5 alternatives au cookie tiers : leurs forces et faiblesses

5 alternatives au cookie tiers : leurs forces et faiblesses A un an de la disparition annoncée du pilier du ciblage publicitaire, le JDN procède au casting des principaux candidats au premier rôle.

Dans ce thriller dont l'épilogue est connu (le grand méchant, Chrome, tue les cookies tiers à la fin et c'est prévu pour début 2022), il ne reste plus qu'à fignoler le casting. En l'occurrence, trouver le jeune premier qui pourra venir remplacer favorablement la vieille gloire condamnée, les cookies tiers. Cinq favoris se dégagent pour proposer une alternative au pilier actuel du ciblage publicitaire. Revue des troupes.

Les cookies 1st party

En matière de cookies, la mansuétude des navigateurs tient parfois à un chiffre. En l'occurrence, un 1 à la place du 3. Car si les cookies 3d party sont blacklistés par Safari et bientôt par Chrome, il en va autrement des cookies 1st party. Ces derniers, qui sont déposés par l'éditeur d'un site, sont cantonnés à son seul domaine (et ne permettent donc pas de faire du tracking cross-site, Némésis des navigateurs). Les médias financés par la publicité ont donc toujours la liberté de s'appuyer sur les cookies 1st party pour construire leurs segments d'audience. C'est un axe de travail particulièrement intéressant pour ceux qui ont des verticales bien identifiées (banque, mode, automobile…) et une audience conséquente, pour être à même d'allier data et reach. Ce sera en revanche plus compliqué pour les autres. Acheter des segments d'audience 1st party auprès des éditeurs implique que les agences et trading desks mettent en place des deals ID. Ce qui est plus chronophage que l'achat en open auction. On peut douter que les acheteurs accepteront de le faire pour tout le monde. D'autant qu'il sera difficile pour certains médias de répondre à toutes les demandes. Compliqué, par exemple, pour un site de news généraliste de proposer de la donnée intentionniste automobile.

  • Le plus : pratique qui n'est pas dans le viseur des navigateurs et qui permet à un éditeur de regagner en autonomie.
  • Le moins : seulement possible pour les médias ayant une marque, une verticale ou une audience forte

L'ID partagé

L'engouement autour du projet Unified ID 2.0 en atteste, l'adtech croit beaucoup en l'ID partagé comme moyen d'identification. Cela implique de construire des tables de matching entre chaque ID (The Trade Desk, Liveramp, Index Exchange, ID 5), comme cela a été fait pour le cookie tiers, et cela aura le mérite de fonctionner dans des environnements où les cookies tiers n'existaient pas, comme l'in-app et la TV connectée. Le problème, c'est que ces initiatives prennent du temps. Un temps que les éditeurs, confrontés à la crise du coronavirus, n'ont pas toujours. Il n'existe à date pas de solution d'identification qui permettent à un éditeur d'avoir 100% de couverture sur son audience. Et cela ne sera peut-être jamais le cas. La solution Unified ID 2.0 se cantonne à l'audience loguée des éditeurs, qui ne devrait pas dépasser les 25%. Seul un autre spécialiste de l'identification, ID 5, ambitionne d'identifier l'intégralité de l'inventaire de ses partenaires, en appliquant des méthodes probabilistes dont l'efficacité n'est plus à démontrer, assure son fondateur Mathieu Roche. Son succès auprès des éditeurs passera néanmoins par sa capacité à fédérer les acteurs de la demande (qui ne font pas toujours de cette intégration à des spécialistes de l'identification une priorité). Car pour être déployé auprès des éditeurs, il faut être capable de leur apporter du business…

  • Le plus : identifiant déterministe qui fonctionne également hors du Web (in app, TV connectée)
  • Le moins : ne sera sans doute pas opérationnel à court terme et pourra difficilement offrir du reach sur le long terme

