La médecine du futur

Dans l'avenir, la médecine sera plus préventive que curative. Grâce à la science, au big data et à la technologie, nous serons en mesure d'identifier la maladie plus tôt, d'intervenir de manière proactive et de comprendre sa progression.

La médecine s’est développée à travers l’histoire, depuis la fin du 19éme siècle. Elle a connu une série de métamorphoses, pour évoluer d’une médecine purement curative vers une médecine holistique, une médecine 360° qui se place avant, après et autour de la maladie, qui s’intéresse plutôt à la cause et la physiopathologie. La médecine du 21éme siècle, est une médecine tellement précise, qu’elle changera radicalement le paradigme des soins, une médecine précise, anticipative, intelligente, connectée, robotisée et digitalisée. C’est surtout, une médecine 4P et 4.0.

La médecine 4P 

1. La médecine personnalisée

Le concept de médecine personnalisée n'est pas nouveau, les cliniciens ont toujours veillé à personnaliser les soins, pour les rendre mieux adaptés aux besoins de santé individuels des personnes (chaque médecin a toujours visé à donner le bon médicament, au bon moment et au bon patient). Pendant toute l'histoire de la médecine, jamais il n'a été possible de prédire avec acuité la réaction de chaque corps vis à vis des interventions spécifiques, ou d'identifier selon quel niveau de risque peut-on développer une maladie.

La communauté médicale et scientifique a pendant longtemps considéré le tabac comme un facteur de risque majeur dans le cancer broncho-pulmonaire, pourtant, il y a de grands fumeurs qui n’ont jamais développé un cancer bronchique, alors que d’autres personnes sans antécédents toxiques l’ont pourtant développé. Notre santé est déterminée par notre patrimoine génétique combiné à nos modes de vie et à notre environnement.

Dans le futur, grâce aux nouvelles technologie de l’information ,grâce au big data et les possibilités qu’offre les techniques de décryptage et de séquençage de l’ADN avec d'autres informations cliniques et diagnostiques, des modèles peuvent être développés capables de nous accompagner à déterminer les interventions les plus efficaces, qu'il s'agisse de médicaments, de choix de vie ou même de simples changements de régime alimentaire. 

2. La médecine prédictive

La médecine dite "prédictive" ou de prévision, est une médecine basée sur l’anticipation, qui s’adresse non pas à des malades mais à des individus sains susceptibles de développer une maladie donnée. Tout d’abord, il convient de rappeler que la médecine prédictive est différente de la médecine préventive bien que leurs buts soient similaires.

Cette médecine s’opère plusieurs années avant l’apparition de la pathologie, en établissant une cartographie personnalisée des facteurs de risque et des éléments protecteurs de la santé d’une personne, quoiqu’il est inacceptable sur le plan éthique et déontologique d'utiliser les moyens modernes de la médecine prédictive pour classer des personnes "génétiquement" malades dès leur enfance, alors qu'ils ne seront "cliniquement" malades (les cancers, les maladies cardiovasculaires et métaboliques héréditaires ..) que vers l'âge de 50 ans ou plus tard. Surtout que cela pourrait impacter considérablement leur vie sociale et sociétale (promotion au travail, prêts bancaires, assurances-vie, etc...).

Cette médecine offrira des possibilités et des avantages énormes, surtout lorsqu’elle est éthiquement encadrée, notamment dans le cadre des maladies handicapantes graves d’origine génétique. Dans certains pays, comme Chypre, le fait de rendre le dépistage préconceptionnel systématique pour la β-thalassémie, a contribué à la disparition de cette maladie (aucun cas n’a été enregistré depuis 2002). Il l’est également en Israël et aux États-Unis pour la maladie de Tay-Sachs pour la communauté ashkénaze.1

3. La médecine préventive 

Contrairement à la médecine prédictive , qui est surtout probabiliste, la médecine préventive est plus concrète et classique ,  elle s’appuie sur  l’éducation à la santé, la sensibilisation, voire même des programmes IEC (Information-Education-Communication) visant à réduire les risques de maladie (prévention primaire), elle cherche à traiter la maladie "clinique" le plus précocement, à travers le dépistage précoce (prévention secondaire) et vise constamment l’amélioration de la qualité de vie des personnes déjà malades (prévention tertiaire). In fine, c’est une médecine qui place le "bien-être de l’être humain" au centre de ces différents processus.

4. La médecine participative

Ces dernières années, la médecine est devenue progressivement plus participative, où les prestataires de soins de santé et les patients travaillent en partenariat, le processus de soins intègre de plus en plus "une dimension patient" une représentation digitale ou socle numérique qui regroupe l’ensemble des informations personnalisées extraites ou construites à partir de son corps et de son mode de vie (patrimoine génétique, activité physique, habitudes ,antécédents familiaux, voyages, niveau de pollution...). Le médecin, pour sa part, est épaulé par son capitale connaissance, son expérience et ses règles de décision. En fait, même l’utilisation des outils modernes de communication et d'information, pourrait accroître la participation active du patient aux décisions médicales liées à sa santé (téléhomecare). Cette approche de la médecine participative, basée sur l'augmentation de l'engagement des patients, promet également d'améliorer l'adhésion au traitement ainsi que les résultats, de réduire les erreurs médicales, d'augmenter la satisfaction des patients et de réduire bien évidemment le coût des soins.

Désormais, avec Internet, les échanges inter-patients, la vague de vulgarisation médicale et l’internet des objets, le schéma classique "sachant –exécutant" pourrait se transformer en "sachant- sachant" avec un niveau différent de connaissances.

La médecine 4.0

Les technologies d’informatique et de communication ont accompagné le processus de soins (diagnostic et thérapeutique) depuis de nombreuses années, et ont donné naissance à des "tendances" que l’on a successivement appelées la "médecine 2.0", puis la médecine "3.0". L’avènement de l’intelligence artificielle, des algorithmes d’apprentissage (automatique et profond) et l’Internet des objets, laisse entrevoir l’avènement inéluctable d’une "médecine 4.0", ou la machine prendra une place de plus en plus importante dans la démarche diagnostique et thérapeutique et même préventive. Pourtant, cette machine ne peut jamais être vertueuse et performante sans l’intelligence de l’Homme, de son intervention, et aussi à l’empathie du médecin et la sacralité de la relation médecin-patient. La médecine du futur, est une médecine pointue et performante, le fruit d’une collaboration étroite entre le cerveau de neurones et le cerveau de silicium.

Enfin, il est évident que la médecine changera de paradigme, désormais, l’exercice de la médecine est une interaction entre la médecine 4P, l’industrie médicale 4.0 et des politiques de santé dynamiques. Afin de répondre au mieux aux problèmes générés par cette nouvelle médecine, notamment :

- Ethiques : l’étude du génome, manipulations génétiques, la chirurgie préventive ….

- Déontologiques : la protection du secret médical et des informations personnelles à l’ère du digital,

- Juridiques : le niveau de responsabilité médico-pénale avec la robotisation, l’usage des logiciels et d’algorithmes et la médecine participative.

- Economiques et sociaux : exacerbation des disparités existantes en matière de santé. Les inégalités dans la recherche pour recueillir des preuves médicales, d’aggraver les disparités existantes dans les soins de santé à travers le monde.

-  Technologiques : mésusage de la technologie et des logiciels par des patients à des fins d’automédication.