Frédéric Bellier (RadiumOne) "Avoir des fans, c'est bien, mais avoir des clients c'est mieux"

Le directeur général France du spécialiste du social media advertising explique le positionnement du groupe et ses dernières innovations.

JDN. Comment définiriez-vous le positionnement de RadiumOne ?

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Frédéric Bellier, RadiumOne. © RadiumOne

Frédéric Bellier. RadiumOne connecte deux leviers marketing que sont le social media et le display advertising. Pour cela, nous nous appuyons sur des technologies propriétaires basées sur le partage social : ShareGraph, Via.me et Po.st. ShareGraph nous permet de tracker les partages de contenus sur les réseaux sociaux, en temps réel. Puis d'établir des pools d'internautes, en relation les uns les autres, pour que les annonceurs puissent les cibler sur le principe du mimétisme social. Une personne qui échange avec un de mes clients ou une de mes cibles est susceptible d'être intéressée par mon discours. Une fois cette cible identifiée, nous allons la cibler via des campagnes de display réalisées en RTB grâce à notre technologie, sur le Web et sur le mobile.

Po.st se compose, quant à lui, d'une suite de boutons de partages (Facebook, Twitter, Instagram...) et d'un raccourcisseur d'URL, qui nous permettent de capturer la data et de l'utiliser pour communiquer sur du display. Lorsqu'un site utilise les plug-in de Facebook ou Twitter, il n'a aucune emprise sur les données récupérées lors des actions réalisées par l'internaute. Concrètement, il est incapable de répondre à une question aussi basique que "Combien d'articles ont partagées en une journée sur les différents réseaux sociaux ? Ce à quoi nos outils permettent de remédier.

Justement, vos outils sont gratuits. Sur quoi repose donc votre business model ?

Nous avons opté pour une modèle freemium. Toute la data générée vient alimenter un outil de "Share Analytics" qui nous permettra d'exploiter ces informations, en vue d'améliorer le retour sur investissement des marques sur le social media. Nous allons proposer aux éditeurs de procéder à de l'extension d'audience lorsque leur inventaire est insuffisant, en leur permettant de retoucher la cible que vise leurs annonceurs sur d'autres ad-exchanges grâce à notre DSP. Nous prélevons alors une marge sur les investissements générés.

Il en va de même pour notre raccourcisseur d'URL qui permet aux marques qui l'utilisent sur les réseaux sociaux de savoir par quels moyens et par qui sont partagés leurs contenus. Audience qu'ils pourront recibler par la suite, à l'image d'un studio de production qui pourra au moment de la sortie d'un film recibler les personnes ayant partagé son teaser, quelques mois plus tôt. Concrètement, nous voulons donner aux marques et médias les outils pour poursuivre leur élan sur les réseaux sociaux, secteur dont l'audience ne cesse de croître. Nous partons du postulat qu'avoir des fans et des followers, c'est bien, mais avoir des clients c'est mieux.

Pourquoi vous concentrer sur le "partage" plus que les "like", par exemple ?

On assiste depuis plusieurs années à l'essor du social media et à l'émergence de réseaux tels que Facebook ou Instagram dont la dynamique s'est construite à l'aune d'un dénominateur commun : le partage. Je pense qu'il est essentiel d'opérer une graduation dans la qualité des connections sociales et de comprendre qu'un "like" est un signal plus faible qu'un "partage", évènement beaucoup plus engageant. Et j'insiste sur un point : ce n'est pas ce qu'ils partagent qui nous intéressent mais avec qui. Nous ne sommes pas "Big Brother". En reliant les utilisateurs les uns aux autres, nous sommes capables de constituer des pools d'audience sociales qui vont s'avérer être d'excellentes cibles de communication, de conquête de futurs clients et prospects pour nos clients annonceurs.

Prenons l'exemple d'une marque qui a choisi une égérie pour promouvoir ses campagnes. Elle aura tout intérêt à s'adresser à la communauté de cette dernière, à identifier les utilisateurs qui ont le plus interagi avec les messages qu'elle a postée et à les recibler dans le cadre de campagnes de display advertising. C'est possible grâce à notre raccourcisseur d'URL et cela peut s'avérer très efficace en complément d'une campagne online ou offline mettant en scène ladite égérie.

