Automates bancaires et cashback : antagonisme ou complémentarité ?

Le "cashback", en attendant une terminologie française appropriée, c’est la possibilité pour les commerçants de fournir des espèces à leurs clients lors d'un paiement par carte. Concrètement cela se passe au moment du passage en caisse, le client peut ainsi demander à payer plus pour récupérer le trop-plein versé en espèces.

Le cashback... Si cette pratique, en provenance des Etats-Unis, est déjà répandue dans certains pays européens tels que l'Allemagne, l'Espagne ou encore le Royaume-Uni, elle commence à émerger en France.

Cette facilité est un moyen de combler un vide crée par une certaine désertification bancaire en zone rurale où la fermeture des agences et l’accès à un DAB sont parfois compliqués. Il est à noter que les prémisses du cashback ont vu le jour, en France dès 1989, via les "points verts" mis en place par le Crédit Agricole. Ce service avait pour objectif de faciliter l’accès aux retraits d’espèces dans des zones éloignées des agences bancaires ou d’un distributeur. Des commerçants de proximité offraient alors à leurs clients la possibilité de retirer des espèces à partir du moment où ces derniers étaient titulaires d’un compte au Crédit agricole.

En 2018, en proposant cette commodité, les commerçants espèrent attirer un public nouveau. De plus, ils peuvent également l’envisager comme une source de revenus supplémentaires car ceux qui le souhaitent peuvent le facturer. Par ailleurs, le cashback peut les aider à gérer leurs encours de caisse. 

Cependant, il reste encore de nombreuses inconnues à définir autour de ce service en France. La mise en place d’un plafonnement du montant des espèces, qui serait limité, est indispensable et doit s’accompagner de l’installation de nouvelles évolutions techniques sur les terminaux de paiement pour tracer cette gestion des espèces. Si le Sénat a adopté en juillet dernier le texte transposant la dernière directive européenne sur les services de paiement (DSP2), légalisant la pratique du retrait d’espèces complémentaires auprès d’un commerçant lors d’un achat en magasin, un décret devrait être publié prochainement pour en définir plus clairement les contours. Celui-ci devrait notamment fixer le montant minimal de l’achat permettant de retirer des espèces en plus ainsi que le montant maximal de liquide qu’il sera possible d’obtenir par cashback. Cela a notamment pour objectif d’éviter des risques de blanchiment d’argent avec la remise dans le circuit de billets falsifiés.

La distribution d’argent liquide par les commerçants est avant tout à envisager comme un système complémentaire puisque le parc de distributeurs automatiques de billets n’est pas amené à être augmenté au cours des prochaines années. Le remaillage actuel des agences bancaires entraîne une véritable émulation technologique pour maintenir un niveau de services satisfaisants pour tous. Parmi les pistes étudiées, les solutions développées en marque blanche pour le compte d'un autre établissement pourraient notamment avoir le vent en poupe. Il s’agit du partage par plusieurs institutions financières du même emplacement et du même matériel pour réduire les coûts de fonctionnement. De plus, les clients peuvent faire appel aux services de plusieurs banques dans une même agence. Dans les zones rurales en particulier, un tel modèle pourrait permettre de maintenir l’accès à des automates bancaires.

Le cashback implique de fait la mise en place d’accords entre les banques et les commerçants pour gérer les flux d’espèces notamment l’approvisionnement de leurs caisses. La disparition présumée du cash n’est pas pour aujourd’hui malgré l’idée grandissante d’une société "sans cash" car ce dernier représente aujourd’hui plus de 68% des transactions contre 27% pour la carte bancaire[i] et concerne avant tout des achats du quotidien.

Un modèle économique reste donc encore à trouver car la gestion du cash a un coût. A contrario, aujourd’hui, le retrait sur un DAB est perçu comme un service gratuit par les usagers même si la carte bancaire et son usage sont facturés par les banques. Trop d’inconnus et de contraintes qui laissent à penser que l’automate bancaire n’est pas prêt de disparaître, bien au contraire puisqu’il fait partie intégrante du processus global de transformation des agences. En effet, au même titre que ces dernières, il est amené à évoluer voire à devenir un des pivots de la transformation du canal agence.