L'achat responsable ne repose pas uniquement sur le consommateur

Revalorisation du territoire, suppression des plastiques à usage unique et mise en place du score carbone : la convention citoyenne pour le climat (C.C.C) et le plan de relance du Gouvernement veulent "responsabiliser" le secteur agroalimentaire, du producteur au consommateur.

Un label unique du paysan au consommateur

Depuis plus d’une décennie, le qualificatif de « paysan » retrouve ses lettres de noblesse, au dépend de celui plus « productiviste » d’agriculteur. Les annonces du Gouvernement sur la réhabilitation des haies, ou les propositions de la C.C.C (prairies permanentes, préservation de la biodiversité…) esquissent les contours d’un métier proche sémantiquement de paysan : Conservateur du patrimoine rural.  Ce patrimoine c’est la biodiversité, la fertilité durable des sols, la défense des écosystèmes contre les intrants chimiques et les pesticides. Outre la « pure production agricole », ce service rendu ne mérite-t-il pas une rémunération ?

Aujourd’hui, les multiples saisies requises par la jungle de labels privés (ciblées par la proposition SN 5.3.1 de la C.C.C) suscitent l’exaspération. Le paysan étant le premier maillon de la chaîne d’information, il gagnerait davantage encore en légitimité si une base unique et transparente d’informations centralisait les données nécessaires à la labellisation.

A l’autre bout de la chaîne de valeur, il est à parier que le consommateur, incité à un achat responsable, appréciera aussi la clarté d’un nettoyage dans tous les labels existants, voire d’un label unique officiel. Cela induira que les exigences du label soient auditables à travers tous les ingrédients des produits transformés. Mais encore faut-il que les transformateurs puissent processer et valoriser ces données.

Transformation des lieux de vente

Face à l’abondance du plastique la C.C.C propose le développement du vrac et des services de consigne. L’absence de corrélation entre produit et emballage donnera davantage de place encore au digital dans la consommation pour transmettre l’information (allergènes, ingrédients, nutrition, …). Développement des nouveaux rayons, adaptation du matériel de distribution et des supports de communication sont autant de défis pour fabricants et distributeurs. Aussi, l’impact sur les marques de grande consommation se traduira probablement par la diminution du nombre de références en magasin.

Parallèlement, le consommateur devra revoir ses habitudes. Achat de contenants, apprentissage alimentaire (contrairement aux produits préparés), services de consigne ; ces changements imposent à la clientèle de se prendre davantage en charge. Autant de contraintes allant à l’encontre du besoin exprimé par les consommateurs : passer le moins de temps possible à faire leurs courses. Besoin se traduisant aujourd’hui par la multiplication des drives.

Score carbone : un atout de confiance ?

Le besoin de réduire les gaz à effet de serre a fait naitre beaucoup d’approches différentes. Malheureusement, lorsqu’on regarde les chiffres, il est évident qu’on ne se focalise pas sur les bons problèmes. D’où la nécessité, d’une part de distinguer la production nationale (CO2 émis sur le territoire) et le coût carbone total (CO2 émis globalement pour produire une unité) ; d’autre part d’une approche sur la filière au global en plusieurs étapes :

1. Mettre en œuvre des mesures concrètes pour réduire les postes d’émission déjà identifiés (comme les engrais et la viande)

2. Pour chaque industriel, affiner les coûts carbone des produits sur la base d’un référentiel générique (coût carbone des emballages par exemple)

3. Etablir un bilan carbone plus précis en mettant à contribution les fournisseurs

Le premier défi est donc d’évaluer le CO2 score et de le calculer. Une fois mis en place, il faudra néanmoins rester vigilants aux effets de seuils qui mettront en avant des produits de moins bonne qualité. Pour baisser artificiellement l’empreinte carbone par unité de poids, le meilleur moyen est d’injecter de l’eau. Cette problématique est proche de l’étiquetage nutritionnel et du Nutriscore où les marques bas de gamme sont mieux notées que les produits concurrents, sans que ce soit lié à de meilleures qualités nutritives, au contraire. 

Il est évident que l’intention est de favoriser la « responsabilité » tout au long de la chaine de valeur. Mais si tout le monde est « pour le climat » en théorie, le consommateur reste sensible au prix et à l’effort qui lui est demandé. Ainsi, les questions de l’appropriation des mesures et de l’éducation du grand public sont essentielles pour la réussite de leur application. Les entreprises et institutions ont un rôle important à jour dans l’accès, la compréhension et surtout dans l’assimilation des informations et nouvelle méthode de consommation. D’autant plus que certaines recommandations qui dépassent la problématique du climat : utilisation des additifs, économie sociale et solidaire et enjeux éducatifs.