E-commerce : cessons de négliger l'expérience employé

Malgré la multiplication des Chief Happiness Managers et des Chief Experience Officers, la plupart des entreprises ne semblent pas avoir totalement pris la mesure des crispations induites par les expériences d'achat actuelles réalisées par leurs employés. Le retard par rapport aux standards du B2C est considérable.

Je vous propose d’effectuer l'expérience suivante : achetez-vous un smartphone personnel en passant par une des grandes plateformes d’e-commerce du marché, chronométrez-vous et notez votre sentiment général une fois l’achat effectué. Maintenant, réalisez le même achat pour remplacer votre smartphone professionnel en passant par les processus internes mis à disposition dans votre entreprise. Il y a fort à parier que cette seconde partie de l'expérience vous conduise à vous arracher les cheveux, sans pour autant être certain de recevoir un jour le fameux téléphone. 

Malgré la multiplication des Chief Happiness Managers et des Chief Experience Officers, la plupart des entreprises ne semblent pas avoir totalement pris la mesure des crispations induites par les expériences d’achat actuelles réalisées par leurs employés. Le retard par rapport aux standards du B2C est considérable. Le phénomène, plus lié à l’état d’esprit qu’à une question de technologie, demande une vraie transformation culturelle au sein des organisations. 

Passer le cap de l'expérience

“On s'habitue aux portes qui grincent”, disait un de mes clients dans le B2B. Dans beaucoup d’entreprises, c’est l’expérience des collaborateurs qui grince. Pour accéder aux jours de congés, réaliser des achats, ou même obtenir une information, les dispositifs sont souvent pensés comme des services mis à disposition « parce qu’il le faut bien ». On accumule les outils sans penser leur articulation et parfois sans trop d’égard pour les usages réels. Les équipes de ressources humaines ou IT en charge des Intranet intègrent ainsi trop rarement la dimension expérientielle, et l’on croise peu (ou pas) d’UX designers dans les organigrammes. Du côté des prestataires de services, le réflexe est également aux catalogues serviciels.  

Or, l’expérience fait la différence. Elle est critique pour l’utilisateur final en déterminant la qualité et la pérennité de la relation à une marque, comme dans un achat en B2C. Dans ce contexte, on peut dire que l’employé est un client comme un autre. Plus ses démarches quotidiennes sont fluides, plus le lien avec son employeur sera fort. Dans le même temps, il joue aussi un rôle de prescripteur auprès des différentes parties prenantes dans leur choix de souscrire à une solution en particulier.

Soigner le parcours employé

Pour faire entrer l’expérience au cœur des processus internes, la construction de parcours est fondamentale. Les attentes étant relativement similaires à celles du B2C, les organisations qui ont déjà investi dans des solutions technologiques pour leurs clients peuvent donc s’appuyer sur les mêmes logiques.

Grâce aux profils des salariés, les entreprises ont accès à un certain nombre de données. Ces dernières permettent d’imaginer le développement de services proches des standards du e-commerce : personnalisation, anticipation des besoins, recommandation. Ces informations permettent également de comprendre les besoins des utilisateurs et leurs pain points, afin d’adapter la gamme de services en fonction des attentes.

À terme, l’ambition est de proposer une expérience sans friction et mieux guidée. Au-delà de l’acte d’achat, c’est toute une série de gestes simples qui est concernée. Signatures électroniques, contenus post-achat et mesures de satisfaction sont des éléments largement négligés dans le cadre de l’expérience employé. 

Un enjeu de rétention pour les entreprises, et de compétitivité pour les éditeurs

Pour les entreprises, l’enjeu est évident. Dans la guerre des talents, conserver les meilleurs éléments est parfois aussi important que conquérir de nouveaux clients. Offrir une expérience de qualité est la manière la plus directe et tangible de prendre soin de ses employés. 

Pour les prestataires de services et les éditeurs de logiciels, c’est un marché à conquérir, voire à inventer. Pour utiliser un gros mot, le potentiel de disruption est immense. L’argument le plus immédiat est celui de la performance : des processus « sans couture » font gagner du temps. La capacité à fournir des recommandations précises sur les comportements d’achat des employés est également un formidable argument de vente sur un marché qui peine à innover… 

Pour tout le monde, cette transition implique un profond travail de transformation culturelle ainsi qu’une vraie réflexion sur la qualité des environnements de travail. Les outils sont là, le besoin est là, les intelligences et le savoir-faire aussi : ne reste plus qu’à assembler le tout pour réaliser cette transformation!