Le roi .COM va-t-il perdre sa couronne ?

La vraie bataille des noms de domaine commence maintenant, avec l'ouverture générale des premières nouvelles extensions. Les extensions historiques, .COM en tête, vont-elles souffrir de cette nouvelle concurrence ?

Quelle adresse voulez-vous sur Internet ? Depuis quelques jours, le choix en matière de noms de domaine s'est agrandi. Une tendance qui ne peut qu'aller en augmentant au fur et à mesure de la mise en service d'un petit millier de nouvelles extensions prévues sur les deux années à venir.
Le 29 janvier 2014, les 7 extensions suivantes ont ouvertes : .BIKE, .CLOTHING, .GURU, .HOLDINGS, .PLUMBING, .SINGLES, et .VENTURES. Elles sont toutes gérées par la société américaine Donuts (beignet en Anglais). Créée par un vétéran de l'industrie du nommage sur Internet, son seul but est de défricher des terrains virtuels jusque là indisponibles pour y construire les premiers immeubles d'une nouvelle ère où le .COM ne serait plus l'incontestable leader.
Une ambition partagée par le français Starting Dot, créé en 2011 et déjà assuré de gérer les .ARCHI, .BIO et .SKI, qui ouvriront courant 2014.

Papy fait de la résistance 

Le modèle Starting Dot repose sur des adresses Internet qualifiées et une collaboration étroite avec les communautés concernées (le .ARCHI est par exemple destiné aux architectes professionnels et soutenu par les associations professionnelles de ce secteur).
Celui de Donuts est calqué sur le .COM. Peu importe l'extension, elle est ouverte à tous sans restriction.
Pour simplifier, on pourrait dire que les extensions Donuts ne sont ni plus, ni moins que des .COM redessinés. Un modèle à vocation commerciale, dont les premiers chiffres commencent à tomber.
D'après le bloggeur britannique Kevin Murphy, le 6 février 2014 les premières statistiques sur les volumes d'enregistrement dans les 7 extensions susmentionnées donnaient les résultats suivants : 12 394 noms enregistrés en .GURU, 3 727 en .BIKE, 2 856 en .CLOTHING, 2 071 en .SINGLES, 1 669 en .VENTURES et 1 081 en .PLUMBING. Soit un total de 25 575 noms.
Le bloggeur américain Michael Berkens signale de son côté que la même journée, le .COM a augmenté de 37 782 noms.

Personne ne va lâcher le .COM 

Coïncidence des calendriers, le même 6 février, Verisign, la société américaine en charge du .COM, publiait ses résultats pour le quatrième trimestre 2013. Un CA à $246 millions, en hausse de 7 % par rapport au quatrième trimestre 2012, et un total de 127,2 millions de noms gérés en .COM et .NET, soit 5 % de croissance…
Les deux extensions historiques de l'Internet se portent donc bien. Verisign s'attend d'ailleurs à enregistrer entre 1 et 1,5 millions de nouveaux .COM et .NET sur le premier trimestre 2014.
Et James Bidzos, le PDG de Versign, de profiter de la traditionnelle séance de questions/réponses avec les analystes financiers pour affirmer crânement qu'il ne voit pas pourquoi les Internautes abandonneraient le .COM.
Bidzos a peut-être plus de soucis à se faire qu'il ne veut le laisser paraître. L'analyse journalière citée plus haut montre que les premiers chiffres d'enregistrements des nouvelles extensions ne sont finalement pas si éloignés que ça de ceux du .COM. Cela sur des extensions qui n'ont fait l'objet d'aucun marketing spécifique.
Donuts n'a pas fait de campagne de pub pour les faire connaître. Né de l'industrie du nom de domaine, il se repose à 100 % sur elle. Autrement dit, la connaissance qu'on les distributeurs (les registrars) des nouvelles extensions en général et des produits Donuts en particulier.
Donc, sauf à être un geek de l'ICANN (le régulateur technique de l'Internet) ou déjà client d'un registrar qui aura peut-être envoyé un mailing d'information, aucun amateur de vélo (BIKE), plombier (PLUMBING), ou professionnel de la mode (CLOTHING) ne peut savoir que ces extensions existent.
A l'inverse, des acteurs comme Starting Dot se concentrent sur la promotion de leurs extensions directement auprès des utilisateurs potentiels. Au lieu d'espérer transformer les actuels supermarchés d'enregistrement du nom de domaine en hypermarchés simplement en augmentant l'offre, ils ambitionnent de stimuler directement la demande auprès des clients finaux.
Ainsi, par exemple, la société française multiplie les contacts avec les fédérations de ski pour son .SKI ou l'industrie du bio pour son .BIO. Et elle prévoit de soutenir le lancement de ses extensions par du marketing actif.

Attendre fin 2014 

Le vrai premier constat sur l'avenir du .COM face aux nouvelles extensions devra donc être tiré à la fin 2014. D'ici là, de nombreuses nouvelles extensions seront actives. Elles proposeront une foultitude de business modèles différents. Elles cibleront des communautés très variées, y compris dans des langues et des alphabets encore peu représentés sur le Net. En bref, il s'agira de vraies alternatives au .COM.
Les résultats de Verisign au dernier trimestre 2014 seront intéressants à suivre…