Eric Petitfils (Klarna) "Plus de 1,5 million de consommateurs français utilisent Klarna"

C'est dans un contexte de rumeur de dévalorisation et de suppression d'effectif que Klarna et sa branche française fêtent leur un an dans l'Hexagone. Eric Petitfils, directeur France de la fintech de paiement, a choisi le JDN pour parler bilan et actualité.

JDN. Lors du lancement de Klarna en France en juin 2021, quelle était la stratégie ?

Eric Petitfils, directeur de Klarna France © Klarna

Eric Petitfils. La stratégie de Klarna pour son déploiement international, c'est de développer à la fois une offre marchands et une offre consommateurs. On a commencé par la première. L'idée étant de partir d'une solution de paiement et de la compléter avec nos services d'affiliation, de connexion entre consommateurs et marchands et de digitalisation des cartes de fidélité dans un wallet. Pour l'offre consommateur on a lancé en novembre 2021 l'application tout-en-un qui leur permet d'utiliser tous les services de Klarna. En France, nous sommes surtout connus pour le paiement fractionné, mais à l'échelle internationale ,notre volume de "paiements maintenant" représente environ 40% du volume total de paiements. Nous avons une stratégie d'adaptation au marché local.

Quelles spécificités du marché français avez-vous identifiées ?

En mai dernier, Klarna a mené une étude auprès de 109 décisionnaires et gérants d'entreprise dans le retail. De plus, nous avons constaté que les deux tiers des Français préféraient faire du shopping en magasin. C'est l'une des particularités que nous avons repérées. En ce qui concerne les marchés britanniques et allemands, cette proportion retombe respectivement à 42 et 50%. On s'est rendu compte que la plupart des Français sont freinés par le manque de transparence des coûts de livraison, de retour produit, sur les délais de livraison… Cela constitue un frein à l'expérience d'achat online. C'est l'une des différences que l'on voit avec les autres marchés. L'autre chose c'est que la France est un pays où le paiement fractionné est de plus en plus proposé et utilisé.

Un an après le lancement de Klarna en France, quel bilan dressez-vous ?

Un bilan positif. Nous avons aujourd'hui plus de 1,5 million de consommateurs français qui utilisent Klarna. C'est l'un des pays européens où l'on a le plus vite atteint le million de consommateurs, auxquels s'ajoutent 3 000 marchands qui proposent Klarna sur leur checkout. En un an d'activité sur le marché français, l'application Klarna a généré environ 3 millions de clics vers les sites de nos commerçants partenaires. Nous avons noté un engouement pour l'application "tout en un" avec 840 000 téléchargements. Notre application permet notamment aux consommateurs de trouver de l'inspiration, de découvrir de nouvelles marques, d'avoir accès à des bonnes affaires, de gérer leurs retours et livraisons et de disposer de données sur les bilans carbone. Ce genre de préoccupations est particulièrement répandu chez les jeunes. Les consommateurs français qui utilisent Klarna sont en moyenne âgés de 32 ans.

Au mois de mai 2022, Klarna a annoncé la suppression de 10% de ses effectifs, soit 700 postes. Qu'est-ce qui le justifie ?

Klarna est une entreprise qui a cru très rapidement ces dernières années, non seulement au niveau organique, mais aussi en termes d'acquisitions d'entreprises. En 2021 on a racheté des entreprises comme le wallet de cartes de fidélité Stocard, la plateforme d'influenceurs APPRL, le comparateur de prix Pricerunner. Ces achats ont fait grossir nos effectifs. L'annonce de ces suppressions de postes est motivée par une politique de rationalisation de notre organisation. Il s'agit notamment de fusionner les équipes commerciales et produit. Nous l'avons fait car nous notons un changement économique très visible (remontée des taux d'intérêt, de l'inflation, ndlr). C'est aussi un moyen d'envoyer un message à nos investisseurs et de leur montrer que l'on est capable de revenir à une forme de stabilité économique.

Dans quelles mesures cette décision impactera-t-elle la branche française ?

Il n'y a pas de suppression d'effectif prévue pour la partie française.

"Il n'y a pas de suppression d'effectif prévue pour la partie française"

L'étude Galitt PayObserver réalisée en mai 2022 fait ressortir que 43% des Français interrogés ont cité la peur de  l'endettement comme barrière au paiement fractionné. Que leur répondez-vous ?

Nous sommes conscients de cette crainte autour du paiement fractionné. Nous avons vocation à protéger le consommateur. Cela signifie que Klarna ne touche pas d'intérêt sur des encours de dettes. On s'assure que les consommateurs sont en capacité d'acquérir et de rembourser un bien. L'étape du scoring est en cela très importante. Nous sommes une banque réglementée ce qui implique des responsabilités. Nous avons vocation à fidéliser les clients à l'écosystème Klarna tout en les protégeant. Un client qui serait dans l'incapacité de rembourser serait exclu de notre écosystème et Klarna ne pourra plus lui prêter. Ce qui forcément ne fait pas nos affaires.

Le Royaume-Uni a annoncé vouloir resserrer les vis au niveau de la régulation des entreprises proposant des services de paiement fractionné. Cela vous inquiète-t-il ?

Nous aimons la règlementation. Nous travaillons avec les régulateurs européens pour protéger les consommateurs. La subtilité réside dans le fait qu'il faille les protéger pour de bonnes raisons. A savoir en gardant une proportionnalité par rapport au risque du produit. Il faut donc faire une différence entre les produits avec et sans intérêt. Nous devons identifier la valeur ajoutée de chaque produit et déterminer le degré de risque associé pour le consommateur. Tout l'enjeu des discussions avec les régulateurs, c'est de définir des catégories de produit et des réglementations spécifiques à chacune de ces catégories. Nous ne sommes pas inquiets pour autant.

Quels sont les chantiers à venir ?

Nous allons continuer à développer nos offres à destination des consommateurs mais aussi des commerçants. Certains produits ne sont pas encore disponibles sur le marché français et nous allons les lancer dans les prochains mois. Nous souhaitons également amplifier notre activité autour du stocard en proposant davantage de partenariats.