David Giblas (Malakoff Médéric) "Nous devons faire comme Amazon et proposer le one click à nos utilisateurs"

A l'approche de La Nuit du directeur digital, le directeur innovation, digital et data de Malakoff Médéric revient sur la mise en place de nouvelles méthodes de travail chez le groupe de protection sociale.

JDN. Quel est votre projet le plus innovant mené en 2017 ?

David Giblas, directeur innovation, digital et data de Malakoff Médéric. © Jean Chiscano

David Giblas. La création d'une direction innovation, digital et data, composée d'une centaine de personnes, 60 internes et 40 externes au groupe. Avec cette nouvelle direction, nous avons mis en place un dispositif de transformation de l'entreprise qui tourne autour de trois composantes : le projet, les Hommes et la technologie. Quand nous devons livrer un projet comme un portail ou un scoring de la fraude, il est important de le livrer à temps mais aussi de vérifier que les hommes et les femmes sont bien montés en compétences et qu'on ne s'est pas endetté d'un point de vue du système d'information.

Comment est désormais développé un projet chez Malakoff Médéric ?

Aujourd'hui, tous nos projets combinent les métiers, ma direction et la DSI. Nous avons la particularité de fonctionner en mode squad, c'est-à-dire en équipe de 12 à 15 personnes regroupant l'ensemble des compétences, avec un product owner à sa tête, et qui provient d'une direction métier, car c'est lui qui s'engage sur la valeur client. Ma direction est en charge des immersions clients, de la conception et du design de l'expérience client et apporte un support méthodologique selon les besoins. La DSI s'occupe quant à elle de fabriquer les produits digitaux et data mais c'est ma direction qui la finance. Les DSI ont en général du mal à financer leurs projets car ce n'est pas forcément compris du côté des métiers. Ma direction est dotée d'un budget de 100 millions d'euros sur 5 ans, dont un tiers est dédié à la mise en place de nouveaux socles technologiques. Avec cette nouvelle méthode de fonctionnement, nous livrons le produit MVP (minimum viable product, ndlr) en huit mois avec des sprints de trois semaines. Aujourd'hui nous comptons 30 squads qui impliquent environ 400 personnes dans le groupe (sur 5843 collaborateurs, ndlr). Nous avons également lancé plusieurs commandos basés sur la méthode Google Sprint sauf qu'ils durent trois semaines au lieu d'une. Les équipes multidisciplinaires traitent des sujets "serpent de mer" comme par exemple l'affichage des garanties de manière plus explicite sur un site web. Nous en avons réalisé trois au total.

Quel est votre rôle dans cette nouvelle organisation ?

Il consiste à aider la DRH et la DSI à se transformer. La subtilité de mon rôle est d'être au milieu de toute cette organisation sans être donneur de leçons, sans s'approprier leur sujet tout étant engagé dans le processus de réalisation des projets. L'exercice le plus complexe pour moi est de trouver la séquence. Quelle est la bonne séquence pour être certain de travailler sur les sujets les plus prioritaires dans la bonne séquence de mise en œuvre ? Il y a des choses qu'on ne peut pas faire dans le mauvais ordre si on n'a pas établi les fondations, notamment côté data.

Avez-vous rencontré des difficultés pour mettre en place cette nouvelle manière de travailler ?

Comme dans toute grande entreprise, notre organisation repose sur un modèle chaîne de valeur, là où nos squads agiles sont transversales. La transversalité de ces squads, le rythme et la méthode viennent donc percuter l'organisation en place qui finalement le vit plutôt bien. L'autre contrainte à laquelle j'ai dû faire face est la complexité des systèmes d'information. Ils ne sont pas forcément aptes à s'intégrer naturellement dans une architecture avec des front, du big data, du cloud… Nous avons aussi eu des difficultés à ajouter de nouvelles compétences comme des scrum masters, les designers, les ethnologues… Au début, tout le monde cherchait sa place, c'est normal. Enfin, il a fallu que les équipes entrent dans des rythmes de projets plus courts et plus exigeants. Une période de 6-8 mois semble longue mais les trois semaines de cycles sont courtes car il faut produire quelque chose pendant cette période. En général, les cinq premiers sprints sont assez durs, après l'équipe trouve son fonctionnement.

Quels sont vos objectifs pour parfaire cette transformation ?

Nous aimerions que l'année prochaine nos produits soient livrés en 6 mois. Sur le volet de la simplification, nous devons faire comme Amazon, c'est-à-dire arriver à ce fameux "one click" pertinent pour l'utilisateur. En fait, nous voulons être l'Amazon de l'assurance BtoB. Cela nous prendra peut-être un an ou deux mais nous y arriverons.

Résumé du projet :

  • En quoi le projet est innovant ? 

"Notre projet de transformation associe des compétences multidisciplinaires en mode squad et avec des budgets conséquents. Le triple rôle projet, compétences et technologie est inédit pour un grand groupe"

  • En quoi le projet est stratégique ?

"Il est clairement identifié et suivi par tous, direction générale et comité exécutif compris. D'ailleurs, ma direction est directement rattachée à la direction générale"

  • En quoi le projet est transformateur ? 

"Ce projet est diffusé partout dans le groupe et se focalise à la fois sur la dimension humaine et la dimension technologique. Pour, au final, apporter une nouvelle expérience et plus de valeur client"

  • En quoi le projet est accélérateur ?

"Nous avons changé de rythme de travail. Nous sommes passés de projet à horizon 18 mois à des projets de 6 à 8 mois dans une culture d'exécution. Nous passons moins de temps à penser et plus de temps à faire, expérimenter et s'adapter"

Le JDN propose pour la quatrième année consécutive le 19 juin prochain un événement destiné à récompenser les meilleurs chief digital officers de France. Pour en savoir plus : La Nuit du directeur digital