Philippe Salle (Foncia) "Foncia a préparé des guides par métier pour préparer le déconfinement"

Le JDN poursuit sa série d'interviews de dirigeants face au coronavirus. Le président du groupe de services immobiliers résidentiels Foncia revient sur l'apport du digital pour réagir à la crise.

Philippe Salle, président de Foncia. © Foncia

JDN. Quel a été l'impact de la crise sanitaire sur vos activités et comment vous êtes-vous organisé pour y faire face ?

Philippe Salle. Nos 500 agences ont été fermées et les assemblées générales prévues jusqu'au 30 juin ont été reportées de six mois. Nos activités de location et de transactions, qui représentent  2 000 de nos 8 000 salariés, sont celles qui ont été le plus impactées car les gens ne peuvent plus se déplacer et l'on ne peut plus louer ou vendre des biens immobiliers. Les 5 500 autres salariés du groupe en France sur les métiers de syndics, de gestion locative et fonctions support sont en télétravail. 500 collaborateurs ont continué à se rendre en agence en rotation pour traiter le courrier, car nous recevons beaucoup de paiements par chèque. Nous avions fait des investissements conséquents dans le digital depuis deux ans et nous étions déjà équipés de la plateforme Fuze pour les visioconférences. Son déploiement national a été finalisé en début d'année. Cela nous a permis de continuer les réunions et d'échanger avec les clients de chez soi. Grâce à la technologie, Foncia est ainsi resté au travail pendant la crise.

Quelles initiatives avez-vous mises en place pendant la crise pour soutenir vos clients et préparer la reprise de l'activité ?

Il était important de communiquer de manière plus fréquente durant cette période exceptionnelle. Sur notre site web, nous avons mis en place un espace de FAQ pour répondre aux questions de nos clients, dont beaucoup s'interrogeaient sur les délais d'intervention. Foncia a également lancé une newsletter hebdomadaire répertoriant des informations pratiques. Nous avons veillé à ne pas être répétitifs de semaine en semaine. Nous avons notamment partagé des tutoriels sur la confection de masques pour préparer le déconfinement.

"La norme sera de rester en télétravail au moins jusqu'à fin août."

Comment planifiez-vous le déconfinement ?

A partir du lundi 11 mai, nous rouvrirons nos agences de manière progressive, avec un roulement d'un tiers du personnel en fonction des sujets. Il y aura des restrictions sur l'accueil. Dans un premier temps, nous n'accueillerons le public que sur rendez-vous. On est en train de réorganiser les salles d'attente pour avoir l'espacement suffisant. A partir du mois de juin, nous verrons comment faire évoluer ce dispositif en fonction des consignes gouvernementales. Au niveau de l'entreprise, la norme sera de rester en télétravail au moins jusqu'à fin août.

Quelles sont pour vous les clés pour réussir le déconfinement ?

Nous avons élaboré des guides pour nos équipes, très précis pour chacun de nos métiers : pour la gestion des copropriétés, les transactions ou la location vacances, indiquant ce qu'il faut faire ou ne pas faire. Par exemple, les personnes ouvrant le courrier devront porter des gants. Le port du masque sera obligatoire dans les bureaux. Nous avons aussi instauré des précautions pour les visites de biens et la remise des clés.

Est-ce que la crise accélère vos projets sur la digitalisation ?

La situation a accentué le besoin de disposer de solutions à distance. Par exemple, nous avons tenu en fin d'année dernière notre première assemblée générale par visioconférence. La tendance après la crise sera certainement une défiance pour les contacts donc cela poussera les utilisateurs vers ces outils digitaux. A terme, toute notre relation client sera dématérialisée, avec deux ambitions : être plus réactif et apporter plus d'expertise à nos clients. Nous poursuivons ainsi notre route digitale avec l'objectif de lancer en juin une application pour proposer nos activités de syndic et de gestion locative sur smartphone. La technologie nous permet de garder un lien constant avec nos clients.

Comment évolue l'activité de votre filiale Tech-way, lancée à la fin de l'année 2019 ?

Tech-way a été lancée à la suite du constat que l'on a du mal à faire venir des spécialistes pour de petites interventions dans les copropriétés. Elle a des compétences dans trois domaines : la dératisation et désinsectisation, la gestion des bornes à incendie et le contrôle de la qualité de l'air. La crise sanitaire a mené au lancement d'une quatrième spécialité : la désinfection des espaces. Elle a déjà de nombreux clients dans l'hôtellerie et les pharmacies. Cela va être indispensable pour la réouverture des agences mais ensuite, il s'agit surtout d'une mesure pour se rassurer. Il ne sera pas possible de désinfecter tous les jours car les coûts seraient prohibitifs.

Quels sont les prochains chantiers sur lesquels vous allez travailler ?

Nous avons prévu une expertise autour de l'efficacité énergétique, pour aider les copropriétaires à réduire leur empreinte carbone dans les immeubles. Dans notre système full-digital pour les agences et les clients, la deuxième vague sera l'installation d'objets connectés dans les immeubles. Ce n'est pas un chantier que nous avons ouvert mais nous savons déjà où il serait pertinent de les placer : dans les ascenseurs, sur les chaudières ou les portes de garage, dans une optique de réaction immédiate en cas de problème. Il nous faut ensuite trouver le fournisseur avec qui travailler. Les déploiements IoT ne s'effectueront néanmoins pas avant 2021, voire 2022.

Philippe Salle est président du groupe Foncia depuis le 1er décembre 2017, et président du conseil d'administration du groupe CGG depuis le 26 avril 2018. Il est diplômé de l'Ecole des Mines de Paris et titulaire d'un MBA de la Kellogg Graduate School of Management, Northwestern University de Chicago. Philippe Salle a débuté sa carrière chez Total, en Indonésie, avant de rejoindre Accenture en 1990. De 2011 à 2015, il occupe la fonction de président-directeur général du groupe Altran. Il devient ensuite président-directeur général d'Elior Group, jusqu'au 31 octobre 2017, avant de rejoindre le groupe Foncia, leader européen des services immobiliers résidentiels, en tant que président.

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