation du coût

Comment résoudre cette équation du coût et de la demande pour ce type de service ? "Le click&collect a d'abord apporté une vraie réponse, associant rapidité et gratuité de la livraison pour l'acheteur et accroissement du trafic en magasin pour l'enseigne, souligne Marc Lolivier. Mais on voit aussi se développer de nombreuses autres possibilités pour adresser les multiples besoins des acheteurs." Aux magasins, aux points de retrait et au domicile des consommateurs s'ajoutent maintenant des consignes automatiques (Packcity de Neopost ID) parfois propres aux enseignes (Darty), mais aussi des réceptacles aussi inventifs que des coffres de voiture, comme l'a imaginé Volvo.

Concrètement, le propriétaire est prévenu sur une application dédiée que le livreur approche de la voiture, il accepte que soit générée la clé numérique qu'utilisera le livreur pour ouvrir le coffre et déposer ou reprendre un colis, la clé numérique cesse d'exister et il n'a plus qu'à récupérer la commande dans son coffre quand il le souhaitera. Une façon de se faire livrer où que l'on soit, même quand on est absent... et pour l'e-commerçant de réduire considérablement le coût des livraisons manquées. Même les boîtes à lettre évoluent et se connectent sur un principe semblable. Ainsi, Renz teste depuis trois mois dans un immeuble parisien des boîtes à colis que des serrures électroniques permettent de privatiser le temps d'une livraison et d'ouvrir avec un badge ou un smartphone NFC.

Les magasins physiques seront partie prenante de ces évolutions

Mais la révolution du dernier kilomètre va bien plus loin. D'abord au travers des services de type eBay Now ou Google Shopping Express, qui aux Etats-Unis déploient des flottes de livreurs allant récupérer une commande passée en ligne auprès d'un magasin physique pour l'apporter à l'acheteur. Ces nouveaux systèmes de livraison ne se développent donc pas au seul bénéfice des sites marchands, mais de tous les points de vente. "Pour l'instant, l'e-commerce représente 7 à 8% des ventes de détail, rappelle Marc Lolivier. Mais en prenant l'habitude de se faire livrer y compris depuis des boutiques physiques, les consommateurs vont accroître les volumes de livraisons, favoriser l'émergence de nouveaux modèles économiques et sans doute faire évoluer tout le secteur de la livraison."

Le délégué général de la Fevad note qu'il est intéressant aussi de constater que de grands acteurs du Web et de l'e-commerce investissent dans leurs propres systèmes de livraison. "En sera-t-il de même en France et en Europe où le secteur est très concentré sur les acteurs historiques ? L'investissement d'Amazon dans Colis Privé peut le laisser penser."

L'économie collaborative se propage aussi dans la livraison

Et là encore, la "disruption" du dernier kilomètre se poursuit encore bien davantage. Présent dans 10 grandes villes américaines et bientôt 7 de plus, Instacart propose à des particuliers de parcourir les supermarchés et épiceries sélectionnées pour faire les courses de cyberacheteurs qu'ils sont ensuite priés de livrer dans l'heure, moyennant une rémunération de 3,99 dollars. Confier le trajet final de la livraison à des particuliers est d'ailleurs une idée qui se répand. L'Américain Lyft propose déjà à ses utilisateurs de rechercher sur leur smartphone un conducteur pour un trajet court. Transporter des colis plutôt que des personnes apparaît comme une prochaine étape accessible très facilement. "Pour sa part, Uber vient de lancer à Manhattan une flotte de coursiers BtoB, note Marc Lolivier. La transposition d'UberRush au BtoC ne semble pas compliquée, d'autant qu'Uber fait aussi appel à des particuliers pour son service UberX." En France, plusieurs start-up s'essaient déjà à ce covoiturage de colis, comme Colis-voiturage.fr.

De même que l'équation du coût est essentielle pour les traditionnelles livraisons à domicile qui doivent encore gagner en rapidité, tous ces nouveaux services doivent également résoudre cette difficile question : comment financer tout cela, qui plus est lorsque les exigences des clients évoluent à l'inverse de leur pouvoir d'achat ? "La réponse passe par l'innovation... et par d'importants volumes", estime Marc Lolivier. C'est pour aborder toutes ces interrogations, réfléchir au futur de la livraison et aux services innovants qui s'apprêtent à bouleverser cette étape fondamentale de l'acte d'achat que la Fevad a invité plusieurs spécialistes à en débattre lors des Enjeux E-Commerce qu'elle organise le 26 juin à Paris. Thierry Supernat (Renz) présentera son projet de boîtes à colis connectées puis Johan Maresch (Volvo Car Group) démontrera, voiture à l'appui, son système de livraison dans le coffre, avant d'échanger avec Alain Férard (Neopost ID) et François Béllanger (Transit-City) sur les bouleversements actuels et futur du dernier kilomètre. Les inscriptions sont ouvertes sur le site de l'événement.