La seconde main, simple tendance ou vrai levier de croissance ?

La seconde main, simple tendance ou vrai levier de croissance ? Alors que les ventes de produits en ligne reculent, l'occasion continue sa progression et séduit de plus en plus de distributeurs en quête de rentabilité, mais aussi de trafic en magasin.

La seconde main peut-elle ramener les clients en magasin ? Alors que les ventes de produits en ligne sont en recul de 12% au premier trimestre 2022, d'après la Fevad, la seconde main, elle, ne cesse de progresser. Foxintelligence estime que la mode d'occasion en ligne a cru de +31% en 2021 contre +16% pour le neuf, elle pèse sur la période pour 19% de la valeur des achats online sur la catégorie mode. Pour ajouter au phénomène, la destruction d'invendus non alimentaires est interdite depuis le 1er janvier 2022. Ces invendus représentent 3% du chiffre d'affaires des entreprises, soit 4 milliards d'euros de marchandises chaque année, dont 1,6 milliard d'euros rien que pour le secteur des vêtements et chaussures, selon une étude Ademe Comerso de novembre 2021.

Résultat, les retailers font évoluer leur offre pour proposer de plus en plus d'occasions sur leurs plateformes et dans leurs magasins. C'est aussi un moyen de faire connaître la marque à certains clients avec des prix plus abordables avant de les amener à acheter du neuf par la suite. C'est le cas chez Sézane d'après les chiffres compilés par Foxintelligence. En 2021, 75% des acheteurs de première et seconde main de la marque ont d'abord acheté de la seconde main avant d'acheter un article neuf. Les articles déjà portés pèsent de plus en plus lourd sur les ventes de Sézane : la seconde main représentait 1% des ventes en valeur de la marque en 2017 et près de 10% en 2021.

Mix omnicanal

Kiabi fait partie des enseignes vestimentaires qui ouvrent leurs portes aux vêtements déjà portés. Le distributeur souhaite équiper 100% de son parc de magasins français d'espaces dédiés à ces pièces d'ici fin 2023. Après avoir testé un premier corner seconde main près de Maubeuge (59) en août 2020, Kiabi en a ouvert 55 et en vise 129 d'ici la fin de l'année. Dans ces zones, de 35m² pour les plus petites à 65m² pour les plus grandes, sont disposées entre 2 000 et 5 000 références de toutes marques vendues 40 à 80% moins cher que le produit neuf. En 2022, l'enseigne prévoit de réaliser 3 millions d'euros de chiffre d'affaires sur ces corners. A côté des espaces physiques de seconde main, l'enseigne vestimentaire a ouvert, sur le modèle de Vinted, une plateforme d'achat et revente pour ses clients sur laquelle elle a enregistré pas moins de de 1,5 million d'annonces en 2021.

Chez Decathlon aussi, le reconditionné est disponible en ligne et en magasin. Avec ses offres de location et ses Trocathlon, Decathlon était déjà pionnier de la seconde main. L'enseigne a fait évoluer son offre avec un espace dédié à la seconde vie en magasin et propose des produits reconditionnés à la fois sur un site dédié et directement sur sa marketplace. Elle alimente ce service grâce aux produits récupérés de ses services de location, mais aussi via ceux rapportés par ses clients. Decathlon reprend les produits de toutes marques d'un montant minimum de 30 à 40 euros.

Un levier de trafic en magasin

La seconde main est aussi un moyen de faire revenir les clients en magasin. Ikea a fait évoluer son coin Bonne Trouvaille, dans lequel l'enseigne proposait des fins de séries et des meubles d'exposition depuis 40 ans, vers Circular Hub. Sur sa plateforme, les clients peuvent regarder les meubles de seconde main disponibles dans le magasin le plus proche de chez eux et les réserver avant de venir les chercher. Ikea France nous a confirmé l'intérêt de la démarche : lors d'une opération menée en novembre 2021 pour chaque meuble rapporté, les clients récupéraient un bon d'achat équivalent à une fois et demi le prix de la reprise. En quinze jours, Ikea a récolté quelque 17 000 meubles.

Chez Kiabi aussi, la seconde main est un levier de trafic en magasin. Ses clients peuvent déposer des bags d'habits déjà portés de minimum 12 articles, il leur suffit de récupérer des étiquettes d'envoi soit via sa plateforme dédiée, soit en magasin. En échange le client reçoit un bon d'achat de 5 euros à valoir sur 25 euros d'achat en magasin. Lors d'une vente sur sa plateforme d'achat et revente de seconde main, le client peut faire le choix de récupérer du cash ou un bon d'achat que Kiabi va venir abonder à hauteur de 20%. "Plus de la moitié de nos clients optent pour le bon d'achat avec abondement, note Jérémy Halle, co-leader seconde main chez Kiabi. Notre démarche est omnicanale et notre objectif est de favoriser la circularité des produits, en créant du pouvoir d'achat pour nos clients et du trafic en magasin", conclue-t-il.