Acwa Robotics primé au CES pour son robot luttant contre les fuites d'eau

Acwa Robotics primé au CES pour son robot luttant contre les fuites d'eau La start-up corse présente au Consumer Electronics Show son robot cylindrique explorateur de canalisation pour détecter les fuites d'eau potable.

La durabilité est le thème phare de cette 56e édition du Consumer Electronics Show (CES), qui se tient à Las Vegas du 5 au 8 janvier. Une aubaine pour la start-up corse et aixoise Acwa Robotics, dont l'objectif est de préserver les ressources en eau. Elle présente sur le salon son robot dénommé Clean Water Pathfinder, dont l'objectif est de parcourir les canalisations pour cartographier le réseau d'eau potable et analyser son état afin d'en favoriser la maintenance préventive.

Le CES, qui lui a décerné quatre Awards (dans les catégories Smart Cities, Sustainability, Eco-Design & Smart Energy et Human security for all, ainsi qu'un Best of Innovation Award, ndlr), va lui offrir l'opportunité de montrer le fonctionnement de son robot, après trois ans de mise au point. "Nous voulons apporter une réponse à un problème mondial qui ne cesse de s'amplifier avec la sécheresse", souligne Jean-François Guiderdoni, cofondateur d'Acwa Robotics, qui échange avec cinq services de l'eau majeurs et a été approché par des structures en Inde et à Taïwan. La crise énergétique met elle aussi en avant la nécessité d'éliminer les fuites d'eau. "Il faut beaucoup d'énergie pour pomper de l'eau potable. Avec la hausse des prix de l'énergie, les collectivités ne peuvent plus se permettre de dépenser inutilement", met en avant Jean-François Guiderdoni.

Ce sont justement les coupures d'eau récurrentes en Corse chaque été et le fait que 20 à 30% de l'eau en France soit perdue chaque année lors de son transport qui ont poussé les deux cofondateurs à lancer leur projet. "A l'échelle mondiale, 120 milliards de mètres cubes sont perdus chaque année, ce qui représente deux fois la consommation annuelle du Brésil. Ces fuites proviennent d'un manque de renouvellement des canalisations car cela coûte très cher. Seul 0,6% du réseau est renouvelé chaque année, ce qui n'est pas suffisant pour le maintenir en état", explique Jean-François Guiderdoni.

L'orientation du robot effectuée par fusion de données

Les deux partenaires ont donc décidé en 2018 de créer leur robot pour lutter contre cette problématique. Il leur a fallu six mois pour concevoir un premier prototype validant la pertinence de leur projet, puis un an et demi pour confirmer son fonctionnement dans l'eau. Il se présente sous la forme d'un long cylindre qui a la faculté de se plier et se déplier pour avancer tout en suivant la courbure des tuyaux afin de pouvoir circuler dans tout type de canalisation. Dans un réseau d'eau potable, il n'y a ni signal GPS, ni aucun moyen de communication. Le robot est ainsi équipé de 24 capteurs de distance, d'une centrale inertielle et se sert de l'odométrie, une technologie qui enregistre les mouvements du robot, pour s'orienter grâce à la fusion de toutes ces données, afin de fournir une précision de l'ordre de 10 centimètres. Le robot détient également une caméra HD pour fournir des images de haute qualité afin de détecter les microfissures dans le mortier. Des emplacements sont prévus si les clients ont besoin d'utiliser des capteurs supplémentaires, pour suivre la température ou la qualité de l'eau.

"En robotique, le client final ne tolère aucune erreur ni aucun bug"

Les équipes n'ont qu'à programmer sa mission et le déposer dans une canalisation, le Clean Water Pathfinder effectuant tout le reste seul, rapportant ensuite en fin de mission les images nécessaires grâce à ses technologies embarquées. Il peut explorer 2 kilomètres de canalisation par jour. Pour son alimentation, Acwa Robotics prévoit de mettre à profit les regards dans les canalisations pour disposer des points de recharge sur son parcours. "Les principales contraintes concernent la résistance à la pression, qui peut atteindre 20 bars, et l'écoulement, dont la vitesse peut être de deux mètres par seconde. En robotique, le client final ne tolère aucune erreur ni aucun bug", détaille Jean-François Guiderdoni.

La première version du robot est dotée d'un fil pour pouvoir le ramener, si jamais il ne rentre pas de mission. Mais l'objectif est de le rendre entièrement autonome. Une troisième version est finalisée pour servir de produit minimum viable (MVP). Elle intègrera des capteurs d'ultrason et d'électromagnétique pour effectuer des relevés d'épaisseur de conduits et du niveau de corrosion. L'induction pourrait être testée pour la recharge.

Un premier pilote sera mené courant janvier avec la société du Canal de Provence, qui possède 7 000 kilomètres de canalisations. "La première demande est d'y détecter la formation de calcaire", indique Jean-François Guiderdoni. Une deuxième expérimentation aura lieu dans l'année à Dunkerque avec Suez, cette fois pour mesurer avant tout l'épaisseur résiduel de la corrosion dans les canalisations et à l'extérieur. La commercialisation du robot est prévue pour fin 2023 via un service au kilomètre.

Le Clean Water Pathfinder va par ailleurs répondre à un besoin de cartographie. Sur le continent européen, Acwa Robotics estime que seuls 20 à 30% des réseaux d'eau potable sont correctement cartographiés, un nombre "insuffisant pour savoir où intervenir à défaut d'avoir identifié quand rénover". Une réglementation française, la DT-DICT, va imposer à partir de 2026 de localiser le réseau de distribution d'eau à 40 centimètres de précision et d'en évaluer l'état. Une tâche toute indiquée pour le robot. "Au lieu de rentrer de mission pour rapporter les données, le robot pourra rester sous terre et transmettre des données en LoRaWAN ou en 5G pour constituer le jumeau numérique de la canalisation", annonce Jean-François Guiderdoni. Des possibilités prometteuses, selon le cabinet de cabinet de conseil français Niji, qui présage un engouement au CES autour des jumeaux numériques et prédit ainsi un vif succès sur place pour Acwa Robotics.