Le digital accélérateur de la lutte contre le changement climatique

"Pas de transition écologique sans le digital" : les technologies numériques ont un rôle clé à jouer dans la lutte contre le changement climatique. Mais qu'est-ce que cela signifie concrètement ?

Le dernier panel intergouvernemental sur le changement climatique et le rapport 2022 du Giec rappellent que les activités humaines sont responsables de l’émission massive de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère et que même si les investissements dans les énergies renouvelables se sont accélérés, près de 80% de l’énergie primaire consommée aujourd'hui est encore issue des énergies fossiles. Nous sommes face à un ultimatum : agir ou subir des conséquences exponentielles, et bientôt irrémédiables.

L’immense potentiel environnemental des technologies

La seule vraie solution pour lutter contre le changement climatique est l’utilisation de la technologie. Prenez l’exemple de l’énergie solaire. Alors que l’Agence internationale de l’énergie avait anticipé un développement régulier du solaire au cours des 20 dernières années, les avancées technologiques en la matière ont contribué à une croissance exponentielle du secteur, dépassant largement les prévisions. Son coût diminuant de 89% ces 10 dernières années, le solaire est passé de l’énergie renouvelable la plus chère à la moins chère, ce qui a notamment permis son adoption massive. Autre exemple : l’éolien terrestre, dont le coût a chuté d’environ 70%, attestent aussi que dans les bonnes conditions, les nouvelles technologies peuvent connaître une adoption rapide.

Toutefois, pour produire de l’énergie, la technologie seule ne suffit pas. Tant que nous n’optimiserons pas l’efficacité de la production d’énergie renouvelable, nous n’aurons pas les moyens de combattre le changement climatique.

La connectivité comme catalyseur

C’est précisément à ce niveau que la connectivité a un rôle majeur à jouer. L’une des principales problématiques des réseaux de distribution d’électricité aujourd'hui est de maintenir l’équilibre du système dans sa globalité. Par équilibre, il faut comprendre que la demande et l’alimentation en énergie doivent être en adéquation, sans quoi le système devient instable. C’est là qu’un réseau de communication haut débit, puissant et dynamique (avec transmission de données en temps réel) apporte une réelle valeur ajoutée.

La distribution d’énergie doit évoluer vers un modèle axé sur le comportement des consommateurs et passer d’un réseau standard à un réseau intelligent (smart grid). La transition vers un réseau distribué, hautement complexe, dans lequel chaque appareil consommant de l’électricité devient un nœud intelligent et actif du système, permettrait une amélioration considérable de l’efficacité énergétique. 

En intégrant la connectivité dans les réseaux de distribution d’énergie, il est possible de créer des systèmes entièrement digitalisés et pilotés par l’IA, capables d’identifier qui a besoin d’électricité, où et quand, et de la fournir au bon moment et au meilleur tarif. Une évolution synonyme d’économies pour les entreprises qui peuvent anticiper leur consommation grâce à la maîtrise de la demande en énergie. La facture baisse également côté consommateurs, qui bénéficient d’une énergie fiable sans émissions carbone, et plus important encore, c’est toute la planète qui réduit sa dépendance aux énergies fossiles. 

L’idée est bonne mais fonctionne-t-elle ?

Oui et mieux encore : elle est d’ores et déjà en application à travers le monde. Le campus Siemens à Vienne, en Autriche, est un bon exemple. Il est équipé d’un microréseau électrique local combiné à un réseau 5G privatif sécurisé, qui regroupe un millier de points de données envoyés par 34 terminaux différents qui communiquent en temps réel et contrôlent automatiquement la quantité d’énergie solaire alimentant le réseau, pour optimiser la consommation. À lui seul, le système permet d’économiser 200 tonnes de CO2 chaque année. Appliquée à l’échelle des 14 millions de sites industriels présents sur la Terre, cette approche a de quoi réduire drastiquement les émissions carbone.

