Réouverture des restaurants, quel avenir après la crise ?

Pour se démarquer dans ce contexte de forte croissance du secteur de la livraison, les restaurateurs devront intégrer au quotidien la gestion de deux flux, tout en misant sur une carte attrayante afin de se distinguer.

Depuis un an et demi, les périodes de confinement et de couvre-feu rythment le quotidien des restaurateurs. Alors que les professionnels du secteur préparent désormais avec hâte leur réouverture et que les réservations s’envolent, comment la reprise de la restauration à la sortie de ce troisième confinement se profile-t-elle ? 

Malgré les nouvelles mesures gouvernementales annoncées jeudi 29 avril, de nombreux  restaurateurs français restent dans l’incertitude quant à la réouverture de leur commerce, tant sur la date que sur les points d’étapes à respecter. Pour Hubert Jan, président de la branche restauration de l’Umih, “beaucoup laisseront leur établissement fermé jusqu’en septembre. Dans les lieux où les touristes étrangers représentent une grosse partie de l’activité l’été, le chiffre d’affaires ne sera pas au rendez-vous pour tenir”.

Selon une enquête en ligne réalisée par la société de conseil Akto commandée par les organisations patronales du secteur, 78% des quelque 3.000 professionnels, restaurateurs, hôteliers, patrons de cafés, traiteurs (90% d'indépendants) interrogés anticipent une baisse de “plus de 50%” de leur chiffre d'affaires en 2021. Ainsi, pour survivre, les restaurateurs ont dû s’adapter et apprendre à recourir au click and collect mais également à la livraison. Cette digitalisation forcée aura des conséquences durables sur l’après COVID et modifiera durablement les contours de la restauration.

Pérennisation de la livraison en France 

La livraison n’est pas un phénomène récent. Des grandes enseignes comme Domino’s ou Pizza Hut y ont recours depuis plusieurs décennies. Mais la pandémie et la fermeture des restaurants ont indéniablement contribué à accélérer cette pratique. 

En 2020, le nombre de clients ayant fait appel aux applications de livraison a augmenté de 25%. Les revenus de livraison de la plateforme au consommateur ont bondi de 32% en glissement annuel à 70,7 milliards de dollars. Au cours des trois prochaines années, ce chiffre devrait atteindre près de 97 milliards de dollars. 

“Si la réouverture des restaurants aura forcément un impact, dorénavant la livraison fait intégralement partie du parcours client et du business model d’un restaurateur” précise François Charpy, expert de la restauration et dirigeant de Food Strategy & performance. L’émergence des plateformes de livraison a durablement modifié l'écosystème de la restauration et redistribue les cartes du jeu : capacité d’accueil et emplacement ne sont plus synonymes de chiffre d’affaires. Il sera donc nécessaire d’apprendre à gérer la salle en même temps que les livraisons.

La dark kitchen oui, mais pas n’importe comment

Les succès commerciaux des différents modèles de dark kitchens, telles que Not So Dark, Dévor, Deliveroo Editions, sont l’illustration même de la réussite de ce modèle. Car même si le concept de dark kitchen existait avant la crise, il est indéniable que cette forme de restauration connaît son heure de gloire depuis le COVID-19. Une transformation profonde et structurante des fondamentaux de la restauration est donc à venir. Mais si ce modèle séduit grâce à la réduction des coûts locatifs et son agilité marketing (rapidité de changement de carte, offres flash...), il n’en reste pas moins que l’expérience client délivrée demeure immuable.  

A juste titre, les restaurateurs ont parfois pu penser que la dark kitchen était la solution à tout. Mais elle n’en reste pas moins un business, nécessitant un business model pour lequel il faut réfléchir aux bons produits, aux bons prix, tout en gardant en tête la satisfaction client. Menus, packaging, offres, délais… La livraison implique un sans faute dans son exécution, sous peine de voir sa clientèle se détourner vers ses concurrents.

La restauration, quel avenir ?

L’avenir de la restauration appartiendra à ceux qui auront appris à lire de la data. Machine learning, datamining ou encore CRM...Il est devenu nécessaire de savoir maîtriser ces outils et d’analyser les chiffres pour connaître les préférences des consommateurs, ajuster son offre et tirer profit de ce modèle. 

Pour se démarquer dans ce contexte de forte croissance du secteur de la livraison, les restaurateurs devront ainsi capitaliser sur leurs efforts pour intégrer au quotidien la gestion de deux flux, tout en misant sur une carte attrayante afin de se distinguer de leurs concurrents.

Avec l’émergence des restaurants virtuels, il peut également sembler intéressant de conserver son établissement physique afin de préserver le lien social, tout en créant en parallèle une autre marque, avec les mêmes produits. Ce schéma permettrait de proposer de nouveaux concepts de plats, intitulés différemment. Même local, mêmes produits, même staffing mais des coûts considérant réduits.