2021, l'année de pré-industrialisation de la blockchain via IoT pour Engie

2021, l'année de pré-industrialisation de la blockchain via IoT pour Engie Le groupe énergétique français s'apprête à lancer un service BtoC d'optimisation de l'énergie basé sur les gestes des consommateurs.

Après quatre années de travaux en R&D, la blockchain va passer à l'étape de la pré-industrialisation chez Engie. Le groupe devrait lancer courant 2021 un service lui permettant de suivre, via les registres distribués et les équipements connectés adaptés, les événements énergétiques des clients finaux pour optimiser les consommations. "Des éco-gestes certifiés qui visent à réduire la consommation énergétique seront favorisés par ce nouveau service, dont les détails sont encore confidentiels", précise Philippe Calvez, responsable du Lab computer science and artificial intelligence au sein du centre de recherche Crigen, qui a travaillé sur la partie software du projet.

Ce projet, développé depuis 2019 dans le cadre de différents travaux de recherche et de partenariats académiques, est en phase pilote, après une mise au point du prototype réalisée entre janvier et juin 2020. L'offre est en cours de définition, elle représente le premier projet commercialisé avec un objectif de déploiement à grande échelle.

Ce projet a été un travail de longue haleine. Il s'appuie sur les travaux effectués depuis 2016 pour déterminer comment implémenter le software sur les capteurs et comment faire interagir la chaîne de traitement des données avec un registre distribué (DLT). Il a également mobilisé le Lab Nanotech, Sensors & Wireless du Crigen pour la partie hardware. "Les informations sur une blockchain ne peuvent par principe pas être modifiées. Il nous a donc fallu s'assurer que les données soient sûres et certifiées en amont. Le premier challenge a été de concevoir des objets connectés sécurisés car pour assurer la confiance dans toute la chaîne de valeur, il faut remonter jusqu'à l'équipement", raconte Philippe Calvez, rappelant que l'un des avantages de la blockchain est justement d'apporter de la confiance distribuée et non centralisée aux parties prenantes.

Le deuxième défi a été d'optimiser les objets, par leur réseau de communication et leurs configurations software, pour que l'interaction avec une blockchain n'utilise pas une bande-passante de nature à réduire trop rapidement leur consommation de batterie. Sur ce sujet, Engie collabore avec une start-up française et des entreprises en Allemagne spécialisées sur le sujet. Le Lab Nanotech, Sensors & Wireless a finalisé de son côté le prototype de son capteur appelé LinkMe, développé depuis 2018 pour s'intégrer à la solution globale basée sur la blockchain. Connecté en Wifi, le capteur a vu son architecture améliorée au cours du deuxième trimestre 2019 pour intégrer les mesures du compteur Linky et communiquer en LoRaWAN. Prêt pour l'industrialisation, ce capteur devrait coûter moins de 100 euros par unité à large échelle.

Une hausse de 30% des mises en production en 2021

A l'heure actuelle, peu d'autres projets blockchain sont réellement industrialisés. "Le sujet a été à la mode mais les entreprises ont finalement trouvé peu d'usages dégageant de la valeur. Les sujets ont été rationnalisées", souligne Philippe Calvez. L'entreprise Eaton, spécialiste des systèmes électriques et hydrauliques, reconnaît que l'utilité n'est pas encore manifeste. "L'enregistrement des événements dans un registre blockchain pour ensuite effectuer des micro-transactions est pertinent, mais ça implique selon moi de créer une communauté d'utilisateurs. Dans ce cas, une base de données centrale serait équivalente", estime Cyrille Brisson, son vice-président marketing.

Chez Engie, on considère néanmoins depuis 2016 la blockchain comme pertinente pour optimiser un certain nombre de processus existants sur la chaîne de valeur de l'énergie, notamment dans sa décentralisation permise par un usage croissant des énergies renouvelables. Différents projets IoT sur l'énergie ont été effectués en parallèle. Par exemple, des POC sont menés depuis 2017 avec la fondation Solar Impulse pour mettre au point, dans le cadre du projet Vertuoz Pilot, un système d'optimisation de la consommation énergétique assurant un équilibre entre le confort des occupants et les économies d'énergie. Des objets connectés envoient des mesures relevées à un algorithme d'intelligence artificielle qui prend en compte simultanément la condition des locaux, les objectifs de consommation et les contraintes paramétrées avant d'agir, via des actionneurs sur le chauffage ou l'éclairage.

"La validation des transactions sur une blockchain peut engendrer un coût de validation. Il est nécessaire d'évaluer que celui-ci soit dans sa globalité inférieur à celui des process antérieurs", rappelle Philippe Calvez. Engie s'est associé en septembre 2018 à la fondation IOTA et les deux partenaires ont mené une expérimentation en Norvège sur des transactions d'énergie à l'échelle d'un bâtiment à énergie positive. Un immeuble doté de panneaux solaires utilise sa propre production et peut la revendre quand elle est en surplus, via des bornes de recharge destinées aux véhicules électriques en sous-sol. L'objectif à terme d'Engie : mettre en place des places de marché de l'énergie a une échelle locale pour favoriser les échanges d'énergie de proximité. "Il s'agit d'un secteur qui se décentralise avec une multiplication d'acteurs qui veulent produire et échanger de l'énergie. Pouvoir tracer et certifier cette production d'énergie, puis offrir des services associés aux consommateurs, va être indispensable", assure Philippe Calvez. Une affirmation qui s'inscrit dans les prévisions de l'institut américain Forrester, qui prévoit que le taux de mise en production des projets blockchain dans le monde augmentera en moyenne de 30% en 2021.