Livraison de colis : la guerre des points de proximité aura bien lieu

Alors que la livraison de colis va être au plus haut dans quelques semaines avec Noël, les réseaux de distribution de colis dans les points de proximité se font de plus en plus concurrence sur ce marché en pleine expansion tiré notamment par le e-commerce.

Il existe près d’une dizaine d’enseignes de réseaux de points de proximité, dont les plus connues sont Relais Colis®, Point Relais® de Mondial Relay, Relais Poste®, Kiala®, Chrono Relais®, Ici Relais®, Top Relais®, A2pas®…etc.  Bien que la plupart des opérateurs cherche à développer la livraison en points de proximité, il n’y a en vérité que quatre sociétés en France qui commercialisent et fédèrent un réseau de commerçants.

Les deux réseaux historiques : Relais Colis et Mondial Relay

A la fin des années 1970, les deux grands vépécistes français, que sont La Redoute et les 3 Suisses, ont chacun créé leurs propres infrastructures de transport afin de livrer à domicile les achats de leurs clients catalogue. Au début des années 80, La Redoute invente le concept de livraison en point de proximité permettant à un acheteur sur catalogue de se faire livrer près de son domicile ou de son travail, via un réseau de commerçants fédérés sous l’enseigne Relais Colis. Mondial Relay emboite le pas avec un réseau de Point Relais.  Ces deux réseaux représentent à deux environ 10 000 commerçants en France aujourd’hui.
Relais Colis et Mondial Relay sont les leaders sur le marché de la livraison en points de proximité
et ont réussi à étendre leur offre aux sites de e-commerce. Ils ont sans doute les réseaux les mieux structurés, les plus solides car ils sont composés de commerçants dont l’expérience accumulée au fil des années a permis d’intégrer efficacement le métier de la réception et de la mise à disposition de colis.

Les deux réseaux nés du boom Internet : Kiala et Pickup Services
Au début des années 2000 Kiala et Pickup Services ont anticipé l’intérêt des réseaux de points relais pour le  e-commerce et ont pris position sur ce marché en développant des solutions informatisées de gestion de points de proximité.
Kiala s’est ainsi développé de façon résolument offensive
à travers des actions menées tambour battant relayées efficacement dans la presse. Kiala avait passé un accord pour utiliser le réseau de Mondial Relay, et avait presque réussi à éclipser la marque du vépéciste. Mondial Relay a repris progressivement la main sur son propre réseau à partir de 2009. Contraint à de nouvelles alliances, Kiala s’est rapproché des buralistes réunis autour du label A2pas (Altadis) et des bureaux de presse  (presstalis).  Aujourd’hui, la marque  Kiala est très forte  mais souffre d’un moins bon ancrage opérationnel sur le terrain que  Mondial Relay et Relais Colis. Le partenariat récent de Kiala avec l’opérateur Geodis qui se lance lui aussi dans la livraison en points de proximité chez les buralistes (via le GIE France Express sous le label Top Relais) devrait redonner un second souffle à Kiala.
Pickup Services qui a toujours entretenu une démarche plus discrète
que Kiala, s’est appuyé dès son origine sur les buralistes A2pas. Compte tenu d’une mauvaise intégration sur le terrain, Pickup Services s’en est retiré en 2010. Au même moment, la société a été reprise par Geopost (groupe La Poste) permettant à ce dernier de proposer des solutions de livraison et de dépôt de colis pour trois marques du groupe La Poste : Chrono Relais® de Chronopost, So Colissimo® de ColiPoste et Ici Relais® d’Exapaq.

La transformation des réseaux de proximité, une menace pour l’opérateur postal ?
Les points de proximité qui servaient et qui servent toujours pour 95% à la livraison de colis à proximité du domicile ou du lieu de travail du client peuvent être utilisés pour le dépôt de colis. Ces points de proximité peuvent devenir progressivement de petits  « bureaux de poste », réduits bien entendu à leur plus simple expression.  C’est ainsi que Mondial Relay et Relais Colis ont lancé une offre de dépôt de colis en janvier 2011. Le paiement par l’usager ou l’entreprise est réalisé sur Internet si bien que le commerçant n’a plus qu’à prendre en charge le colis du client sans s’occuper du règlement. En terme de coûts et d’efficacité, un tel réseau n’a rien à voir avec l’exploitation traditionnelle des Bureaux de Poste avec leurs guichets et leurs files d’attente.
La Poste l’avait bien anticipé en 2009 en transformant ses Bureaux de Poste
en boutiques ou en agences postales plus accueillantes et ouvertes parfois à des heures tardives,  puis en remplaçant les bureaux de Poste en Relais Poste plus simples et moins couteux à gérer, et enfin en développant son propre réseau de commerçants avec Pickup Services pour compléter sa gammes de services  So Colissimo, Chrono Relais ou Ici Relais.

Y a-t-il une place pour un deuxième grand réseau de proximité à côté de l’opérateur postal ?
La Poste cherche ainsi à contrer les réseaux alternatifs potentiels (Mondial Relay, Relais Colis et Kiala) qui possèdent à eux trois réunis presqu’autant de commerçants qu’il  y a de bureaux de Poste en France, moins bien répartis certes (certains commerçants Relais Colis sont en face de commerçants Mondial Relay) mais indéniablement plus économiques. Aucun accord ne semble pourtant se dessiner à ce jour entre ces trois opérateurs, mais cela pourrait représenter à un horizon de 2 à 3 ans une menace pour l’opérateur postal surtout si un puissant intégrateur mondial (DHL, FedEx, UPS ou TNT) venait à s’associer avec ces réseaux de commerçants. Le jour où le grand public et les TPE prendront conscience qu’il existe une offre de livraison de colis de qualité et à prix réduit, il y aura la place pour un deuxième grand réseau (avec plus de 10 000 points de proximité) capable de défier La Poste.
Face à ces réseaux de points de proximité émergeants
, les 17 000 points de contact de La Poste constituent un atout évident à condition que leur exploitation entraine une forte synergie de coûts ; ce qui n’est pas gagné du fait de la quantité de services commercialisés par La Poste, de la complexité de gestion du réseau postal et de la variété des points de contact de La Poste. Rappelons enfin que la Poste assure toujours le Service Universel postal et qu’elle doit conserver un niveau de performance, de couverture et de fiabilité élevé au moindre coût.
La compétition entre opérateurs se joue donc plus que jamais sur le terrain et sur leur capacité à optimiser l’envergure et la qualité de leur réseau de points de proximité.