David Hahn (GoFundMe) "Nous avons collecté plus d'1 million d'euros de dons en cinq mois en France"

Fondée en 2010, la plateforme de crowdfunding US dédiée aux projets sociaux se lance officiellement dans l'Hexagone. Son président explique pourquoi.

David Hahn, président et directeur produit de GoFundMe. © GoFundMe

JDN. Pourquoi avez-vous choisi de lancer GoFundMe en France ?

David Hahn. Notre stratégie consiste simplement à suivre notre communauté de donateurs. Sur nos 40 millions de financeurs répartis à travers le monde, nous nous sommes aperçus qu'il y avait beaucoup de Français. C'est d'ailleurs un Français (Jérôme Jarre, un influenceur très suivi sur Snapchat , ndlr) qui a lancé une des plus grosses campagnes sur notre plateforme. En trois mois, il a permis de lever plus de 2,6 millions de dollars auprès de 90 000 donateurs pour remplir un avion d'eau et de nourriture pour la Somalie. C'est très impressionnant ! A Paris, on voit aussi beaucoup de groupes de volontaires qui lèvent de l'argent pour fournir des tentes, des sacs de couchage et de la nourriture aux réfugiés présents en France.

Quels sont vos objectifs dans l'Hexagone ?

Nous voulons montrer aux donateurs français que GoFundMe est la plateforme la plus sûre pour donner de l'argent en ligne. Nous avons déjà lancé la version française en février dernier. Nous voulions régler quelques détails, notamment linguistiques, avant de l'annoncer officiellement. Ces dernières semaines, plusieurs centaines de campagnes actives ont été lancées sur la plateforme alors que nous n'avons pas encore fait de communication. Nous avons déjà collecté plus d'1 million d'euros en cinq mois. Près de 50 000 dons ont déjà été enregistrés, c'est un très bon début.

Avez-vous des bureaux en France ?

Nous n'avons pas de locaux physiques mais nous avons une équipe de deux personnes dont l'objectif est de faire connaître la plateforme au plus grand nombre.

Kickstarter s'est lancé il y a deux ans en France et ne rencontre pas le succès escompté à cause du manque d'accompagnement des projets. Avez-vous envisagé des solutions pour faire face à cet obstacle ? 

"Près de 50 000 dons ont déjà été enregistrés sur la version française de GoFundMe"

C'est un point sur lequel nous avons beaucoup réfléchi avant de nous lancer à l'international (GoFundMe est aussi présent au Royaume-Uni, au Canada, en Australie et récemment en Espagne, ndlr). Nous avions pour objectif de lancer exactement le même niveau de service qu'aux Etats-Unis. Cela signifie avoir un service "client" disponible 24/24h et 7/7j et l'obligation d'avoir une réponse à une question en moins de cinq minutes dans votre langue. C'est très important pour nous car la plupart des gens n'ont jamais fait de levée de fonds auparavant, c'est souvent une première expérience. Nous leur donnons des conseils sur comment bien écrire leur histoire, comment garder de l'interaction avec la communauté des donneurs en les remerciant régulièrement et en les mettant au courant de l'avancée du projet. De notre côté, nous prélevons une commission de 5% du montant levé.

Quelles sont les catégories qui mobilisent le plus sur GoFundMe ?

Dans tous les pays confondus, la première est la santé. De nombreux projets servent à financer des procédures médicales spécifiques. Même si ces procédures sont payées, il y a toujours d'autres dépenses importantes à côté comme la prise en charge du voyage. Même des pays avec des bons systèmes de santé, comme le Canada et l'Australie, ont beaucoup de campagnes de ce type. La deuxième catégorie est la communauté. Cela recouvre des projets très divers, de la librairie du quartier qui a des problèmes financiers à la rénovation de l'église du village. C'est simplement quelqu'un qui recherche dans sa communauté la plus proche un soutien. La troisième catégorie est l'éducation. Les campagnes visent souvent à aider les jeunes à payer leurs études ou à partir étudier à l'étranger. Il y a aussi deux types de campagnes. Soit c'est une campagne pour lever de l'argent pour soi-même ou une campagne pour aider les autres. Le plus incroyable est qu'il y a plus de campagnes pour aider les autres.  

Facebook a lancé en avril dernier un outil qui vient directement vous concurrencer. Vous sentez-vous menacé ?

"Il n'y aucune autre plateforme qui ait aujourd'hui 40 millions de donateurs dans le monde"

Je pense qu'aucune autre plateforme n'offre notre niveau de confiance et d'accompagnement. Si vous êtes un organisateur de projet, votre objectif est d'utiliser une plateforme où vous pouvez lever le plus d'argent possible. Le réseau social est évidemment un très bon canal pour y parvenir mais il faut une approche multicanal pour réussir. Il faut les SMS, les emails mais aussi la capacité à rassembler une communauté de donneurs. Il n'y aucune autre plateforme qui ait aujourd'hui 40 millions de donateurs dans le monde.

Prévoyez-vous de vous implanter dans d'autres pays ?

Pas pour le moment. Le principal axe de notre stratégie est de nous assurer que la plateforme fonctionne bien et qu'elle apporte toutes les garanties dont les organisateurs et donateurs ont besoin. Nous sommes encore en train de découvrir les spécificités des marchés étrangers. Au fond, notre plateforme est mondiale. On l'a vu avec la campagne pour la Somalie. Des dizaines de milliers de personnes issues de plusieurs pays se sont rassemblées pour cette cause. Nous pensons que les gens qui donnent et aident les autres vont potentiellement devenir des organisateurs de campagnes. C'est cette communauté qui nous rend si spécial.