Revolut lève 500 millions de dollars et se valorise 5,5 milliards

Revolut lève 500 millions de dollars et se valorise 5,5 milliards La néobanque britannique revendique 10 millions d'utilisateurs dans le monde dont près d'un million en France.

Levée de fonds à 500 millions de dollars : check. Revolut annonce un méga tour de table mené par le fonds américain TCV (Airbnb, Facebook, LinkedIn, Netflix…) aux côtés d'investisseurs existants, sans préciser lesquels. Sa dernière levée de fonds de 250 millions de dollars en avril 2018 a été menée par le fonds russe DST Global, aux côtés d'Index Ventures et Ribbit Capital. Au total, la néobanque britannique a levé plus de 836 millions de dollars depuis son lancement en 2015. Ce nouveau tour de table n'est pas une surprise. "Nous voulons lever au moins 500 millions de dollars en equity et potentiellement, à un stage plus avancé, jusqu'à 1 milliard de dollars en dette convertible", avait déclaré son patron, Nikolay Storonsky, à Reuters en novembre dernier. 

Ce financement la valorise 5,5 milliards de dollars, soit deux milliards de plus que sa concurrente allemande N26, dont le dernier tour de table en juillet 2019 s'élevait à 170 millions de dollars. Revolut devient ainsi la deuxième fintech européenne la plus valorisée, ex-aequo avec la suédoise Klarna, spécialisée dans le paiement fractionné. La place de numéro un est toujours attribuée au prestataire de paiement néerlandais Adyen (25 milliards d'euros), coté en bourse depuis juin 2018. Revolut joue désormais dans la cour des (grands) Américains puisque son homologue Chime, qui a levé 500 millions de dollars fin 2019, est valorisée 5,8 milliards de dollars et la brésilienne Nubank (400 millions de dollars levés en juillet 2019) a atteint une valorisation de 10 milliards de dollars.

"46% des utilisateurs de Revolut se servent de leur compte chaque mois et 14% quotidiennement" 

Ce tour de table va lui permettre de poursuivre son insatiable conquête de clients. La néobanque vise les 100 millions d'utilisateurs à travers le monde d'ici 2023. Aujourd'hui, elle en revendique 10 millions. Ils étaient 8 millions en octobre 2019. Mais ces chiffres sont à relativiser puisque seulement 46% ses utilisateurs se servent de leur compte chaque mois et 14% quotidiennement (chiffres datant d'octobre 2019). Comme de nombreuses banques mobiles qui proposent une offre gratuite, Revolut peine à devenir un compte principal. Les consommateurs restent encore attachés à leurs banques traditionnelles qui fournissent de plus en plus de fonctionnalités issues des néobanques et jouent sur la fibre de la sécurité (bien que Revolut ait aussi une licence bancaire). "Nous allons maintenant nous concentrer sur le déploiement des opérations bancaires en Europe, l'augmentation du nombre de personnes utilisant Revolut en compte courant", indique Nikolay Storonsky dans un communiqué.

Pour augmenter sa base d'utilisateurs, Revolut compte sur son expansion internationale, notamment les Etats-Unis, dont le lancement a eu lieu fin 2019. Elle doit faire face à plusieurs néobanques américaines mais aussi à N26, présente outre-Atlantique depuis juillet 2019, en partenariat avec Axos Bank. Au total, la fintech londonienne est présente dans 36 pays, dont 31 pays de la zone euro. Revolut devrait aussi se lancer en Amérique Latine et d'autres pays asiatiques (elle est à Singapour depuis fin 2019) mais n'a pas encore précisé de date.

Ce financement va aussi lui permettre d'embaucher en masse. En septembre dernier, la start-up a annoncé qu'elle recruterait 3 500 personnes d'ici l'été 2020 pour atteindre la barre des 5 000. Elle compte actuellement 2 000 salariés répartis dans 23 bureaux. Un véritable challenge pour cette néobanque qui a été critiquée sur ses méthodes RH agressives et ses méthodes de recrutement peu conventionnelles, comme l'a montré une grande enquête de The Wired

Vers la rentabilité

Ce nouveau tour de table va également lui servir à améliorer l'expérience utilisateur de l'application et développer de nouvelles offres tels que le prêt aux particuliers et aux entreprises. Revolut propose déjà du crédit à la conso au Royaume-Uni via un partenariat avec la plateforme de prêt entre particuliers Lending Works. La néobanque prévoit aussi de proposer son compte d'épargne à 1,35% (en partenariat avec Paragon Bank) en dehors du Royaume-Uni. De nouvelles fonctionnalités sont aussi en préparation pour les deux versions payantes de la néobanque.

Cette diversification devient indispensable pour cette fintech qui génère encore peu de revenus. Sur ses 58,2 millions de livres sterling de chiffre d'affaires en 2018 (69,4 millions d'euros), 71,1% sont tirés des frais d'interchange et de l'utilisation de la carte, d'après son dernier rapport financier. Les 28,9% restants proviennent donc de ses offres premium, ses compte business et d'autres services (achat de crypto-monnaies par exemple). Certes, son chiffre d'affaires a augmenté de 355% entre 2017 et 2018 mais ses pertes ont bondi de 122% sur la même période, pour atteindre 32,8 millions de livres sterling (39,1 millions d'euros). Dans un communiqué, Revolut indique "rechercher la rentabilité".

En France, Revolut continue son petit bout de chemin et devrait bientôt passer la barre du million d'utilisateurs, rattrapant ainsi N26 qui a atteint ce seuil en octobre dernier. L'Hexagone est le deuxième marché de Revolut, derrière le Royaume-Uni. En revanche, le nombre d'utilisateurs actifs mensuels et quotidiens ne sont pas partagés, tout comme le coût d'acquisition. Revolut dépense très peu en marketing (principalement des réseaux sociaux) contrairement à sa concurrente allemande qui s'est affichée dans le métro parisien et a boosté son marketing digital ces derniers mois.

Ce budget quasi inexistant va augmenter en 2020 puisque le bureau français vient tout juste de se renforcer. Un nouveau responsable de la France et du Benelux a pris ses fonctions fin 2020 alors que ce poste est resté vacant pendant près de 18 mois. Sept personnes occupent le bureau parisien situé dans un Wework dont des business developpers et marketing managers. L'équipe en charge du service client français est quant à elle basée à Londres. Objectifs du bureau français : continuer à faire grandir la base utilisateurs, particuliers et entreprises (elle compte plusieurs dizaines de milliers de clients entreprises en France) et rester "ouvert aux partenariats locaux. C'est un axe de croissance", nous indiquait Georges Nilles, head of growth France et Benelux, en janvier dernier.