Le financement alternatif accélère en France

Les premières fintech sont apparus dans les années 2010 bousculant alors l'univers des services financiers les moins régulés. Seules les opérations de crédits, nécessitant des agréments bancaires spécifiques, leur résistaient encore. Une limite qu'elles sont en train de faire tombe aujourd'hui...

Par Stéphane Olmi, Vice-président de Gimar&Co et Adrien Choquet, Directeur Exécutif chez Gimar&Co

Il y a déjà une dizaine d’années que les premières fintech ont fait leur apparition sur le marché, bousculant l’univers des services financiers les moins régulés. Seules les opérations de crédits, nécessitant des agréments bancaires spécifiques, leur résistaient encore. Une limite qu’elles sont en train de faire tomber, grâce aux développements de financements alternatifs qui voient naître dans leur sillage de nouvelles classes d’actifs.

Répondre à de nouveaux besoins et usages

Le financement traditionnel proposé par les banques conserve une dimension très formelle, peinant à s’adapter aux nouveaux usages liés à la transformation digitale des entreprises, de l’économie et de la société en général. Ainsi, de plus en plus de Fintech cherchent à se positionner sur ce créneau, en proposant des offres sur mesure pour adapter les financements traditionnels aux parcours 100 % digital et financer les actifs jusqu’ici peu couverts par les banques : campagne marketing, plate-forme Saas, avance de trésorerie en lien avec une activité digitale...

Certaines réinventent des services que les banques adressent de façon inadaptée. C’est le cas du belge Koalaboox, vendu à Cegid, dans le domaine de l’affacturage, qui propose de racheter les factures au cas par cas et non plus au volume annuel comme cela se pratique au sein des organismes bancaires traditionnels. On peut également citer Pledg, qui propose à des marchands comme Décathlon de gérer le financement en 1, 2, 3 ou 4 fois sans frais sur leurs sites en ligne, en avançant la somme totale aux marchands dès l’achat et en s’occupant par la suite de collecter les échéances auprès du client final, sans passer par la parcours complexe du crédit à la consommation.

D’autres Fintech adaptent le financement aux nouveaux modèles économiques. La start-up Aria propose à des acteurs comme Comet, la plate-forme de mise en relation entre freelances et entreprises, de régler les émoluments de ses

utilisateurs au démarrage de leurs missions, se chargeant ensuite de récupérer l’argent auprès de leurs employeurs. Plus récemment, des start-up comme Silvr, permettent aux e-marchands de financer des actifs immatériels, tels que les campagnes marketing ou encore du chiffre d’affaires à venir pour les acteurs du Saas. On voit ainsi apparaitre de nombreuses propositions innovantes sur le terrain du financement, là où les banques sont peu présentes, voire inexistantes, soit parce que ces opérations adressent de trop petits volumes, soit parce que leurs coûts de fonctionnement sont trop élevés, soit parce qu’elles concernent des actifs immatériels dont elles maitrisent mal le risque.

Des prêteurs alternatifs pour des financeurs alternatifs

Ces nouveaux modes de financement alternatifs progressent à vitesse grand V en Europe et posent la question des prêteurs. En effet, les Fintech qui proposent ces modèles disruptifs n’ont pas les mêmes ressources financières et les mêmes accès à la liquidité qu’une grande banque.

C’est dans ce cadre qu’interviennent depuis 2 ou 3 ans en France des sociétés de gestion agréées par l’AMF spécialisées dans le financement alternatif. Déjà très répandus dans les pays anglo-saxons, ces prêteurs d’un nouveau genre se positionnent sur le marché de la dette privée et affectionnent particulièrement les nouvelles classes d’actifs créées par les Fintech tels que le BNPL, l’avance de trésorerie, le Revenue Based Financing, l’avance sur salaire, etc.

Ils interviennent sur un champ délaissé par les banques traditionnelles dont les coûts d’approche sont trop élevés et la culture inadaptée. En France, ces fonds alternatifs sont proposés par des sociétés de gestion spécialisées, souvent anglo-saxonnes comme Fasanara Capital, ou quelques français comme Eiffel Investment ou Smart Lenders et, plus récemment, par des investisseurs institutionnels, à la recherche d’un risque différent et d’un rendement intéressant. Ces fonds devraient à terme être disponibles pour les investisseurs privés à la recherche d’alternatives aux placements traditionnels, tels que les fonds Euros, l’immobilier et le Private Equity.

Une évolution positive, qui s’inscrit dans la mutation des usages liée à la révolution digitale, pour laquelle les entreprises françaises, notamment les TPE, ont plus que jamais besoin de financements alternatifs, face à des banques aujourd’hui incapables d’adresser leurs besoins dans ces domaines.