Antoine Champinot (Seb) "Le retail media prend de plus en plus de place dans nos investissements médias"

Le directeur de l'e-commerce du groupe Seb explique comment la digitalisation du trade marketing bouscule les habitudes des marques et des retailers.

JDN. En quoi la digitalisation des investissements de trade marketing impacte-t-elle l'organisation d'un groupe comme Seb ?

Antoine Champinot, directeur e-commerce au sein du groupe Seb. © Seb

Antoine Champinot. Le point de vente physique est un environnement très captif et les actions de trade marketing qui s'y déroulent ont pour unique objectif d'inciter le consommateur à passer à l'achat sur place, via une tête de gondole par exemple. C'est donc logique qu'elles relèvent de la responsabilité des équipes commerciales de la marque. Mais c'est différent sur un site e-commerce. C'est un environnement que l'internaute peut quitter d'un simple clic. On doit donc l'appréhender comme un point de contact parmi d'autres dans le tunnel de conversion. D'où l'importance d'associer les équipes marketing à ce type d'actions car elles pourront avoir un impact sur le parcours d'achat multicanal du client touché.

La digitalisation des comportements d'achat fait aujourd'hui voler en éclat l'organisation traditionnelle des marques de la grande consommation. Dans l'ancien monde, la distinction entre TF1 et Darty est évidente. Sur le Web, c'est moins le cas dès lors que Fnac-Darty, Cdiscount et cie proposent eux aussi de l'inventaire média et qu'un canal de vente est de plus en plus souvent également un média. Je pense que cela va sans doute contraindre les marques à revoir leur organisation. Les compétences seront, à terme, structurées autour des points de contact avec le consommateur plutôt que par métier comme c'est le cas aujourd'hui avec un marketeur, un catégorie manager et un commercial.

Comment êtes-vous organisé chez Seb ?

Je dirige une équipe d'une dizaine de personnes en France, avec un key account manager qui pilote la discussion avec chacun des e-commerçants et une équipe activation média, dont un chargé de retail média, qui pourra piloter le suivi des campagnes. Ce pôle me rapporte directement mais est rattaché aux équipes marketing car, comme je vous l'ai dit, le digital impose un rapprochement entre les équipes marketing et les équipes commerciales.

Comment évoluent vos relations avec les e-commerçants ?

Auparavant, le trade marketing online se résumait à des négociations entre l'acheteur côté e-commerçant et le commercial qui, côté marque, consentait à acheter un peu de visibilité sur le site via des bannières non ciblées. Les choses ont changé à mesure que les e-commerçants ont lancé leur propre régie, pour mieux valoriser ces emplacements et leur data. Nous faisons désormais face à deux interlocuteurs : l'e-commerçant et sa régie. Le premier peut profiter des accords de trade marketing pour imposer un volume d'investissements chez le second. C'est une méthode pratique pour booster l'activité de sa régie lorsqu'elle est balbutiante. A mesure que celle-ci devient plus mature, la régie gagne en autonomie et l'exposition média valorisée dans les accords de trade marketing se transforme en ciblage de plus en plus fin. Les discussions concernent alors surtout la régie de l'e-commerçant et les équipes marketing des marques.

Ces investissements médias sont-ils toujours intégrés aux accords de trade marketing ou peuvent-ils s'opérer à côté ?

Cela dépend des négociations. Les équipes e-commerce aiment bien garder la main dessus car c'est un des derniers moyens pour elles d'impacter la performance business du produit. De notre côté, nous préférons garder de la flexibilité sur ces investissements, ce que ne permettent pas les accords de trade marketing.

Quel est aujourd'hui le poids de vos investissements en trade marketing digital ?

C'est très compliqué d'estimer le poids des investissements de trade marketing. Il s'agit le plus souvent de quelques lignes dans des contrats commerciaux de plusieurs pages, qui correspondent le plus souvent à des pourcentages. Nous suivons bien évidemment l'évolution de nos investissements retail médias par rapport à notre budget média global et elle y prend une place de plus en plus importante.

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