Le métaverse, véritable outil de transformation de l'industrie ?

Le métaverse n'est pas réservé aux jeux vidéo, réseaux sociaux ou au Web3 : il a aussi de nombreuses applications industrielles et déjà de premiers cas d'usages.

Cependant, pour tirer pleinement parti des opportunités  offertes par le métaverse, les entreprises vont devoir relever le défi de l’industrialisation et dépasser le stade du POC (proof of concept).

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Le monde industriel est habitué de longue date à travailler avec les modèles 3D, notamment dans des domaines  comme l’artisanat de luxe qui, de plus en plus, modélise virtuellement ses produits avant de les fabriquer. Ces technologies trouvent désormais des applications tout au long du cycle de vie d’un produit, depuis la phase de design - avec les solutions PLM - jusqu’à la maintenance et l’après-vente. Avec le métaverse industriel, l’intégration des technologies 3D et de la data est désormais poussée encore plus loin…

Du digital twin au métaverse…

Les digital twins - doubles numériques d’un produit, d’une chaîne de production, d’un opérateur, d’une usine ou des quatre à la fois - sont les premières briques du métaverse industriel. Connectés au monde réel, ces outils sont particulièrement utiles pour accélérer la conception des produits, simuler différentes configurations, anticiper des changements dans les chaînes de fabrication, raccourcir les cycles de production ou encore gagner en flexibilité dans la supply chain.

La visualisation du digital twin en utilisant les technologies de Réalité Augmentée et/ou de Réalité Virtuelle, arrive maintenant à un niveau de précision et de réalisme qui rendent tangibles les simulations et projections des chaînes de production virtuelle. Ainsi, un spectateur non averti ne peut plus faire la différence entre une séquence 3D et une séquence filmée, ce réalisme de l’univers virtuel permet d’engager l’ensemble des interlocuteurs. Ces représentations virtuelles fidèles permettent aussi l´entrainement d´intelligence artificielle à des situations hypothétiques simulées dans le digital twin, aidant notamment à l´amélioration de la robotique autonome améliorant la supervision de l´usine et sa sécurité.

Ainsi, avoir une maquette numérique ou un digital twin ne suffit toutefois pas à faire un métaverse. Pour cela, il convient d’adopter une approche collaborative, en l’ouvrant à l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise - sous-traitants, fournisseurs, partenaires, voire clients - mais également aux différents corps de métier en interne, même si cela impose de casser de nombreux silos.

Traçabilité et partage de valeur

Avec une vision écosystémique, le métaverse industriel se présente comme un moyen de partager de façon sécurisée et traçable les données de l’entreprise pour faciliter la conception, la production et la maintenance des produits. Pour beaucoup d’industriels, le développement du métaverse offre l’opportunité de créer une véritable plateforme d’échange et de collaboration, afin d’améliorer l’efficience opérationnelle.

En intégrant des logiques Web3 et blockchain, cet espace collaboratif apporte aussi des réponses aux enjeux de traçabilité et de partage de la valeur entre parties prenantes, en permettant de valoriser, voire de monétiser, l’usage des assets et des contenus digitaux de chacun. Un sous-traitant ou un fournisseur peut, par exemple, intégrer les modèles 3D des pièces détachées qu’il produit dans le référentiel de son client et se voir rétribuer pour chacun de leur usage, grâce aux possibilités offertes par les NFT. Ces nouvelles capacités sont un accélérateur puissant à l’adoption de la fabrication additive et de l’impression 3D.

Connectivité avec la chaîne de production

La connectivité avec la chaîne de production est également clé, elle permet de remonter dans le métaverse les données réelles de production, d’utiliser le digital twin pour identifier les optimisations mais surtout, en cas de remontées d’alertes sur la chaîne physique, de simuler dans le virtuel les différents scénarios avant d’appliquer les évolutions sur la chaîne physique.

De cette façon, la représentation virtuelle réaliste évoquée précédemment va pouvoir être directement augmentée par une visualisation des différentes métriques et de leurs impacts sur la chaîne de production avec une représentation anticipée des conséquences de ces évolutions de KPI.

Dépasser le stade du POC et du POV

L’industrie aéronautique et les constructeurs automobiles - comme BMW, avec Nvidia et ses solutions Omniverse - ont déjà bien avancé dans cette réflexion, en digitalisant leurs processus et en réunissant leur écosystème de partenaires autour d’une même plateforme numérique. Pour autant, l’industrialisation de ce type de démarche se heurte encore à de nombreux freins et trop souvent les expérimentations restent au stade du POC (proof of concept) ou du POV (proof of value).

Pourtant, très rapidement, la question de l’industrialisation de la production des assets digitaux va se poser au sein des entreprises, entraînant la création de véritables chaînes de production de produits numériques. L’intérêt ? Alimenter en contenus les métaverses industriels, mais aussi grand public.

Ce passage à l’échelle va imposer de connecter le métaverse au SI (système d’information), cœur de l’entreprise, en faisant communiquer ensemble des sources de données historiquement cloisonnées - comme les données CAD (conception assistée par ordinateur) et PLM (cycle de vie du produit).

Enfin, comme toute technologie naissante, le métaverse est porteur de beaucoup de promesses qui restent à confirmer. Ainsi, sans des réponses appropriées sur les questions de choix de métaverse, d’architecture et de relations avec les SI, d’identité et de sécurité et enfin de  cadre législatif adapté, son utilisation dans un contexte industriel risque d’être limitée.

La tâche est complexe, mais c’est la condition à remplir pour établir une véritable continuité numérique de ces services.