Sur le site de Lufthansa Technik à Hambourg, des flux vidéo haute résolution de pièces moteur peuvent être transmis en direct aux clients depuis le centre de maintenance, via le réseau 5G du campus. Lors des opérations de maintenance, les moteurs des avions sont démontés et chaque pièce doit être inspectée par des experts. Jusqu’à présent, les clients devaient se rendre à Hambourg pour procéder à ces inspections avec les techniciens et évaluer les réparations. Grâce à ses débits et à sa fiabilité, le réseau 5G industriel offre la possibilité de réaliser ces opérations à distance, réduisant de manière considérable leur empreinte carbone et favorisant des démarches éco-responsables dans un secteur très polluant. 

Ces exemples ne sont qu’un infime aperçu des possibilités. À l’heure actuelle, seulement 30% de l’économie mondiale est passée au digital. La possibilité d’une transformation digitale chez les 70% restants montre qu’il reste encore beaucoup à faire mais aussi que la marge de progression est immense pour réduire notre impact sur la planète.

Les perspectives d’impact

Après avoir vu l’impact immédiat du digital, intéressons-nous maintenant à son potentiel futur. Les jumeaux numériques ont été inventés pour nous aider à comprendre le présent et à anticiper l’avenir. C’est un outil extrêmement important dans notre arsenal de lutte contre le changement climatique. Utilisé dans tous les secteurs d’activité, cet outil d’aide à la prise de décisions réalise des simulations et des analyses de scénarios ultra réalistes associant le monde physique et l’univers digital. Il nous permet d’anticiper l’impact de certaines décisions et de faire les choix les plus responsables le plus tôt possible. 

En créant des jumeaux numériques de villes et de pays entiers, on pourra voir les effets du changement climatique sur les forêts ou la banquise en temps réel, et ainsi analyser les conséquences des émissions de CO2 bien plus efficacement. Ils nous permettent également de cartographier les infrastructures de transport, de fourniture d’énergie et de services publics sur des zones très étendues et de modéliser des scénarios afin de comprendre les changements à venir et de faire les meilleurs choix possibles pour notre planète.

Le rôle clé de la collaboration

Pour que le digital puisse libérer son plein potentiel en matière de développement durable, le secteur des télécommunications a besoin de trois leviers clés.

  1. Le spectre radiofréquence : la capacité réseau nécessaire pour favoriser la digitalisation et les initiatives durables est colossale et pour y parvenir, il faut du spectre. Le secteur a besoin de nouveaux spectres à prix abordable sur les bandes basses, moyennes, hautes et ultra hautes, en particulier pour le haut débit mobile, afin d’améliorer la connectivité des entreprises et réduire leurs émissions.
  2. Pour atteindre l’objectif zéro émission nette, il faut mobiliser l’ensemble des acteurs. Les gouvernements et les contribuables ne peuvent pas réunir, seuls, les investissements nécessaires à la transition écologique. Une autre approche s’impose.
  3. Les entreprises doivent faire le bon choix en misant sur la technologie. Bien que cela puisse sembler idéaliste, c’est vital pour modifier la trajectoire de la crise climatique. Il est impératif de développer des produits plus performants et moins énergivores, notamment en intégrant l’IA dans les réseaux ou en déployant des chipsets avancés qui consomment 50% d’énergie en moins pour le haut débit fixe. De la même manière, il faut changer les systèmes de refroidissement des stations de base, en utilisant du liquide au lieu de l’air, ce qui permet de réduire les émissions de CO2 des stations de 80%. Si chacun apporte sa pierre à l’édifice en adoptant cette approche, il participe à l’effort nécessaire pour limiter les effets du changement climatique.

Pas de transition écologique sans le digital

Les technologies réseau numériques sont une formidable opportunité pour le secteur des télécoms de réduire massivement ses propres émissions, mais aussi celles de ses clients.

Jusqu’ici, environ 70% des investissements des TIC à l’échelle mondiale ont été consacrés à des secteurs déjà centrés sur le digital, tels que l’informatique, les réseaux de communication et les médias. Aujourd’hui, nous devons aller plus loin et utiliser les réseaux pour mettre la transformation digitale au service de la lutte contre le changement climatique. 

Nous devons sérieusement commencer à digitaliser les secteurs plus traditionnels à travers le monde et utiliser la technologie pour avoir un réel impact. Les acteurs du secteur ont une lourde responsabilité sur les épaules et nous nous devons de la prendre à bras-le-corps.