Un an après, comment les retailers ont tiré profit des confinements

Un an après, comment les retailers ont tiré profit des confinements Drives, livraisons, click and collect… Entre mars 2020 et mai 2021, les distributeurs ont dû s'adapter en urgence pour pallier les fermetures et absorber le flux de commande en ligne. Ces innovations sont aujourd'hui pérennes et optimisées.

Face aux fermetures de magasins et à l'afflux de commandes en ligne lors des confinements, les distributeurs ont dû faire preuve d'agilité pour répondre aux nouveaux besoins de leurs consommateurs. Les solutions rapidement testées et mises en place ont, depuis, fait leur place dans les stratégies omnicanales de ces enseignes. A l'image des drives, mis en place par les enseignes du non alimentaire lors du premier confinement de mars 2020, qui font désormais partis du paysage des points de contact entre les distributeurs et leurs clients. "Nous avons été les premiers en non alimentaire à mettre en place des drives sur les parkings de nos magasins Castorama et Brico Dépôt avec un modèle d'abord artisanal, sans contact et entièrement balisé, détaille Romain Roulleau, le directeur de la stratégie digitale de Kingfisher, la maison mère des deux enseignes de bricolage. Nous nous sommes transformés en cherchant des solutions malignes, simples et efficaces", poursuit-il. Les enseignes Castorama et Brico Dépôt ont pu ensuite industrialiser leurs solutions de drives sur la base des enseignements recueillis pendant ces fermetures de magasins.

Absorber la demande de livraison

Le challenge était important dans un secteur du bricolage encore à la traîne sur le sujet de la transformation digitale et alors que les ventes y étaient en progression (+13% en 2020 d'après la FMB et l'Inoha). "Nous avons dû transformer notre point de vente en zone de stockage et de livraison, l'assortiment proposé en ligne a été augmenté et nous avons accéléré sur la livraison à domicile, explique Romain Roulleau. Aujourd'hui nous sommes passés en mode industriel. Entre 2020 et 2021, notre grille de livraison est devenue compétitive et nous avons pu en mesurer la rentabilité" indique-t-il.

Même son de cloche chez Decathlon : "Nous avons dû nous adapter en démultipliant les formes de livraison en quelques semaines seulement. Cela a été possible grâce à notre utilisation du cloud, qui nous a permis de mettre à disposition nos stocks en magasin via des drives, alors qu'ils étaient fermés en Allemagne, aux Pays-Bas et en France", explique Jérôme Dubreuil, chief digital officer de Decathlon. Les délais de livraison ont été améliorés et avec ses stocks unifiés, l'enseigne est en mesure de proposer de la livraison à domicile, du drive et du click and collect. Chez Decathlon, la stratégie 100% cloud, adoptée en 2018, s'est révélée être la bonne pour faire preuve d'agilité durant la période. A chaque annonce gouvernementale, le distributeur et concepteur d'articles sportifs enregistrait des volumes de ventes 6 à 7 fois supérieurs sur ses plateformes. "Nous n'avons pas observé de baisse de chiffre d'affaires en 2020", se félicite le CDO.

Dans l'alimentaire aussi

Alors que les offres de livraison étaient déjà nombreuses chez les distributeurs alimentaires, ces derniers ont renforcé leurs propositions. Comme le groupe Casino qui possède maintenant des drives sur l'ensemble de ses magasins Casino et a multiplié les partenariats avec les start-up de livraison Uber Eats (avril 2020), Deliveroo (avril 2020) et Just Eat (avril 2022). Ces modes de livraison sont en forte croissance d'après le groupe : +48% de chiffre d'affaires sur la livraison à domicile en 2021 (drive non compris).

Autre innovation, liée aux produits cette fois. Pendant les confinements de 2020, les enseignes se sont tournées vers de l'approvisionnement plus local pour pallier d'éventuelles ruptures, à l'image de Monoprix qui a développé son offre Locavore, aujourd'hui disponible dans 100% de ses magasins. Le distributeur a testé entre octobre 2020 et juin 2021 un dispositif pour indiquer le nombre de kilomètres séparant le magasin du lieu de production. Il a depuis été déployé nationalement.

Des corners Decathlon chez Franprix

Pour compenser une offre d'articles de sport plus réduite dans les grands centres villes et alors que les déplacements étaient limités, en avril 2020, Decathlon et Franprix se sont associés pour proposer des corners d'articles sportifs dans les magasins de proximité. D'abord opérationnels sur 20 magasins en Île-de-France, ils sont aujourd'hui déployés dans 65 magasins dans l'Hexagone. En parallèle, une centaine de produits Decathlon sont disponibles sur les sites de vente en ligne de Franprix. Decathlon a pérennisé cette solution et permet donc à ces enseignes d'acheter du stock qu'elles vendent à leurs clients. L'équipementier sportif gère aussi directement des espaces définis dans certains magasins comme c'est le cas avec son corner Decathlon au sein d'un supermarché Auchan à Bordeaux.

Le plein de services innovants

Chez Castorama se sont développées en mai et juin 2020 des offres de planification à distance pour la vente de cuisines. L'enseigne propose des rendez-vous avec des spécialistes de la cuisine le soir avec une conception partagée en 3D. Le client peut finaliser directement son achat et en programmer la pose via NeedHelp, une start-up rachetée en novembre 2020 par Kingfisher.

Castorama a aussi lancé en novembre 2020 de nouvelles fonctionnalités sur son application mobile avec le scan de code barre qui fait apparaître une fiche produit complète accompagnée de tutoriels. "Les Français se sont passionnés pour le bricolage à cette période là, il a donc fallu s'adapter à leur demande de savoir-faire et d'accompagnement" indique Romain Roulleau le directeur de la stratégie digitale de Kingfisher. L'application continue d'être perfectionnée et intègrera prochainement un assistant vocal pour accéder à ces tutoriels sans utiliser ses mains.

L'enseigne a aussi mis en place à l'été 2020 un moteur de recherche visuelle. "Les taux de conversion y sont trois fois supérieurs à ceux des recherches textuelles", affirme Romain Roulleau. Les contraintes générées par les confinements et fermetures de magasins se sont finalement transformés en "opportunités économiques et commerciales qui viennent renforcer notre modèle retail classique", explique-t-il. En seulement quelques mois nous avons connu une accélération équivalente à trois ans de développements, et les outils mis en place se sont pérennisés", détaille-t-il.