Google Shopping Express peut-il prendre de court Amazon et eBay ?

Google Shopping Express peut-il prendre de court Amazon et eBay ? Google étend à deux villes de plus son service de livraison le jour-même. Concurrent direct d'eBay Now, il vient aussi titiller de nombreuses initiatives d'Amazon.

S'il est un front brûlant entre les géants du Web actuellement, c'est bien celui de la livraison rapide et peu chère, qui se concentre de plus en plus sur le dernier kilomètre. Entré lui-aussi sur cette bataille qui n'a rien de virtuelle, Google vient d'étendre son service de livraison le jour-même à deux zones supplémentaires : Manhattan et l'ouest de Los Angeles. De quoi inquiéter aussi bien Amazon qu'eBay, qui l'un comme l'autre déploient dans le pays leurs services de livraison le lendemain.

Lancé en septembre dernier à San Francisco, Google Shopping Express (GSX) assure la livraison dans la journée des commandes passées auprès d'un certain nombre de distributeurs comme Costco, Fairway, Target, Walgreens, Toys'R'Us, Staples ou encore L'Occitane. Concrètement, le consommateur achète sur le site ou l'appli mobile de GSX le produit d'un marchand, demande à être livré entre 18h et 21h30 et paie avec Google Wallet. Le marchand reçoit l'ordre de commande via une application Google dédiée, envoie un salarié récupérer le produit - ainsi que tous ceux des commandes à livrer durant le même créneau horaire - et préparer les colis. Un camion Google passe les prendre puis les répartit sur plusieurs véhicules Google plus petits, souvent des Toyota Prius. Celles-ci se chargent de livrer les commandes sur leur zone attitrée, aidées par une application dédiée qui optimise leur trajet, comme d'ailleurs celui des camions Google. La firme envisage en outre d'utiliser des livreurs à bicyclette et à pied pour couvrir des zones peu accessibles en voiture. Ils viendront compléter la petite armée de livreurs qu'emploie déjà Google pour couvrir les trois villes, auxquelles s'ajouteront dans quelques mois Brooklyn et le Queens.

Grâce à cette organisation sans faille, Google Shopping Express permet de recevoir les produits en quelques heures, voire dès 9h30 le lendemain pour une commande passée en fin de journée. Pour son lancement, l'abonnement au service est proposé gratuitement pendant six mois. Ce qui laissera à Google le temps de fixer le montant de la souscription. Et pour les non abonnés, le tarif est unique : 4,99 dollars par boutique concernée par la commande. Comment Google peut-il assurer un tarif aussi bas ? En refacturant une partie de ses coûts aux marchands partenaires, en échange des commandes qu'il leur apporte.

Un service en concurrence directe avec eBay Now et Amazon

Avec GSX, Google se positionne donc sur un terrain qu'eBay avait défriché le premier en lançant eBay Now, plateforme Web et mobile permettant également d'acheter auprès de commerces physiques locaux... mais d'être livré dans l'heure qui suit la commande. Actuellement disponible à San Francisco, Chicago, Dallas, Manhattan, Brooklyn et dans le Queens, le service s'appuie également sur des partenariats avec de grands retailers, tels qu'Office Depot, Target, RadioShack, Best Buy, Macy's, Walgreens, Toys'R'Us et Bloomingdales.

Amazon n'est cependant pas bien loin. D'une part, l'e-marchand propose la livraison le jour-même dans 12 villes américaines des articles qu'il commercialise : les abonnés Prime bénéficient d'un tarif unique de 5,99 dollars par commande, les autres paient 9,98 dollars pour le premier article et 0,99 dollar pour chaque article supplémentaire de la commande. En outre, non contente d'ouvrir sans cesse des centres logistiques pour étendre la couverture de son "same-day delivery", la firme de Jeff Bezos serait en train de tester son propre réseau de livraison du "dernier kilomètre" à New York, Los Angeles et San Francisco. Toujours pour vendre ses propres produits, il est vrai, et non ceux des commerces locaux comme le font GSX et eBay Now. Il n'empêche : avec les bonnes incitations de prix et de rapidité, le consommateur pourrait parfois basculer de l'un à l'autre.

D'autant que le principe d'abonnement de GSX rappelle fortement celui d'Amazon Prime, qui contre 99 dollars par an donne droit à des livraisons illimitées, rapides à défaut d'être réalisées dans la journée. Qui plus est, Amazon a commencé à déployer son service AmazonFresh de vente et de livraison le jour-même de produits frais et d'épicerie : après des années de test à Seattle, AmazonFresh a débarqué en décembre à San Francisco et s'étendra à une vingtaine de villes supplémentaires d'ici fin 2014. Mais ce n'est pas tout, puisque le géant de l'e-commerce a lancé en avril Prime Pantry, qui permet à ses membres Prime de se faire livrer pour un tarif unique de 5,99 dollars un carton de 20kg maximum contenant des produits de consommation courante, des produits nettoyants à l'alimentation animale en passant par l'épicerie sèche et certaines boissons.

En France, les distributeurs préfèrent mettre en avant le retrait en magasin

Dans l'Hexagone, la livraison le jour-même est-elle aussi demandée par les consommateurs qu'aux Etats-Unis ? Certes, on voit apparaître des services tels que Toktoktok, qui permet de se faire livrer en moins d'une heure l'un des 200 000 produits référencés de la centaine de commerces physiques partenaires. Une fois la commande passée, l'utilisateur suit le trajet de son coursier en temps réel et est notifié par SMS de son arrivée. La livraison débute à 5 euros et s'accroît avec l'éloignement du point de vente.

Côté marchands cependant, la réticence est frappante. Tous tirent déjà sur les coûts de transport, car ils ne parviennent pas à valoriser cette prestation auprès de leurs clients. Pour ne pas, en plus, devoir organiser – et subventionner – une livraison le jour-même à domicile, les distributeurs multicanaux multiplient donc les options de retrait ou de réservation en magasin, qui aux yeux des consommateurs constituent souvent une alternative satisfaisante pour récupérer rapidement leur article.

Quant aux pure players, certains tentent manifestement de contourner le problème en rendant leur clientèle captive, à l'instar de Cdiscount. Les adhérents de son programme Cdiscount à Volonté, lancé mi-avril, peuvent se faire livrer gratuitement leurs commandes en échange d'un abonnement de 19 euros par an. Une fois que le cyberacheteur a réglé ses livraisons pour une année, il sera peut-être moins sensible aux sirènes de la livraison le jour-même... Ce qui n'empêche pas le même Cdiscount d'expérimenter un dispositif permettant aux acheteurs d'obtenir leur colis sans attendre : le retrait en magasin sous deux heures des produits achetés auprès de marchands cross-canaux qui commercialisent leurs produits sur sa place de marché.