RadiumOne est un groupe américain arrivé en France en mars 2012. Quel bilan tirez-vous, un an après ?

Nous fêtons notre année d'existence sur le marché français et comptabilisons désormais environ 170 éditeurs en France parmi lesquels le groupe Reed, Marie-Claire ou Menlook... Notre croissance est régulière. Notre chiffre d'affaires a été multiplié par 10 depuis juin et surtout, multiplié par deux, entre le dernier trimestre 2012 et le premier trimestre 2013. Preuve que les choses s'accélèrent. Je suis satisfait de l'accueil qui nous a été réservé par le marché même si la complexité de notre proposition de valeur rend les prises de contact parfois difficiles. Nous nous efforçons d'éviter de tomber dans un discours "tout-technologique". Nous travaillons déjà avec des grandes marques comme des plus petits sites e-commerçants. Nous avons réalisé 140 campagnes pour 48 clients, dont certaines ont été menée en collaboration avec des trading-deks. 80% de notre chiffre d'affaires est à ce jour constitué par l'achat en RTB mais nous multiplions les initiatives innovantes pour ouvrir les portes des agences au profil "early-adopter".

Vous êtes également partenaire de l'ad-exchange de Facebook. Quels sont vos premiers retours ?

L'inventaire de l'ad-exchange de Facebook peut ne pas faire rêver au premier abord. Pour autant, il est très effiace. Ce, pour plusieurs raisons. Tout d'abord, Facebook a eu l'intelligence d'en faire un outil très complémentaire des Facebook Ads qui ciblent l'upper-funnel, avec du like et de l'engagement, alors que l'ad-exchange va lui permettre de recibler des internautes qui sont déjà passés sur le site de l'internaute, en low-funnel. Comme il est dit un peu partout, l'immensité de l'inventaire de Facebook lui permet de proposer des CPM attractifs. Lesquels viennent compenser des taux de clic notoirement, décevants. Mais alors qu'on estime généralement que le taux de clic oscille entre 0,02 et 0,03% sur l'ad-exchange de Facebook, nos premiers tests nous ont permis d'obtenir une moyenne de 0,07% sur certains campagnes. Un ratio plus qu'honorable eu égard aux performances obtenues sur d'autres ad-exchanges.

Vous vous essayez également au reciblage par hashtag ?

Nous avons effectivement mis sur pied une solution de "hashtags cloud" qui permet de recenser tous les utilisateurs ayant posté ou échangé autour d'un hashtag, de façon à les recibler par la suite, en dehors de l'environnement social. Ce qui permet de ne pas dégrader leur expérience. Une marque de boisson chaude pourra ainsi cibler des utilisateurs ayant utilisé sa marque comme hashtag ou d'autres mots clés génériques tels que "boisson chaude", en leur exposant des publicités sur les ad-exchanges. Ici encore, il s'agit de s'imprégner de la logique d'audience planning du RTB.

Pensez-vous que le branding puisse trouver sa place sur le marché des ad-exchanges ?

Je pense qu'il est important, sinon essentiel, de donner de la valeur aux ad-exchanges. Et cette tâche incombe, me semble-t-il, à l'ensemble des acteurs du marché : éditeurs, annonceurs et agences. Au contraire des Américains qui fonctionnent au flair, les Français restent très cartésiens et rationnels. Depuis ses débuts, on préfère cantonner le RTB à la performance, en réservant les objectifs d'engagement et de visibilité à d'autres canaux. Cela prendra donc un certain temps pour changer les mentalités mais je ne doute pas que nous y arriverons. L'initiative que nous avons menée avec Kpsule, avec qui nous avant lancé une campagne de rich media dynamique en RTB, procède de cette intention. Et les résultats de notre première campagne test, avec des résultats bien au-dessus de la moyenne des autres acteurs testés, ont montré que le RTB a toute légitimité en matière de branding.

Ancien vice-président Sales de Dailymotion, de 2007 à 2009, Frédéric Bellier est directeur général de RadiumOne France, société américaine de "social media advertising" qui a ouvert un bureau en France en mars 2012. Frédéric Bellier a débuté sa carrière chez JP Morgan à Paris. Puis il a travaillé notamment pour Tiscali, où il fut successivement chef de l'activité de développement du commerce électronique, puis responsable des médias.