Personnaliser d'urgence l'expérience client ou disparaître ?

Don Pepper, l’inventeur du marketing 1 to 1, a sorti son livre The One to One Future en 1993. Pendant les années qui ont suivi et jusqu’à récemment, les marketeurs ont beaucoup parlé de l’hyper-personnalisation.

En 2019, le 1 to 1 est plus que jamais à notre portée. Mieux, il devient une nécessité absolue pour les marques qui veulent continuer d’exister dans un monde où les consommateurs sont devenus plus exigeants que jamais et surtout addicts aux applications digitales. Amazon, Uber, Booking mais également les Digitale Native Verticale Brand l’ont bien compris. Ils ont accoutumé les consommateurs à des expériences qui correspondent exactement à leurs attentes. La personnalisation de masse répond à une attente fondamentale des clients désormais habitués à ces services innovants et sur mesure. Les marques "historiques", si elles veulent subsister et/ou se développer, sont obligées d’être a minima au même niveau de service que ces nouveaux acteurs.

Pour mettre en œuvre cette personnalisation de masse, les marques vont devoir transformer en profondeur leur marketing et plus globalement leur manière de faire du business. Il ne suffit pas de produire et de diffuser quelques bannières ou quelques email personnalisés pour adresser les nouvelles attentes des consommateurs. Ça, c’est la vitrine du 1 to 1. Les consommateurs en veulent plus. Ils veulent que les marques les reconnaissent quel que soit le point de contact. Ils ne veulent plus perdre de temps à réexpliquer une énième fois qui ils sont et quel est leur souhait ou leur problème. Ils veulent vivre une expérience sans couture et pertinente, c’est-à-dire en phase avec leurs attentes et leur comportement.

Pour rendre cette démarche possible, 3 conditions essentielles doivent être réunies.

 >> Tout d’abord, il faut des données ! Sans data, pas de connaissance des attentes clients, pas de bon ciblage et encore moins de personnalisation. C’est donc une première condition pour adresser cette démarche : avoir des data et si possible ses propres data. C’est bien d’exploiter la data de tiers comme Google, Facebook ou encore Amazon pour conquérir de nouveaux clients mais c’est loin d’être suffisant pour adresser la personnalisation de masse notamment auprès de ses propres clients. Les marques doivent être à même de collecter, d’enrichir et d’exploiter leur propre data. C’est la condition de leur autonomie.

 >> La seconde condition est que ces data soient intégrées au sein d’un eco-système technologique qui rende possible leur exploitation optimale. Combien d’entreprises sont aujourd’hui noyées dans des téraoctets de données dont elles ne savent pas quoi faire faute de technologies adéquates pour les exploiter ? Combien sont encore perdues suite à l’acquisition de solutions technologiques avant même d’avoir listé les fonctionnalités que ces solutions sont sensées adresser ? Comme pour toute démarche, il faut en premier lieu expliciter les besoins, dessiner une vision, établir une roadmap et mettre en place une gouvernance pour que la stratégie data soit efficace et pertinente. La personnalisation de masse requière méthode et rigueur car elle peut se révéler complexe et implique beaucoup de parties prenantes au sein de l’entreprise.

 >> Enfin, il faut bien sûr imaginer les dispositifs, les campagnes et/ou les services qui sauront susciter de l’émotion, séduire et convaincre les consommateurs. Là encore, les écueils sont nombreux. Certaines marques se lancent dans des dispositifs techno-marketing sans vraiment réfléchir ni aux objectifs à atteindre, ni aux attentes des consommateurs. Elles tombent dans le piège d’une vision strictement technologique oubliant au passage les basiques du marketing voire du commerce. Évidemment, cela ne fonctionne pas ! La technologie est un moyen, pas une fin. Les marques qui réussissent sont celles qui ont trouvé comment exploiter au mieux la data et la technologie au service de leur marketing. C’est en mariant créativité et technologies, data et marketing, science et émotion, que l’on gagne le cœur du consommateur.

Cet équilibre est essentiel : lui seul assure la pertinence de l’expérience que la marque propose à ses différents contacts. Mieux, c’est la pertinence de l’expérience personnalisée qui justifie aux yeux du consommateur la collecte et l’exploitation de ses données personnelles. On sait combien les consommateurs sont aujourd’hui méfiants vis-à-vis de certaines démarches exploitant leurs data à leur insu. C’est en étant transparent sur l’exploitation des données personnelles et surtout en mettant en avant la pertinence des bénéfices de cette exploitation que les marques gagneront la bataille de la confiance.

La mise en place d’une démarche de personnalisation at scale nécessite une transformation qu’il ne faut pas sous-estimer. C’est un enjeu qui peut parfois même dépasser le marketing lorsque cette personnalisation se prolonge dans la production customisée de produit ou de services. L’organisation, les compétences, les process, les outils, les partenaires… tout est à revoir ! Reste juste la nécessité de bien mettre le client au centre de la démarche, de ne pas sombrer dans le piège de la techno pour la techno, de donner à l’humain une place essentielle. Car la finalité de cette démarche est bien de satisfaire et de séduire le consommateur final tout en optimisant les coûts et l’efficacité du marketing.