Le single sign-on

La volonté de construire une alternative au Facebook Connect, pour permettre à l'ensemble des médias français, européens et mondiaux de loguer sans difficulté leurs audiences, ne date pas d'hier. Verimi en Allemagne, Nonio au Portugal et le Pass Media en France ont vu le jour. Chez chacun, la volonté de faciliter l'adoption par les internautes, en leur proposant une interface de connexion homogène. Chez certains, celle de mutualiser les données ainsi récoltées. Le problème, c'est que ces initiatives de single sign-on (SSO) sont locales (difficile dans ces conditions d'offrir le reach d'un Facebook) et qu'elles peinent à fédérer. Prenons le Pass Media en France. Il est pour l'instant très peu mis en avant par les (rares) médias (20 Minutes, Le JDD, L'Equipe, Paris-Match, Europe 1 et RTL) qui l'utilisent et ne permet pas une reconnaissance de l'utilisateur entre plusieurs applications mobiles. Il ne comporte pas, non plus, de volet monétisation. Raison pour laquelle certains gros acteurs français préfèrent la jouer solo, à l'image de Prisma Media, qui revendique déjà 5 millions d'utilisateurs logués. "Nous incitons le maximum d'internautes à se connecter en leur proposant de nouveaux services, pour une expérience enrichie", explique David Folgueira, directeur exécutif adjoint de la régie Prisma Media Solutions. Pour que cela marche, il est en effet indispensable de proposer à l'utilisateur des incentives de qualité.

  • Le plus : bon moyen de créer une échelle comme Facebook et Google sous réserve d'embarquer les éditeurs… et leurs lecteurs
  • Le moins : le projet du Geste, faiblement déployé par les médias français, n'évoque pas le sujet de la monétisation

Le ciblage contextuel  

Le ciblage contextuel, c'est, en quelque sorte, revenir aux origines de la publicité. Abandonner la logique d'audience planning qui a vu le jour en même temps que le programmatique, pour ressusciter celle du bon vieux médiaplanning. Bien sûr, celui-ci s'enrichit des nouvelles pratiques liées au digital. On n'est plus forcément dans un ciblage par thématique mais également par URL, mots clés présents dans le texte et, pour la version la plus aboutie, ciblage sémantique qui prend en compte la tonalité des propos, positive ou négative. Des offres comme celles de 1pluxX (qui la couple avec du ciblage utilisateur), Grapeshot, Sirdata ou encore Qwarry vont dans ce sens. L'avantage, c'est que cela est applicable pour l'ensemble de l'inventaire d'un utilisateur et que c'est moins coûteux (il suffit de passer une fois sur la page pour la qualifier, là où le ciblage utilisateur est un perpétuel work in progress). Cela permet de répondre aux enjeux de reach des acheteurs. L'inconvénient, c'est que l'on est sur une donnée qui est souvent plus pauvre que la donnée intentionniste ou transactionnelle associée au ciblage utilisateur.

  • Le plus : s'applique à l'ensemble de l'inventaire de l'éditeur
  • Le moins : donnée souvent plus pauvre qu'un ciblage utilisateur

Privacy Sandbox

On en parle beaucoup depuis que Chrome a annoncé la mort des cookies tiers. Lutte contre la fraude, mesure de la conversion et ciblage pub… La suite d'API de Chrome semble, sur le papier, proposer de véritables solutions au marché publicitaire. C'est, avec l'ID partagé, la seule solution qui permettrait de couvrir tous les cas d'usages adressés par le cookie tiers. Sur le papier… Car un an après le lancement de l'appel à projet auprès du W3C, Privacy Sandbox piétine. Les discussions, très confuses, concernent pour l'instant quasi exclusivement le retargeting. L'omniprésence de Google, via son navigateur et sa division publicitaire, refroidit certaines parties prenantes. Les annonceurs et les agences sont aux abonnés absents. On est encore loin du standard open-source, cross navigateur, espéré par Chrome…

  • Le plus : tous les use cases seraient adressés (ciblage, attribution et frequency capping seraient couverts)
  • Le moins : initiative qui porte l'empreinte de Google dont le navigateur, Chrome, serait le juge et la division publicitaire, Google Ads, une des parties prenantes